L'Encyclique: place dans les medias
Vue de l'espace francophone, Suisse et France (9/7/2009)
Peu d'espace médiatique accordée à l'Encyclique, dans la "francophonie".
Pas grave, en fait: en réalité, l'Encyclique n'est pas destinée à faire la une du JT, ou à intéresser les accrocs de la consommation et du loisir qui constituent le tissu de notre société, mais à former les intellectuels, et à influencer les décideurs. Tel est le pari de Benoît XVI, avec ce texte complexe.
Il n'empêche: sur certaines chaînes de radio qui répercutent pratiquement en temps réel la moindre accusation - non étayée - d'abus sexuel pesant sur un prêtre, le black-out a été total.
D'aucuns, optimistes, ou aveugles, penseront peut-être qu'il s'agit du syndrome "dog bites man" déjà rencontré ici, via John Allen. Ah bon?
Et dans quelle catégorie entrent le prétendu dérapage papal dans l'avion vers l'Afrique, l'enterrement planétaire de MJ, le shopping parisien de MO, et le procès du gang des barbares (évènement sans autre rapport entre eux que d'avoir été hyper-médiatisés)?
Sur ce sujet, je suis arrivée sur un blog suisse, qui m'a amenée à d'autres articles, y compris français, de fil en aiguille...
Le Suisse romain
Les médias ne sont pas neutres
(Source)
Ce fut une découverte durant cette année d'études. Dans les médias, l'objectivité n'existe pas. Il s'agira toujours d'une interpétation de la réalité qui est complexe, vaste et riche. L'argument du miroir social n'est pas correct. Il y a toujours un choix derrière une nouvelle. Ainsi, lorsque certains disent: "nous ne faisons que notre travail, informer les gens sur ce qui se passe"... ce n'est pas exact, plutôt incomplet.
Petit exemple: l'Encyclique du Pape connaît en l'état peu d'impact dans les médias. Mais c'est peut-être à venir.
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Un des vrais pouvoirs des médias
(Source)
Selon une théorie ("agenda setting" en anglais, l'organisation de l'agenda), les médias ont moins de pouvoir sur la pensée des gens que sur le thème dont parlent ces mêmes gens. Autrement dit, les médias n'arrivent pas tant à imposer leur point de vue que d'imposer un ordre du jour des conversations.
Dans une réunion d'entreprise, par exemple, celui qui fixe l'ordre du jour à un réel pouvoir. Il va choisir les thèmes qui seront abordés et laisser de côtés d'autres sujets. Le pouvoir des médias résident donc dans "l'agenda setting", non pas sur le "que penser mais sur le sur quoi débattre". Un peu comme au théatre, avec le spot lumineux qui met en relief une scène particulière et qui laisse dans l'ombre d'autres choses.
Un exemple vient du peu d'écho que l'encyclique "Caritas in Veritate" semble avoir dans les grands médias. Si le document avait été sur une réintégration d'Ecône, le texte aurait trouvé les premières pages. Ce sont donc les médias qui choisissent les thèmes. Certes, les funérailes de Michael Jackson ont tenu le devant de la scène. L'émotion a un grand pouvoir.
Ceci permet d'expliquer en partie la réputation de Pape conservateur dont jouit Benoît XVI. Si on met en avant, ou on éclaire que certains sujets (Messe en latin, levée des excommunications.. ), l'effet sera de construire une caricature de sa personne. Or, bien de ses actions sont laissées dans l'ombre, dont (pour l'instant) cette magnifique encyclique. Elle met en lumière la grandeur d'un Pape trop vite oublié: Paul VI. Bonne lecture!
Benoît XVI le dit bien: "les médias ne sont pas neutres".
(il s'agit d'un article de Patrice Fabre, dans la Liberté, quotidien romand édité à Fribourg.
Le copiste
(Les mots en italique peuvent être changés, pour notre lecture de français, mais le discours est parfaitement valide...)
