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Lettre ouverte...

de Maxime Introvigne au rabbin Israel Meir Lau, le président de Yad Vashem (21/5/2009)

Maxime Introvigne est, disons, une connaissance (Voir ici: L'Eglise attaquée de l'intérieur, http://benoit-et-moi.fr/2007/... ).

Il vient d'écrire une "lettre ouverte" au rabbin Meir Lau, responsable du mémorial de l'holocauste à Jérusalem, qui a eu quelque audience dans la presse puisqu'il a critiqué l'attitude de Benoît XVI lors de sa visite au Yav Vaschem.
Il est très intéressant de voir mis en perpective, à cette occasion, deux faits récents de l'actualité anti-papale. Ce qu'on pourrait appeler "l'affaire Pie XII", et aussi "L'affaire Williamson".
Sans verser dans la théorie du complot (que la complexité des faits et les enchevêtrements de causes et effets - le faisceau convergent d'inimitiés - auraient tendance ici à invalider), et sans forcément lire ses affirmations comme l'évangile, on est obligés de convenir que les dernières campagnes médiatiques ont des motivations qui remontent inexorablement aux mêmes sources.

Sur le rôle des catholiques progressistes (ce que dit Introvigne n'est pas absurde du tout, et il suffit de voir d'où est partie la campagne anti-Benoît XVI, en France, après l'affaire Williamson) on peut relire cet article: Un rabbin orthodoxe en défense du pape, http://benoit-et-moi.fr/2009-I/... .

Article original en italien sur ce remarquable site italien (ma traduction):



Lettre ouverte au Rabbin Yisrael Meir Lau, « déçu » par les mots du Pape au Mémorial de l'Holocauste

14 mai 2009

Massimo Introvigne
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Egregio Rabbin Lau,

Mon nom ne vous dira probablement rien, mais une simple recherche sur Internet vous persuadera que celui qui les écrit n'est pas un ennemi d'Israël.
Au contraire, c'est un spécialiste du pluralisme religieux qui ne s'est jamais dérobé lorsqu'il s'est agi de condamner le terrorisme ultra-fondamentaliste islamique, en particulier celui du Hamas, de soutenir le droit de votre Pays à la sécurité (ce qui ne signifie pas, évidemment, partager tout et chacun des choix des gouvernements qui se succèdent en Israël) et de dénoncer toute forme d'antisémitisme.

Comme ex-grand rabbin ashkénaze d'Israël, grand rabbin de Tel Aviv et président du conseil d'administration du Yad Vashem, le Mémorial de l'Holocauste, vos paroles sur la visite du Pape, le 11 mai, à ce même Mémorial ont une signification particulière, que la presse de votre Pays a soulignée.

Au discours du Pape, que l'immense majorité des catholiques - et pas seulement des catholiques - a trouvé non seulement rigoureux mais émouvant, vous avez adressé en substance trois objections.
Le Pape n'a pas besoin d'être défendu : le but de cette lettre est donc seulement de vous faire remarquer combien chacune de ces objections non seulement est peu fondée, mais peut même s'avérer nuisible aux causes que vous vous proposez de défendre.

1. D'abord, vous avez affirmé que, dans le discours de Benoît XVI au Yad Vashem « il manque quelque chose », parce que le Pape allemand « n'a jamais cité les allemands ou les nazis comme responsables de ce massacre, ni exprimé de regret pour eux ». Vous, Rabbin Lau, n'êtes pas catholique mais vous savez certainement que la personne qui a visité le Yad Vashem ne l'a pas fait en qualité d'allemand mais de Pape de l'Église universelle, et c'est justement cela qui rend la visite et l'hommage si significatifs.

Des dizaines de personnalités politiques et culturelles allemandes ont visité le Yad Vashem depuis des années et se sont répandues en « expressions de regret » mais, justement, aucune de leurs visites n'a eu l'écho mondial de celle de Benoît XVI : pas parce que le Pape est un intellectuel allemand plus influent que d'autres qui l'ont précédé, mais parce que le Pape est le Pape.

D'autre part, votre critique est en opposition directe avec la ligne historiographique du Yad Vashem, qui insiste sur le fait qu'on ne peut pas attribuer la responsabilité de l'Holocauste aux seuls allemands ou aux seuls nazis, parce qu'il s'agit en réalité des fruits empoisonnés et terminaux de toute l'histoire de l'antisémitisme. Sur quelques détails de cette histoire, il se peut que moi et vous ne soyons pas d'accord, mais - en tenant compte de ces éventuelles divergences - si Benoît XVI avait pointé le seul national-socialisme allemand, ne l'aurait-on pas accusé de vouloir décharger toutes les fautes sur un seul Pays et sur une seule phase de la triste histoire de l'antisémitisme, en ignorant les phases précédentes, qui ne sont pas seulement allemandes ?

