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L'amour dans la vérité

C'est le titre sous lequel l'encyclique paraît aux éditions Bayard (CERF)...
Des analyses, celles de l'Abbé de Taouärn, et de Mgr Michel Mouïsse, évêque de Périgueux et Sarlat (23/7/2009)


Caritas in Veritate

Site du Saint-Siège

Le choix du titre

N'est-ce pas curieux que les éditions Bayard/ Fleurus-Mame aient cru devoir publier l'encyclique sous son titre qui n'est qu'une traduction du latin en français, et qui me paraît contraire à tous les usages?
Je pose juste la question, mais je suis personnellement très convaincue qu'il y a une intention.
Tous les grands textes des pontificats précédents sont connus (et certains sont rentrés dans l'histoire) sous leur titre en latin (que l'on pense à Humanae Vitae) et même si caritas signifie amour, il n'y a pas correspondance absolue entre les deux termes.

L'usage de ne plus traduire les titres s'est d'ailleurs répandu jusque dans le divertissement, où il est de plus en plus courant que les films (surtout américains) gardent leur titre d'origine.
Mais certains, décidément, n'aiment pas le latin, et le font savoir... visiblement.

Juste avant la parution de l'encyclique, le blog de la Croix (Dans l'attente de l'encyclique) s'était fait l'écho des critiques des lecteurs sur le choix du titre, trouvant au mot charité une forte connotation, comme on dit maintenant, et après que se soit en plus répandu la fausse rumeur que le retard dans la parution était dû à la difficulté de traduire le texte en latin (au moment où j'écris ces lignes, la version en latin n'est d'ailleurs pas sur le site du vatican, où par contre la version en français porte bien le titre "Caritas in Veritate").

L'analyse de l'Abbé de Taouärn

Dès la parution de l'encyclique, l'Abbé de Taouärn s'est lancé dans la lecture, communiquant ses impressions au fur et à mesure sur son blog http://ab2t.blogspot.com/ .
Dès le 8 juillet, il écrivait ce préambule de toute beauté (et mon amie Marianne, qui l'avait lu, me l'avait simultanément signalé):
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Je n'attends pas plus longtemps pour vous donner quelques réactions à la lecture de l'encyclique Caritas in veritate. J'en suis au n°44. Je n'ai pas tout lu. Mais il me semble que dans cette encyclique, on doit louer d'abord l'art de la fresque, cette conception grandiose qui, à partir de Populorum progressio du pape Paul VI repense toute la doctrine sociale de l'Eglise, en ambitionnant d'en faire une charte internationale du développement au siècle de la mondialisation.
Mais comme un peintre parvenu au sommet de son art, le pape allie les qualités d'un génial peintre à freque (Michel Ange) et celles d'un étonnant, d'un surprenant miniaturiste (Vermeer). Il y a aussi l'art de la Miniature dans son encyclique, le sens de la formule, une manière de faire le point en quelques lignes sur des questions controversées, une façon d'accrocher au vol un détail de la scène qu'il dépeint, qui m'a ébloui.

Tant que nous en sommes aux métaphores artistiques, je ne connais que Soljenitsyne qui ait possédé à ce degré le sens de la Vérité macro-historique ou macro-romanesque et le goût de ces détails accroche-coeur qui font souvent la différence entre un bon professionnel de la République des Lettres et un génie (voir ses Nouvelles : Zacharie l'escarcelle etc.)

Benoît XVI a une idée mère : pas de développement au XXIème siècle comme à toutes les autres époques, sans que l'Eglise mère et maîtresse des nations ne fasse entendre sa voix d'une manière privilégiée.

Et autour de cette idée matricielle, c'est une constellation de mille points lumineux qui s'organise. Cela va du concile Vatican II au rôle sapientiel de la théologie et de la nature du Marché au statut de l'entrepreneur... Mais ne cédons pas à la tentation d'un inventaire qui, détruisant le contexte, serait forcément "à la Prévert".

