Benoit-et-moi 2017
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Benoît XVI, les blogs, et la "réinformation"

A propos des "pasquinades" anti-Bergoglio, une importante réflexion de Raffaella sur le rôle des blogs (8/2/2016)

>>> A propos des "pasquinades":
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Affiches anti-François, l'enquête de la police
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Vilains réacs contre gentil Pape
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Crime contre la Pensée

>>> Et aussi:
Théorie du complot et propagande du "systéme"

Raffaella réagit à l'un des multiples articles de la presse italienne (rappelons que le rapport des italiens avec la papauté, pour une raison évidente de proximité physique sont très différents des nôtres) consacrés à l'affaire des affiches anti-Bergoglio placardées sur les murs de Rome. Comme elle le dit, «quand on en a lu un, on les a tous lus», et celui du Corriere della Sera, objet de ses réflexions, ne fait pas exception. Signé d'un certain Massimo Franco, l'article (dont on trouvé des quasi copié-collé à de multiples exemplaires, y compris désormais en France) s'intitule : C'EST LE "FRONT DU SILENCE" QUI INQUIÈTE LE PAPE.
Après avoir dénoncé le «lobby puissant (?) et insidieux», cachant, «derrière l'étiquette ambiguë de 'conservateurs'...des secteurs ecclésiastiques et économiques de l'Église catholique probablement minoritaires et marginaux, dépités et hostiles aux choix faits par Jorge Mario Bergoglio», Franco affirme que ce qui inquiète le plus, ce sont en réalité «les fantasmes que cette initiative évoque, une filière, ecclésiastique ou non, déterminée à livrer bataille au pape» contre son gouvernement et ses ouvertures doctrinales, en les amplifiant pour les discréditer.
Dans les entretiens privés, déplore-t-il, des ecclésiastiques et même des cardinaux n'hésitent pas à manier le sarcasme contre le Pape. Et l'arrivée de Donald Trump a - selon lui - donné du courage au lobby catholique conservateur, dans son objectif de «conditionner la lecture du catholicisme occidental dans une optique d'identité fermée, défensive, intolérante».
Et de conclure:

«En elles-mêmes, les affiches devraient être rejetés comme une "pasquinade" digne des bas-fonds curiaux [!!!]. A Sainte-Marthe, la résidence de François, on sait bien que les pièges à redouter ne s'expriment pas dans une contestation ouverte, peut-être vulgaire, et frontale. Les inconnues pour la vision que François a tenté et tente d'imposer à l'Église viennent beaucoup plus d'un "front du silence" transversal, ramifié: de vastes secteurs des épiscopats qui ne se sentent pas impliqués dans sa papauté, même s'ils ne sont pas nécessairement hostiles. C'est cela, le vrai anonymat qui préoccupe François».

* * *

A un moment où les grands médias se positionnent délibérément sur le plan de la morale, prétendant décréter du haut de leur chaire QUI détient la vérité (cf. Théorie du complot et propagande du "systéme"), la façon dont ils ont traité Benoît XVI tout au long de son pontificat apparaît comme un authentique cas d'école, et c'est seulement maintenant, avec le recul, et surtout en comparant avec le traitement réservé à son successeur, que j'en perçois l'extrême gravité. On se souvient par exemple du lynchage médiatique initié par le NYT (excipant de son prestige et d'une réputation de sérieux et d'objectivité aujourd'hui de plus en plus discutable et contestée), à propos de la pédophilie dans le clergé, pour impliquer personnellement le Saint-Père, à coup de mensonges, d'approximations, de falsifications des faits, et qui s'est répandu ensuite comme une marée noire méphitique d'abord dans ses "satellites" européens les plus "prestigieux" (Le Monde, The Guardian, Repubblica, Suddeusche Zeitung, El Pais) avant de s'étendre à l'ensemble des médias.
Si la presse du système, au lieu de faire son travail d'information, prend délibérément la tête d'une faction, il ne faut pas s'étonner de son discrédit. Et il ne reste que les blogs "privés" pour rétablir LA vérité (certes, il reste aux lecteurs la responsabilité ultime de trier).
D'ailleurs, «qui est responsable du succès des sites de ré-information? Qui sinon, la gauche et le "terrorisme intellectuel" qu’elle a imposé? La gauche a commencé par imposer son propre vocabulaire, relayée d’abord par ses médias affidés, puis malheureusement adopté par toute la presse» (www.je-suis-stupide-j-ai-vote-hollande.fr/blog)

C'est ce rôle des blogs que met en évidence le remarquable argumentaire de mon amie Raffaella, qui parle avec passion de ce qu'elle a vécu personnellement pendant huit ans (en particulier avec son travail extraordinaire de réinformation sur "la lutte sans merci de Benoît XVI contre la pédophilie du clergé", qui a servi de base à beaucoup de plaidoyers.
A part un ou deux points de détail (en particulier, personnellement, je ne vois pas de raison de condamner les affiches), en tant que responsable d'un blog commencé en septembre 2006 justement pour faire connaître Benoît XVI, et plus tard, par nécessité, pour le défendre - tâche pour laquelle je me suis souvent sentie bien seule -, avant de devenir par la force des choses un blog délibérément d'opposition, je me reconnais complètement dans sa réflexion.