La position du Pape qui condamne l'antisémitisme comme un mal qui jaillit du coeur de l'homme - de tous les hommes, pas seulement les allemands - ne correspond-elle pas, alors, à la justification la plus profonde de votre institution elle-même?

2. En second lieu, vous auriez attendu et souhaité des « excuses » pour le silence du Pape Pie XII pendant la Seconde guerre mondiale. Nous ne résoudrons pas ici une controverse historiographique qui traîne depuis des décennies. Toutefois le Pape y a déjà répondu. Il l'a fait dans le Discours aux participants au Congrès sur «l'héritage du Magistère de Pie de XII et du Concile Vatican II », du 8 novembre 2008 (ndt: en réalité, il s’agit de l’homélie prononcée lors de la messe du 9 octobre, commémoration du 50ème anniversaire de sa mort). A cette occasion, Benoît XVI a rappelé de que Pie XII déploya pendant la Seconde Guerre Mondiale une « intense oeuvre de charité à la défense des persécutés, sans aucune distinction de religion, d'ethnie, de nationalité, d'appartenance politique » .

«Et comment oublier son message-radio de Noël, en décembre 1942? Avec une voix brisée par l'émotion, il déplora la situation des "centaines de milliers de personnes qui, sans aucune faute de leur part, mais seulement pour des raisons de nationalité ou de lignée, sont destinées à la mort ou à un progressif dépérissement", se référant très clairement à la déportation et à l'extermination perpétrée contre les juifs. Il a souvent agi dans le secret et le silence, parce qu'à la lumière des situations concrètes de la complexité de ce moment historique, il avait l'intuition que c'était seulement de cette manière que l'on pouvait éviter le pire et sauver le plus grand nombre possible de juifs. De nombreux et unanimes témoignages de reconnaissances lui furent adressés à la fin de la guerre pour ses interventions, ainsi qu'au moment de sa mort, par les plus hautes autorités du monde juif, comme par exemple le ministre des Affaires étrangères d'Israël Mme Golda Meir, qui lui écrivit: "Quand le martyre le plus épouvantable a frappé notre peuple, durant les dix années de terreur du nazisme, la voix du Souverain Pontife s'est élevée en faveur des victimes", concluant avec émotion: "Nous pleurons la perte d'un grand serviteur de la paix. »

La citation de Golda Meir, que vous connaissez, est significative par un aspect que je me permets de vous faire remarquer. Jusqu'à Vatican II, il ne serait venu à l'esprit d'aucun représentant significatif du monde juif de critiquer Pie XII. Au contraire, les figures les plus éminentes de la communauté juive israélienne et internationale louaient et remerciaient le Pontife.

Qu'est-ce qui a changé avec Vatican II ?
Nous le savons. En 1963 en Allemagne un grand lancement de propagande et de presse accompagne la première de la pièce de Rolf Hochhuth, Le Vicaire, qui accusait Pie XII de complicité avec Hitler. Les documents issus des archives soviétiques et le témoignage du général Ion Mihai Pacepa, autrefois responsable des services secrets de la Roumanie communiste et personnellement impliqué dans l'opération, nous permettent aujourd'hui de conclure sans aucun doute possible que la pièce de Hochhuth fut commandé à l'auteur allemand par le KGB, en la personne du général Ivan Ivanovich Agayants (1911-1968), responsable du département D (Désinformation) du contre-espionnage soviétique. Agayants collabora personnellement à la rédaction du texte signé par Hochhuth, qui était - et qui est - si peu l'ami de votre peuple qu'il s'est signalé en 2005 comme soutien et défenseur public des thèses négationnistes de l'auteur britannique David Irving. Le but du KGB était de discréditer le magistère anticommuniste de Pie XII, considéré comme epitomé (condensé) des positions anti-soviétiques et philo-américaines, dans la Guerre Froide.

