Magnifique interviewe du Cardinal Cottier, dans l'Avvenire, après le Consistoire. Dans l'agitation de l'Eglise, ces derniers jours, il voit la "patte" du Malin (21/12/2012)
Cottier: Benoît XVI est le pilier qui soutient
(http://www.avvenire.it/)
Salvatore Mazza
--------------
Une grande fête de l'Église. Un moment «de joie» dans lequel «l'Église s'est serrée autour de lui» pour lui manifester « sa propre affection».
«Dans les grandes perplexités de notre temps, il est le pilier qui soutient. Il le fait avec simplicité, sans bruit».
Le Cardinal Georges Cottier, 90 ans en Avril, pendant près de vingt ans théologien de la Maison pontificale, raconte les quatre jours du quatrième consistoire de Benoît XVI. Qui ont confirmé, dit-il, avec un œil - désenchanté - tourné vers les polémiques de ces dernières semaines, combien « son principal souci est que les chrétiens reviennent aux questions centrales de la foi».
* * *
- Comment avez-vous vu le Pape, durant ces jours?
- J'ai été frappé par sa sérénité. Certes, il souffre de toutes les choses qui ont été dites par les médias ces jours-ci, mais le fond de son âme est serein. C'est la force de l'Esprit Saint qui guide sa vie. C'est sa foi. La vocation spécifique de Pierre est de soutenir la foi des autres. Voilà, dans toutes les difficultés, dans toutes les grandes perplexités, il est le pilier qui soutient. Il peut sembler un peu fatigué, mais ces jours-ci, il a fait une magnifique synthèse de ce que doit être l'attitude des croyants, ne jamais chercher le pouvoir, mais le service, jusqu'au martyre si nécessaire, en suivant l'exemple de Jésus. L'opinion publique superficielle s'intéresse à certaines choses, mais l'intérêt de l'Eglise qui professe sa foi en Jésus en est une autre. Et il est très beau, le témoignage de cet homme humble, simple, modeste, qui a cette force spirituelle si intense, capable de transmettre la paix.
- En somme, on peut dire que, pour lui, c'est une façon d'aller «au-delà».
- Oui, certainement. Il laisse passer ces «vagues» qui voudraient secouer l'Église, ce grand bouillonnement des eaux, parce qu'il sait que le mouvement de fond va au-delà. Il m'est arrivé ces derniers jours de réfléchir à tout cela, et précisément durant les jours du Consistoire, en en discutant avec d'autres confrères, j'ai trouvé que je n'étais pas le seul à avoir une certaine pensée. Qui est celle-là: dans toute cette agitation autour de l'Église, on peut voir l'oeuvre du Malin en action. En ce sens que si l'Église était assoupie dans la médiocrité, ou occupée uniquement par l'intrigue, la rivalité, le diable n'aurait pas beaucoup à faire. Mais s'il agite les eaux très fort, cela signifie qu'il y a de la vitalité de l'Eglise, que le malin veut s'y opposer. Et cette vitalité est la force de la foi, c'est la vie chrétienne qui se manifeste à travers le monde.
- Où voit-on cette vitalité?
- Il y a quelque temps, un confrère, qui voyage beaucoup, me parlait de la façon dont dans le monde, les jeunes ont en quelque sorte réinventé le sens de l'adoration eucharistique. Voilà, ils sont vraiment des signes d'une grande vitalité, c'est là qu'est la réalité de l'Eglise: une réalité qui ne doit pas être obscurcie par les péchés des chrétiens. Et c'est cela, au fond, le mystère de l'Eglise qui est sainte et qui a des membres qui sont pécheurs, mais sont appelés à devenir des saints. Donc, si c'est à cela que nous sommes tous appelés, à la sainteté, alors nous sommes aussi appelés à témoigner, à avoir une vie cohérente avec ce que nous professons. Le Pape, ces derniers jours encore, a cité les paroles de Paul VI, qui disait que notre temps est plus sensible aux témoins qu'aux maîtres, et encore plus aux maîtres qui sont aussi des témoins. Voilà, ce devrait être le programme de nous tous. De tous les chrétiens, mais certainement encore plus de ceux qui ont des responsabilités particulières.
- Quel exemple nous donne Benoît XVI?
- Un immense exemple, tous les jours. Il a 85 ans, comme je le disais avant, il semble parfois fatigué, et c'est tout à fait normal; les faux romans qu'on a entendu tourner, y compris à ce sujet, lui font certainement mal ... Mais nous voyons comment, à son âge, il peut faire des choses extraordinaires: nous l'avons vu à Madrid ou en Allemagne, où il nous a rappelé que les structures les plus belles, si elles sont vides de foi, sont sans valeur. Nous l'avons vu quand il est allé en visite à Rebibbia. Et bientôt, il ira aller au Mexique et à Cuba. Ses catéchèses du mercredi sont extraordinaires. Voilà, ce sont ces choses que nous devons regarder. Qu'il agit toujours selon ce principe que le problème fondamental, en particulier en Europe et en Occident est la nécessité de ré-évangélisation, en raison de la perte de la foi. C'est cela, la ligne de force de son pontificat, l'invitation à re-regarder l'amour de Jésus, l'Eucharistie, les thèmes centraux de la foi chrétienne. C'est de cela que le Pape parle, parce c'est cela qui concerne le monde.
* * *
Note biographique (Wikipedia)
Georges Marie Martin Cottier, né le 25 avril 1922 à Carouge, est un cardinal suisse, prêtre dominicain et théologien.
Il fait profession religieuse dans l'ordre dominicain en 1945. Il enseigne dans les universités de Genève et Fribourg et est l'auteur de plusieurs ouvrages sur les sujets théologiques.
..
Créé cardinal, non électeur, par Jean-Paul II lors du consistoire du 21 octobre 2003, il fut théologien de la maison pontificale et secrétaire général de la commission théologique internationale.
En 2007, sa biographie a été publiée sous le titre Itinéraire d'un croyant.
Le 11 décembre 2011, il préside à l'ordination épiscopale de Charles Morerod comme évêque de Lausanne, Genève et Fribourg