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Les journalistes ont bien de la peine à rendre compte de l’encyclique qui vient de paraître....
La presse radio/tv suisse est gouvernée de manière prioritaire par l’audimat. L’enterrement de M. J. les a plus attirés hier soir. Elle va se consacrer maintenant au G8, et oublier le document. Faut-il attendre autre chose de nos journalistes crypto et post protestants ? Le jour choisi n’apparaît pas opportun, l’encyclique aurait du être publiée au moins une semaine avant, ne serait-ce que pour avoir la possibilité d'aborder avec un regard critique et informé la réunion des 8 pays les plus riches. En sus, le document nécessite un réel effort de compréhension. Les journalistes ont normalement une connaissance plus que suffisante des questions abordées. Par facilité et par flemme, ils classent simplement l’encyclique parue dans la rubrique « religions ». Leur doctrine étant celle du laïcisme intégral, ils ne veulent attirer l’attention que sur ce qui va dans leur sens. Ils oublient les pays pauvres et les partis politiques qui ont encore une sensibilité chrétienne. Ils semblent ne pas exister. En Afrique, les médias étaient passés complètement à côté du message de l’Eglise pour le continent, en l’obscurcissant par la polémique.
Il est légitime de s’interroger toutefois sur la transmission des idées principales de l’encyclique. Quelques slogans seraient bien utiles, un grand nombre de fidèles ne retenant qu’eux. Tous ne peuvent pénétrer dans cet ensemble très intéressant, profond, mais complexe.
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Le Monde sort quelques bêtises dans son éditorial, l’auteur n’a même pas lu l’adresse du document. Il ne s’adresse pas qu’aux évêques ! A croire que l’auteur prend tous les fidèles pour des intellectuellement « minus ». La finale est mordante : un rêve de Pape. Pourtant l’idée d’une autorité mondiale de régulation en matière financière n’est pas de lui ! Elle a été fréquemment mentionnée avant le fameux G20, au cœur du grand crash financier.
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Encyclique globale pour Monde globalisé. Impression après une première lecture, il s'agit d'une véritable encyclique programme. C'est le type de document qui devra servir à la formation des chrétiens en économie et en politique. On y retrouve bien entendu les grands principes et le "bien commun" de Jacques Maritain. Il ne s'agit pas d'une répétition. Le texte, dans certaines parties a été formulé avec l'aide de personnes qui s'y connaissent en technique économique. Il nécessiterait un abrégé. Les parties spirituelles peuvent être lues par tous. L'économie est au service du développement humain. Il ne peut se réaliser en ignorant Dieu. On ne peut traiter ce texte à la légère. A un monde globalisé, une autorité économique centralisée est nécessaire. Cette autorité ne peut se réaliser qu'en respectant obligatoirement le principe de subsidiarité et l'homme dans sa totalité.
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La complexité de l'encyclique s'exprime par le nombre de résumés effectués par Mme Bourdin (ndr: dans Zenit). Elle a pris la peine de le faire chapitre par chapitre : 9 articles dans la dernière livraison de Zénit! Cette encyclique nécessite d'être étudiée.
Le Monde (épinglé ci-dessus)
Rêve de Pape
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L'article du Monde a donc été cité avec ironie dans le blog suisse du copiste. L'auteur n'a même pas lu le début du texte, manque de professionalisme certes regrettable, mais aussi économie d'un effort inutile, puisqu'il sait déjà ce qu'il lui faut en penser...
J'ai apprécié le Pape moral très controversé. Venant du Monde, quel beau compliment!