Commencée par le KGB, l'action contre Pie XII a été reprise par des catholiques ou ex-catholiques (des ex-séminaristes comme John Cornwell et Garry Wills, ou des ex-prêtres comme James Carroll), qui entendaient attaquer Pie XII et mettre dans embarras l'Église, non plus sur la question du communisme mais sur d'autres concernant les contraceptifs, l'avortement ou les homosexuels (tous thèmes sur lesquels le magistère de Pie XII a préparé le suivant).

Tout ceci est documenté par un bon nombre d’historiens, mais je crois que ceux écrits par votre collègue rabbin, et historien, David Dalin vous sont particulièrement familiers . Dans le sillage du rabbin Dalin, je voudrais vous inviter à réfléchir sur un paradoxe : les hommes de culture et les politiciens israéliens qui interviennent aujourd'hui sur Pie XII sont les victimes plus ou moins conscientes de manoeuvres qui les ont habilement attirés, d'abord dans un piège monté par le KGB, ensuite dans une controverse intra-catholique où les progressistes attaquent les Papes pour des raisons qui n'ont rien à voir avec l'antisémitisme.

Au contraire : les communistes soviétiques d'abord, puis les catholiques progressistes ont été et sont souvent au premier rang lorsqu'il s'agit d'attaquer Israël etd’ agiter les drapeaux de la Palestine ou du Hamas. Cela vaut-il vraiment la peine pour vous de marcher avec - ou d'emboîter le pas à ce genre de compagnie ?

3. Troisième critique, issue des media israéliens. Le Pape, s'il ne souhaitait pas vraiment s'excuser pour Pie XII, aurait dû le faire pour « la plus terrible erreur de son pontificat », la rémission de l'excommunication à quatre évêques de la Fraternité Saint Pie X fondée par Mgr Marcel Lefebvre (1905-1991), dont un - Mgr Richard Williamson -avait exprimé de la sympathie pour les thèses négationnistes sur l'Holocauste.

Après l'affaire Williamson, la condamnation du négationnisme - dont vous, Rabbin Lau, connaissez par ailleurs très bien les origines, elles ne viennent certes pas du monde catholique - de la part du Pape et du Saint Siège a résonné haut et fort, et en dernier précisément au Yad Vashem. Mais je voudrais vous inviter à réfléchir sur le fait que, comme pour Pie XII, dans ce cas aussi des personnalités du monde juif ou israélien risquent de se faire enrôler, peut-être involontairement, dans une guerre intra-catholique entièrement étrangère à la question de l'Holocauste.

Les catholiques ont bien compris qu'à ces progressistes qui se sont jetés sur le Pape après la rémission de l'excommunication, rien n'importait moins que le négationnisme. Aucune de ces progressistes ne savait - avant le scoop d'un couple de journalistes françaises, des militantes anticatholiques particulièrement allumées - que Mgr Williamson avait exprimé des idées négationnistes. Une fois de plus, le monde progressiste qui s'est jeté sur le Pape est souvent le même que l'on rencontre dans les manifestations contre Israël.

Que voulaient-ils, donc, tous ceux-là? Qu'on ne mette pas en discussion une interprétation du Concile Vatican II sur les bases des canons de théologie et de la mentalité progressistes. Avec d'autres gestes, le début de ce dialogue - par ailleurs difficile - avec la Fraternité Saint-Pie X à travers la rémission de l'excommunication, était le signe que le démantèlement de ces interprétations du Concile était en cours.
Ce démantèlement aurait aussi rendu plus compliqué le désaccord intra-catholique par rapport au Magistère du Pape sur des thèmes comme l'euthanasie ou le mariage des homosexuels. L'enjeu est donc, ici aussi, très éloigné de l'Holocauste et implique des questions - justement sur le thème de l'euthanasie et du mariage homosexuel - sur lesquelles, sauf erreur, vos positions sont beaucoup plus proches de celles du Pape que de celles des détracteurs de Benoît XVI.

La question, donc, également à propos de la rémission des excommunications est : pourquoi tenez-vous à vous faire enrôler dans une guerre contre le Pape, promue pour des objectifs que vous ne partagez pas, par des gens qui, en grande majorité, n'ont pas de sympathie particulière pour votre cause ni pour votre Pays ?

L'occasion constituée par la visite du Pape en Israël en général, et au Yad Vashem en particulier, pour dépasser les anciennes équivoques est historique.
Ne contribuez donc pas à la gâcher. Essayez de discerner avec l'équité de l'intellectuel la voix de la raison, et avec celle du rabbin la voix du Dieu d'Abraham, d'Isaac, de Jacob qui certainement parlent encore aux croyants disposés à l'écouter.