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Je reproduis ici de larges parties d'une interviewe par JM Molitor parue dans l'hebdomadaire Minute du 15 juillet (que j'ai scannée).
Il me semble que l'Abbé résume mieux que personne les intentions du Pape (pour autant que cela soit possible) lorsqu'il écrit:
Le propos de Benoît XVI est d'une extrême ambition pour l'Eglise, qu'il place en position d'arbitre dans le processus de la mondialisation.

Oui, tout est dit.

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L'encyclique Caritas in veritate, datée du 29 juin, a été publiée le 7 juillet, le jour où avaient lieu les obsèques de Michaël Jackson. Les médias, avec un bel ensemble, ont donc boudé ce texte, qui apparaît comme une protestation, à la fois véhémente et argumentée, contre l'horreur économique et contre l'imprévoyance d'un néolibéralisme omnipotent. L'abbé Guillaume de Tanoüarn, membre de l'Institut du Bon Pasteur et responsable du Centre culturel Saint-Paul, a bien voulu évoquer ce que représente cette encyclique pour lui.
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Minute: M. l'abbé, estimez-vous normal que le pape prenne des positions en matière sociale et politique? Ne devrait-il pas se contenter de parler de religion ?

Abbé Guillaume de Tanoüarn: (..) que le pape s'intéresse à la morale, c'est normal, on ne saurait lui reprocher de rappeler les règles qui régissent la vie humaine. (..)
Le pape a compris que la mondialisation en marche avait besoin d'une sorte de charte spirituelle. Il n'hésite pas à proposer, au nom de l'Eglise, cette doctrine sociale comme « une synthèse directrice, animée par une claire vision de tous les aspects économiques, sociaux, culturels et spirituels » (n°31). Pour lui, seule l'Eglise peut proposer cette synthèse, parce qu'elle a une vision globale de l'homme et parce qu'elle n'est pas un acteur direct dans le jeu économique. En lisant l'encyclique, j'ai souvent pensé à la célèbre formule de Charles Maurras : « L'Eglise ? Mais c'est la seule Internationale qui tienne »... En tout cas le propos de Benoît XVI est d'une extrême ambition pour l'Eglise, qu'il place en position d'arbitre dans le processus de la mondialisation.

- Cela fait deux fois que vous parlez de mondialisation. Vous pensez vraiment que ce processus est inéluctable ?

- Entendons-nous bien : il y a le mondialisme, qui est la dernière idéologie occidentale d'origine américaine, idéologie qui a pour but la disparition des nations dans un melting pot qui devra permettre l'extension du modèle américain à l'univers, et il y a la mondialisation qui est un phénomène à la fois technologique (Internet est un instrument, le développement des moyens de communication en est un autre) et commercial (parce que le marché mondial est devenu un fait lui aussi, un fait qui s'impose à toutes les entreprises, les pays dits émergents apparaissant comme la principale source de richesse à court et à moyen terme).

- Et donc le pape face au mondialisme...

- Le pape s'oppose au mondialisme. A plusieurs reprises dans cette encyclique, il défend les nations et les identités. Il insiste aussi sur le rôle de l'Etat face au marché : « L'économie intégrée de notre époque n'élimine pas le rôle des Etats, elle engage plutôt les gouvernements à une plus forte collaboration réciproque. La sagesse et la prudence nous invitent à ne pas proclamer trop tôt la fin de l'Etat » (n°41).

- Ne parle-t-il pas aussi d'un gouvernement mondial ?

