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Eloge de Benoît XVI, dans La Vie

Sollers, Tillinac et Kechichian, ont lu Jésus de Nazareth (17/3/2011)

L'hebdomadaire avait fait la couverture de son numéro daté du 10 mars sur Le Pape écrivain. Nous en avions parlé ici.
Certains articles sont en ligne (dont le "guide de lecture" préparé par Jean Mercier), d'autres pas.
J'ai attendu la sortie du numéro suivant - par correction - pour publier ces trois articles que j'ai scannés dans l'édition papier. J'espère que mes lecteurs - étrangers, en particulier - qui n'achètent pas ou ne connaissent pas La Vie, apprécieront ce "cadeau" - assez surprenant, si l'on connaît le journal, et (même un peu) un ou deux des intervenants.

Denis Tillinac (voir aussi: Dictionnaire amoureux du catholicisme):
Je jouis de sa dextérité conceptuelle et de sa poétique discrète
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Un écrivain rameute les fragments épars de sa subjectivité pour s'en faine un bouclier, un étendard ou un simili de forteresse. Autant dire: un exutoire d'infortune. Tandis que la foi de Benoit XVI, éclairant sa raison, ordonne son approche de la réalité et assigne une finalíté à l'acte d'écrire.
En soi la littérature ne vise aucun but, elle comble des manques à l'aveugle. Notre pape est un théologien, un dialecticien, un philologue incomparable ; peut-être pas un écrivain au sens où nous l'entendons communément depuis les romantiques.
Pourtant, en lisant la seconde partie de son Jésus, j'ai cru sentir, comme à la lecture de ses autres livres, de ses conférences (Bernardins, Ratisbonne, etc.,) et de ses catéchèses de mercredi matin sur les Pères de I'Église, un ton qui le distingue de tout autre auteur. Une musique même, celle de son esprit, pour ne pas dire de son âme - et je me souviens qu'il aime Mozart et le joue au piano. Sa façon de déambuler entre les Évangiles et l'Ancien Testament - surtout les Psaumes et les Prophètes - pour revenir au Christ en passant par saint Paul et profiler, en un trait de plume, le destin de 1'Église, témoigne à la fois d'un souci quasiment scientifique d'explorer le sens profond des Écritures, et d'une sensibilité très personnelle.
Si l'art de choisir le mot juste, de camper un décor historique et de convier le lecteur dans l'intimité d'une quête spirituelle qualifie l'écrivain, Benoit XVI en est un, et du meilleur aloi.
Comme tout le monde, j'ai lu les Évangiles, et je croyais en avoir à peu près compris le message. Or, son approche des derniers jours de Jésus sur la terre des hommes - son procès, sa mise en croix puis au tombeau, sa Résurrection - ont chamboulé mes vues (sommaires et confuses) sur la Passion et la vie éternelle. Parce qu'avec des mots simples, il a su me prêter son intelligenee spirituelle - et de ce bienfait, j'ai profité dans chacun de ses écrits. Sa prose serrée, précise, encore que tremblée par moments, ne relève pas du discours clérical; il sait comment pensent les athées, les agnostiques, les indécis.
Sa prodigieuse érudition n'est pas mobilisée pour occulter un débat mais pour explorer toutes les hypothèses. Certes, en son for la foi et la raison sont complices, ce à quoi on peut s'attendre d'un théologien marqué par saint Thomas d'Aquin. Dans sa critique des romans de Mauriac, Sartre opposait l'artiste au croyant, au nom d'une "liberté" incompatible selon lui avec la soumission au Créateur. Il avait tort, comme d'habitude. Benoit XVI est un artiste de la théologie et, en le lisant, outre ce que j'apprends, je jouis de sa dextérité conceptuelle et de sa poétique discrète. De son charisme, pour résumer. Peu importe qu'on le définisse ou pas comme un écrivain ; ses livres - dont le dernier en date - sont de loin ce que j'ai lu de plus enrichissant depuis belle lurette. Je crois qu'ils viennent à leur heure, pour vaincre ce désarroi nauséeux dans lequel nous pataugeons et qu'explicite son analyse du « relativisme » contemporain.
Décidément, le dernier conclave aura été bien inspiré par le Saint-Esprit : c'est ce pape qu'il nous fallait, hic et nunc. »