Le Pape l'a dit à Jérusalem (Discours au Jérusalem center, 11 mai 2009): « Chacun de nous ici sait bien que, malgré tout, la voix de Dieu se fait entendre moins clairement aujourd’hui, que la raison elle-même en bien des cas devient sourde au divin. Toutefois, ce « vide » n’est pas celui du silence. Bien au contraire, c’est la cacophonie des requêtes de l’égoïsme, des promesses vaines et des fausses espérances, qui le plus souvent envahissent les espaces mêmes où Dieu nous cherche. Pouvons-nous dès lors créer des lieux, - des oasis de paix et de méditation profonde - où la voix de Dieu puisse de nouveau être entendue, où sa vérité puisse être découverte au cœur de la raison universelle, où chaque individu, quelles que soient son origine, son appartenance ethnique ou politique, ou sa croyance religieuse, puisse être respecté comme une personne, comme un semblable ? ».

Aidez-nous à espérer que la réponse peut être oui.

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Dans le Figaro

«J'aurais préféré un discours du pape plus émotionnel»
http://www.lefigaro.fr/international/...
12/05/2009

Rescapé de la Shoah, le rabbin Israel Meir Lau est le président de Yad Vashem, le mémorial de l'Holocauste à Jérusalem, et l'un des plus éminents rabbins israéliens. Il répond aux questions du Figaro.

LE FIGARO - Comment réagissez-vous au discours du Pape Benoît XVI à Yad Vashem ?
Rabbin Israel Meir Lau - Je tiens tout d'abord à préciser que j'apprécie hautement le principe de la visite du Pape Benoît XVI, en Israël tout d'abord, et au Yad Vashem, le mémorial de l'Holocauste, ensuite. Le discours qu'il y a prononcé était un très beau discours, très bien construit, où figuraient beaucoup de points positifs. Il a fait référence aux patriarches Abraham et Jacob, comme les guides du peuple juif, Abraham symbolisant la foi et Jacob le courage et l'esprit de survie. C'est un encouragement important venant d'un Pape et un compliment.Il a aussi dit trois choses importantes, à une époque où se répand le négationnisme. Le Pape a dit non à la négation de la Shoah, non à l'oubli, et non à la minimisation de son ampleur. Ces trois non sont aussi très importants. Ils constituent une réponse éclatante du Pape à tous les négationnistes, d'Ahmadinedjad à l'archevêque Williamson.Je trouve cependant que manquait l'expression de sa solidarité avec les souffrances du peuple juif. Si je compare le discours de Benoît XVI avec celui de Jean-Paul II, prononcé au même endroit, à Yad Vashem en mars 2000, je trouve que des phrases manquaient : la tristesse, le chagrin, et la solidarité avec le peuple juif, brutalement assassiné par les nazis. Benoît XVI a employé le mot «tués» au lieu d'«assassinés», et n'a pas mentionné les auteurs du crime. Il aurait pu dire «assassinés par les nazis», et mentionner l'Allemagne. Il ne l'a pas fait. Je ne sais pas pour quelles raisons, mais je trouve que cela manquait. Mais ceci mis à part, c'était un bon discours.

Qu'auriez-vous aimé entendre de la part du Pape ?
Personnellement, en tant que rescapé de Buchenwald, j'aurais préféré un discours plus émotionnel, qui aurait exprimé plus d'empathie, de solidarité. Son prédécesseur l'avait fait. Je connaissais très bien Jean-Paul II. Je l'ai rencontré à plusieurs reprises en tête-à-tête. En septembre 1993, à sa résidence de Castelgandolfo, il a mentionné devant moi Israël par son nom. C'était la première fois qu'un Pape faisait référence à l'Etat juif, alors que le Vatican, qui n'entretenait pas de relations diplomatiques avec Israël à cette époque, ne parlait jusqu'alors que de Terre sainte ou de Terre promise. C'est grâce à ça que les négociations pour l'établissement de relations diplomatiques entre Israël et le Vatican ont pu aboutir.

Qu'attendez-vous de la visite de Benoît XVI ?
J'espère simplement qu'il continuera à construire un pont entre l'Eglise catholique et Israël, comme avait commencé à le faire Jean-Paul II. Benoît XVI était le plus proche ami et collaborateur du précédent Pape, et je souhaite qu'il marche sur ses traces. C'est un homme différent, et il ne sert à rien de les comparer, mais j'espère que le rapprochement continuera.

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