On a beaucoup reproché au pape de mettre en avant l'idée d'un gouvernement mondial au n°67. Mais que cherche-t-il, ce faisant, sinon à opposer au marché mondialisé une instance politique capable de résister au courttermisme et à l'impératif du rendement immédiat ? Oh ! Il y a là bien sûr une dimension utopique. Ce qu'il faut comprendre, c'est que cette idée d'un gouvernement mondial opposé aux forces mondialisées d'un marché devenu centrifuge signifie avant tout, chez Benoît XVI, un antilibéralisme viscéral. Il ne se résout pas à laisser le dernier mot aux impératifs économiques. Pour lui le marché ne peut pas être autonome, il est en quelque sorte sous la tutelle bienfaisante des gouvernements. La faiblesse des institutions internationales, dont Benoît XVI éreinte au passage l'opacité et le manque d'efficacité, invite à poser les problèmes de régulation non seulement en termes administratifs, comme on l'a fait jusqu'à maintenant, mais bien en termes politiques, en faisant appel à « quelques hommes droits » (n°71) qui poseront des limites aux ardeurs spéculatives, destructrices du « capital social ».

- Ne croyez-vous pas que l'urgence pour le pape aurait été plutôt de s'opposer aux violences commises un peu partout par des fondamentalistes (islamiques entre autres) au nom de la religion ?

- Le Vatican est évidemment au courant de tout, c'est une gigantesque centrale d'information. Encore dimanche 5 juillet dernier, (... Attentat devant une église aux Philipines ) le pape a demandé de prier pour les victimes d'un attentat qui avait été commis le matin même à Cotabato aux Philippines, où une explosion devant la cathédrale bondée a fait de nombreuses victimes. « Alors que je prie Dieu pour les victimes de ce geste ignoble, j'élève ma voix pour condamner une fois encore le recours à la violence qui n'est jamais une solution digne face aux problèmes existants. » Une fois encore ! Souvenez-vous du discours de Ratisbonne, en septembre 2006, qui n'hésitait pas à mettre en cause les dérives de la religion du prophète.
Aujourd'hui pareillement, le pape s'en prend « au terrorisme de nature fondamentaliste » (n°29) qui bloque le développement de certains espaces culturels dans le monde. C'est que pour lui il n'y a pas de développement vraiment humain sans le christianisme. On peut dire que c'est le message principal de cette encyclique.
...
Benoît XVI demande que l'on considère que sans la charité qui est la véritable évidence chrétienne et sans la vérité, que l'homme reçoit de Dieu et qu'il n'élabore pas par lui-même, il n'y aura pas d'universalité véritable et pas de mondialisation réussie. « Sans la charité dans la vérité, écrit-il, l'actuel élan planétaire où se réalise l'intrication de toutes les économies, risque de provoquer des dommages inconnus jusqu'ici ainsi que de nouvelles fractures dans la famille humaine » (n°33).

Propos recueillis par Jean-Marie Molitor

Mgr Mouïsse

Il s'agit d'une "tribune libre", parue dans le journal Sud-Ouest.
Parler du pape, maintenant, dans la grande presse, cela ne peut plus se faire qu'à travers des "tribunes libres".
Une démarche que n'importe quel responsable de site comprend, et sait qu'il peut pratiquer, pour éviter les risques de poursuites et de critiques (ou pire).
Façon de dire, pour l'éditeur: je ne partage pas ces idées, mais je les publie, au nom de la liberté d'expression.
Ne soyons pas dupes de cet artifice: quelle sera la prochaine étape, pour renvoyer la foi chrétienne dans la sphère privée, avant de la marginaliser définitivement?
A part cela, ce texte, dont je ne connais pas vraiment l'auteur, propose des pistes de réflexion pertinentes, et devrait donner vraiment l'envie de lire l'encyclique, aux lecteurs du journal.


Avez-vous lu l'encyclique ?
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Peut-être pas. C'est vrai que les grands médias audiovisuels en ont peu ou pas parlé... Au moment de sa parution, la mort de Michael Jackson et sa sépulture étaient évidemment bien plus importantes... Vous vous rendez compte, un pape qui, dans une lettre à tous les hommes de bonne volonté, ose parler de « l'amour dans la vérité », ça n'intéresse pas. Là, le pape n'intéresse pas. En effet, il n'y a pas de phrase qui pourrait faire polémique. Tout est vrai, juste, pertinent, interrogatif dans ce qu'il écrit... mais ça n'intéresse pas. Alors que ce que le pape développe est essentiel pour l'homme.