Le "front du silence", la "pasquinade" des affiches et d'autres réflexions

Raffaella
7 février 2017
/ilblogdiraffaella.blogspot.fr
ma traduction

* * *

L'éditorial de Massimo Franco publié par le Corriere della Sera offre une occasion de faire plusieurs réflexions sur l'état actuel de l'Église et sur la "pasquinade" des affiches.
Franco, comme c'est désormais son habitude, défend bec et ongles le «nouveau cours», divisant le monde entre les bons (ceux qui pensent comme la majorité des médias) et les mauvais (ceux qui n'adoptent pas cette vision).
Désormais, nous devrions tous avoir compris que la perception des médias et celle des gens ordinaires sont souvent et volontiers dans des plans distincts, et de fait, opposés, mais ceci est une autre histoire ...
Cette fois pourtant, Franco fait un pas de plus et il faut lui en être reconnaissant parce que c'est toujours positif de s'interroger sur les problèmes. Il parle, en effet, d'un «front du silence» au sein de l'Église.
Il ne faut toutefois pas penser, me semble-t-il, que seule l'aile conservatrice appartient à ce front.
Le front du silence, ce sont tous ceux qui ont consciemment décidé de ne pas répéter comme des perroquets tout ce qui est servi sur un plateau pour le régurgiter.
Le front du silence, cher Franco, ce sont non seulement les épiscopats qui se sentent exclus, mais aussi les simples fidèles qui sont perdus.
Et c'est précisément cela qui devrait donner à réfléchir, avant encore la fronde des méchants évêques et des cardinaux bavards.

Ce blog a essayé, dans les semaines qui ont suivi le 13 Mars 2013, de comprendre, de trouver une continuité. Nous noous sommes opposés aux comparaisons constantes avec le pape Benoît dépeint comme «le passé» à surmonter et oublier le plus rapidement possible. Nous avons essayé de mettre en évidence tout le travail accompli par Ratzinger, mais nous avons été stigmatisés comme «veuves inconsolables», «nostalgiques», etc. etc.
Donc, à un moment donné, nous avons décidé de garder vivante la mémoire et les enseignements de Benoît, intervenant sur le nouveau cours quand la discontinuité était évidente.
Beaucoup ont agi comme nous, et l'étude d'Armin Schwibach [traduction, je l'espère, à venir, ndt] est encore plus importante et intéressante à la lumière des événements récents.
Les blogs nés sous le pape Benoît ont été vécus comme une «gêne» à partir de 2013, et quant à nous, nous avons été vus comme les «fortes têtes» qui ne se résignaient pas. Puis est venu le moment où les médias ont eu besoin de marquer la continuité et non la discontinuité (comme cela a été fait depuis plus de deux ans), mais c'était trop tard. Le front du silence n'a pas levé le petit doigt. Du reste, avec tous ces avocats de la défense, quel besoin y avait-il des blog privés? Ceux-ci réagissaient pour rétablir la vérité historique sur Ratzinger (qui n'a pas d'avocats dans les médias), mais on ne peut pas leur demander de descendre sur le terrain quand pendant des années ils ont été dénigrés.
Et pourtant ... et pourtant c'est l'évasion ou le silence des fidèles qui devrait préoccuper, pas celui des épiscopats.