Philippe Soliers
«Il nous livre une expérience intérieure qui tient à sa foi»
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Ce deuxième volet de Jésus de Nazareth est une passionnante leçon de lecture. Une invitation à aller à l'essentiel en revenant dans le détail aux Écritures.
Pourquoi le Pape a-t-il jugé nécessaire de décrire la progression de Jésus-Christ vers la mort et la résurrection ? Sans doute parce que l'ignorance est considérable sur ce sujet, même parmi les catholiques. La résurrection est devenue un sujet gênant, refoulé, alors que sans cet événement la foi n'est rien.
Vous connaissez Jésus, vous ? Vous savez ce qu'il a fait ? Est-ce une faribole, une invention ou la vérité même ?
Benoìt XVI travaille énormément. C'est un grand lecteur qui a cité le Paradis de Dante à plusieurs reprises, une réfèrence peu courante pour un pape. La forme de ses écrits est d'une grande correction, toujours très informée. Il est au niveau du texte qu'il commente.
Ici, il revient aux Évangìles avec une grande rigueur, en prenant soin de relier ces épisodes à l'histoire hébraïque. Il suit le fil de cette histoire effrayante, ce roman policier parmi les plus extraordinaires qu'on ait écrits. Et nous sommes immergés dans le contexte politique, nous suivons l'apparition du traître, le procès, la Croix, la résurrection, l'affolement des femmes au tombeau, les apparitions du Christ que les disciples d'Emmaüs et les pécheurs ne reconnaissent pas...
Le Pape n'a pas à faire l'écrivain, mais à occuper le siège de Pierre. Il doit tenir compte de témoins réels, voir si cette histoire tient le coup sur le plan historico-salvifique. Sa leçon de lecture est vivante : Benoit XVI nous livre une expérience intérieure, qui tient à sa foi. Avec lui, nous entrons par l'intérieur dans cette affaire. C'est le contraire du cinéma, à l'opposé de tout spectacle. Le pape appelle à saisìr ces événements dans leur invisíbilité. Mais comme si nous y assistions et en étions coacteurs. Ça n'est pas une histoire ancienne que l'on commémorerait : ça se passe maintenant, à chaque instant.

Patrick Kéchichian (ex du Monde!)
"Je suis frappé par la clarté du style la vígueur et la rigueur de l'argumentation"
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J'ai lu plusieurs ouvrages de Joseph Ratzinger avant qu'il devienne Benoît XVI, puis ses trois encycliques, puis différents discours, enfin le premier volume de son Jésus de Nazareth. Je viens de commencer le deuxième, avec le même intérêt, la même admiration. De ces lectures, j'ai tiré un grand profit. J'ai été frappé, à chaque fois, par l'intelligente du propos, la clarté du style, la vigueur et la rigueur de l'argumentation. Mais à aucun moment je n'ai pensé que c'était de la littérature.
La vocation des livres et discours du pape est l'enseignement, ou ce qu'on n'ose plus nommer "l'édification". Lisant, je progresse dans ma foi. Grâce à ces paroles, j'ai le sentiment de mieux comprendre, de mieux entendre, la parole première, celle des Saintes Écritures. Le rôle de l'Église, et donc de son chef, est d'apporter, à tous les chrétiens à égalité, cette nourriture spirituelle qui leur permet de grandir, de se développer. Et la littérature, me direz-vous ? Elle ne peut être, en tant que telle, le souci du Saint-Père. La littérature consiste (pour le dire vite) à donner voix à sa propre subjectivité. C'est tendre à la beauté de la forme et du contenu, à leur harmonie supérieure, comme dans tous les arts. C'est parler, écrire, en son propre nom. Enfin, c'est chercher une écoute, solliciter une lecture.
Illustrons notre propos : il est impossible de mettre sur le même plan les épitres de saint Paul, admirables par la puissance de leur souffle mis au service d'une Église en construction, et une grande oeuvre chrétienne, comme celle de Claudel, par exemple. De ce second côté, vous avez le génie littéraire d'un remarquable écrivain habité, irradié par sa foi, de l'autre, la parole fondatrice et universelle d'un saint apôtre dont l'ambition est de s'effacer devant un objet qui l'excède de toute part.
La parole et les écrits du pape, comme de tous les grands théologiens, s'inscrivent bien évidemment, avec toute l'humilité nécessaire, de ce côté, qui n'est donc pas celui de la littérature. Ainsi, de la vie de Jésus, Benoît XVI n'a pas fait un roman : ce qui aurait été grotesque et surtout hors de propos.
Un dernier point. S'il arrive au pape de dire "je", ce n'est pas pour faire étalage de sa propre personne ou de ses états d'âme. Ce point le distingue radicalement et définitivement d'un certain type d'écrivains narcissiques et imbus d'eux-mèmes, qui se rêvent prophètes - y compris de malheur, comme Céline (...) - dans leur pays: la République des lettres, cette principauté d'opérette.

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