Quand il écrit : « L'ouverture à la vie est au centre du vrai développement », ça n'intéresse pas. Quand il écrit : « L'être humain est fait pour le don », ça n'intéresse pas. Quand il écrit : « La visée exclusive du profit risque de détruire la richesse et d'engendrer la pauvreté », ça n'intéresse pas. Quand il écrit : « Une redistribution planétaire des ressources énergétiques est nécessaire », ça n'intéresse pas. Quand il écrit : « Tout migrant est une personne humaine qui possède des droits fondamentaux inaliénables qui doivent être respectés par tous et en toute circonstance », ça n'intéresse pas. Quand il écrit : « La société actuelle doit réellement reconsidérer son style de vie », ça n'intéresse pas.

Et bien sûr, en pensant au vote de la loi sur le dimanche, on se garde bien de citer ce que dit Benoît XVI : « Une société du bien-être, matériellement développée, mais oppressive pour l'âme, n'est pas de soi orientée vers un développement authentique. Le développement doit comprendre une croissance spirituelle, et pas seulement matérielle. »

Et évidemment, on se gardera bien de citer cette phrase qui pour moi est essentielle : « Loin de Dieu l'homme est inquiet et fragile. » Voilà tout ce qu'on ne dit pas au grand public.

C'est vrai, dans une société comme la nôtre, le pape dérange..., alors on se tait ou on le critique. Et pourtant, aujourd'hui, des gens de plus en plus nombreux souffrent physiquement, moralement, économiquement. Les personnes sont en attente forte de sens, tout homme est en quête de bonheur (ndr: est-ce si éloigné du signe d'une recherche de Messori), de vérité, de justice, de paix, d'amour. Va-t-on étouffer une parole de vie qui propose pour aujourd'hui le développement « de l'homme, de tout homme, de tous les hommes » ? Ce n'est pas possible... ou alors, nous sommes tombés bien bas !

Une force, une lumière, un appel se dégagent de cette encyclique puisqu'on l'appelle comme ça. Elle a un titre : « L'amour dans la vérité » ! Rien que ces deux mots devraient nous accrocher. Au moins, essayons d'aller voir ce qu'ils recouvrent. Et nous découvrirons que « la doctrine sociale de l'Église éclaire d'une lumière qui ne change pas les problèmes toujours nouveaux qui surgissent », comme l'écrit Benoît XVI.

Que nous ayons la foi ou que nous soyons habités par le doute, nous percevrons vite dans cette lettre des chemins de vie et de lumière pour nous-même, notre société et le monde dans lequel nous sommes.

Personne ne trouvera dans ce texte l'image d'un pape « conservateur », comme beaucoup se plaisent injustement à le dire. Mais, au contraire, un pape ouvert à la vie et au bonheur de tous les hommes. Bien sûr, il n'a pas de solution à la crise économique que nous traversons, mais il lui donne une autre dimension.

Il est impossible de résumer ce texte dense mais qui n'est pas difficile à lire. Il me semble que ce que disait le cardinal Vingt-Trois, lors de la présentation de cette encyclique, peut nous donner encore plus envie de la lire : « Un homme n'est jamais seulement un consommateur, jamais seulement un producteur, jamais seulement un esthète, jamais seulement un mystique. Il est tout à la fois un être de relation et de production, de consommation et d'échange gratuit, un être socialisé et acculturé. Cette encyclique est donc un commentaire d'une loi fondamentale de la doctrine sociale de l'Église : "Pour tout l'homme et pour tous les hommes." »

Croyants ou non, voilà une lecture nourrissante pour le temps des vacances.

Mgr Michel MOUÏSSE

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