*

Mais venons-en à la "pasquinade" des affiches.
Personnellement , je condamne, comme j'ai toujours condamné des initiatives de ce genre. Quand il y a quelque chose qui ne va pas, on doit avoir le courage de montrer son visage et ne pas se cacher derrière l'anonymat. Ce n'est pas la bonne façon de régler les problèmes. Mais il faut aussi admettre que la dissidence a du mal à trouver un espace.
Les médias traditionnels (presse et TV) n'hébergent JAMAIS les interventions polémiques ou critiques sur le nouveau cours.
Ils n'ont même pas donné la nouvelle des "dubia" des cardinaux quand internet diffusa le scoop et ils se sont occupés de l'Ordre de Malte seulement après la «démission» du Grand Maître. Ce n'est pas une manière d'informer le public.
Toutefois, les affiches ne servent à rien, parce que, étant anonymes, elles se disqualifient immédiatement. Il y a le web qui peut devenir le véhicule privilégié de l'information. Profitons de cette opportunité. Benoît était le Pape d'Internet et d'Internet sont venues calomnies et insultes, mais aussi beaucoup de solidarité et surtout un travail de recherche pour rétablir la vérité sur de nombreuses questions.
C'est à partir du Web que nous avons eu connaissance de l'arrière-plan du Synode, des "dubia" des cardinaux et de beaucoup d'autres initiatives de discontinuité qui, autrement, auraient été bien cachées. Avec le déclin des médias traditionnels, c'est le web qui est l'occasion de la confrontation, peut-être avec des règles claires qui obligent la rectification des nouvelles fausses ou calomnieuses.
Je dois dire la vérité: j'ai été surprise par l'écho qu'ont trouvé les affiches. On a, pour ainsi dire, saisi la balle au bond. Je réitère ma condamnation, et dans le même temps, je note que les médias ont tous serré les rangs pour trouver immédiatement le coupable sans avoir besoin de mener un procès. Et puis, cette histoire de «groupes fortement minoritaires» ...à force de la répéter devient-elle vérité pour autant?
Même «notre» Politi endosse l'armure. Je ne cite pas la myriade d'articles d'autres journaux, tous indignés par l'affiche, parce que «quand on en a lu un, on les a tous lus ...».
Donc, pour ceux qui nous lisent: ferme condamnation des affiches de ma part mais aussi, signalement du «deux poids et deux mesures» des médias. Plus qu'un signalement, à dire vrai, c'est une dénonciation. Combien de fois Benoît XVI a-t-il été insulté? Y a-t-il jamais eu une réaction médiatique aussi compacte à sa défense? NON!

Je rappelle que Benoît XVI a été empêché de parler à La Sapienza et nos chers médias offraient le micro à des «sages éclairés» qui avaient écrit une lettre basée sur une fausse citation! A ce moment, les journalistes sont-ils remontés à la source? NON! Une seule chose importait: donner la parole à la dissidence.
Qui a défendu le pape? Les blogs et quelques médias, mais pas les grands quotidiens ou les journaux télévisés (je me souviens que Tg1 a reçu Scalfari qui a donné raison à ceux qui ne voulaient pas du Pape à l'université). Qui a trouvé le texte original de Ratzinger qui disait exactement le contraire de ce qu'affirmaient les professeurs? Gemma [ndt: sur le blog de Raffaella]! Puis il y a eu une réaction populaire incroyable et l'Angelus était bondé. Les médias firent la grimace, mais malheureusement pour eux, Benoît a magnétisé les fidèles.

Sans oublier le moment de la révocation de l'excommunication des lefebvristes. Enfer et damnation! Je me souviens d'interviews enflammées. Sans oublier les éditorialistes (Melloni en tête) qui critiquaient durement le pape. Aujourd'hui, l'accord avec les lefebvristes est plus proche, mais personne ne dit rien...

Et en 2010? Tous les médias contre Benoît coupables d'avoir écrit une lettre De delictis gravioribus. Qui a trouvé le texte (en latin) du motu proprio du pape Jean-Paul II dont la lettre provenait? MédievAl (je suppose qu'il s'agit d'un contributeur du blog de Raffaella). Et qui a traduit des passages du latin? Le blog!
Disons-le tout net: sans les blogs (pas seulement le nôtre, évidemment, mais tous ceux qui sont nés sous son pontificat) Benoît XVI, le Pape d'Internet, n'aurait jamais été défendu, ni par ceux dont c'était le devoir, et encore moins par la presse. Aujourd'hui, la défense arrive directement du Vatican, des organes d'information qui gravitent autour de l'hôtel Santa Marta et de tous les médias laïcs.

Les affiches sont certainement à condamner, mais peut-être que tous (Vatican et médias encenseurs) devraient se demander si ce n'est pas précisément cette attitude tendant à ignorer toute critique ou perplexité qui alimentent les pasquinades, et pas ce «front du silence» qui se sent exclu ou qui (pire encore) ignore de plus en plus ce qui se passe dans l'Église.
En particulier: que les médias se demandent s'ils font une information correcte, que le Vatican se demande si cette attitude de fermeture qui minimise ceux qui critiquent (les fameux «groupes fortement minoritaires)» et qui refuse de répondre aux "dubia" n'est pas en train de devenir un risque que l'Église ne peut plus se permettre.
Tant que les places débordaient, aussi grâce à la nouveauté et à la pommade des médias, on pouvait hausser les épaules. Aujourd'hui que les fidèles se font rares à la fois
(cf. Maigre affluence Place Saint-Pierre) dans les église et sur les places, le doute ne surgit-il pas que quelque chose ne tourne pas rond pas?



PS: Répétons que ce n'est pas nous qui avons changé. Du temps de Benoît, nous aurions condamné sans réserve les affiches comme nous les condamnons aujourd'hui. Et les médias? De 2005 à 2013, ils aurait probablment parlé de «manifestation légitime de la dissidence populaire»