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Un pape social
(Source)
Avec sa troisième encyclique, Caritas in veritate (L'Amour dans la vérité), publiée mardi 7 juillet, Benoît XVI renoue avec l'engagement social de ses prédécesseurs. Prévue en 2007, et différée à cause de la crise, la lettre papale tombe opportunément, à la veille du G8 de L'Aquila (Italie). Chaque encyclique sociale a correspondu à un bouleversement mondial ou à une rupture : Rerum novarum de Léon XIII (1891), à l'aube du capitalisme industriel ; Quadragesimo anno de Pie XI (1931), au coeur de la Grande Dépression ; Populorum progressio de Paul VI (1967), quand l'aide au développement a prolongé la décolonisation ; Centesimus annus de Jean Paul II (1991), après la chute du communisme.
Benoît XVI ne révolutionne pas la pensée sociale de l'Eglise catholique, orientée depuis plus d'un siècle sur la recherche de la justice sociale au service du "bien commun", il la réactualise en prenant en compte la mondialisation. Le pape prône un "humanisme intégral", en soulignant avec force que l'homme est "le premier capital à sauvegarder et à valoriser". Comme Jean Paul II, Benoît XVI défend l'économie de marché mais à condition qu'elle prenne en compte le "bien commun" et qu'elle réhabilite le don.
Dans ce document de 140 pages qui s'adresse aux évêques, Benoît XVI n'en reste pas à un registre papal classique - comme lorsqu'il proclame qu'un "humanisme sans Dieu est inhumain" ou qu'il espère faire de l'économie "un lieu de communion" -, il administre à ce capitalisme, maintes fois vilipendé par ses prédécesseurs, une leçon d'éthique sociale. L'évêque de Rome reconnaît des vertus à la mondialisation, dès lors qu'elle favorise le développement ou une meilleure répartition des richesses, mais il pointe surtout ses dysfonctionnements : les désordres de l'activité financière, la spéculation, la mauvaise gestion des flux migratoires, la corruption, l'exploitation anarchique des ressources naturelles, les délocalisations, le chômage, la faim, etc.
On savait que Benoît XVI était un pape moral - très controversé -, c'est aussi un pape social. Un pontife qui plaide, à la lumière de la crise, pour un capitalisme vraiment régulé. Il s'inscrit, cette fois, dans son temps en jugeant que le rôle de l'Etat, "destiné à croître", doit être "repensé". Au moment où Luiz Inacio Lula da Silva prononce, dans nos colonnes, l'acte de décès du G8 et veut faire du G20 une institution permanente, Benoît XVI partage le pessimisme du président brésilien sur la gouvernance mondiale. Il prône même une "Autorité politique mondiale". Un rêve de pape.
La petite bassesse du mourant TC
On ne s'attend pas franchement à des louanges, dans Témoignage Chrétien que l'on croyait sub claquant mais que les subventions ont réussi apparemment à maintenir sous respiration artificielle...
L'article commence sur le ton de l'ironie... et s'achève sur une petite bassesse.
Tiens, le Saint-Siège a oublié de consulter la vénérable insttution pour choisir la date et l'heure de parution...
Ladite bassesse répond certainement à l'un des derniers paragraphes de l'Encyclique (n° 73), celui consacré aux médias.
C'est la mesquine explication trouvée pour expliquer sans doute le boycott par les medias.
Triste façon de se défausser.
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Médias : La communication, toujours…
Cette encyclique aura eu au moins un impact commun dans toutes les rédactions des hebdomadaires français : l’irritation… voire une sainte colère. Le moment choisi pour rendre public le texte de l’encyclique, mardi matin à 9h, correspond à l’heure du bouclage de nombreux hebdomadaires. Autrement dit l’heure des dernières relectures ou de l’ajout d’une ultime brève. Il aura donc fallu lire les 80 pages (???) et fournir les premiers éléments de réflexion en quelques heures… et s’arranger avec les imprimeurs pour un délai « de charité » ! Là où la stratégie de communication vaticane est totalement incompréhensible, c’est que le seul hebdomadaire catholique qui n’aura pas pu parler de l’encyclique, en raison de son bouclage le lundi est… Famille Chrétienne, le meilleur soutien du pape en France ! Faut-il en conclure que les médias français n’intéressent plus Rome ?
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