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Don Giussiani est le fondateur de Communion et Libération. C'est le cardinal Ratzinger qui avait prononcé l'homélie de ses obsèques, le 24 février 2005. (26/2/2012).


Le président de la Fraternité Communion et Libération, don Julian Carrón, a déposé auprès du diocèse de Milan une demande d’ouverture de la cause de don Luigi Giussani.
Don Giussani, fondateur de CL, est en effet décédé il y a 7 ans. Le P. Carrón a présenté sa demande, mercredi 22 février, à l’archevêque de Milan, le cardinal Angelo Scola, à l’issue de la messe célébrée en mémoire du fondateur, en la cathédrale de Milan.
La postulatrice de la cause sera Chiara Minelli, professeur de droit canon et ecclésiastique à l’université de Brescia, indique un communiqué de la Fraternité.
(information à lire en entier sur Zenit)

La nouvelle m'intéresse à plusieurs titres... notamment à cause du patronyme de la postulatrice, qui est aussi le mien.

L'homélie du cardinal Ratzinger pour les funérailles de don Giussiani est (je n'en suis pas sûre) sa dernière intervention publique avant d'être élu Pape.
J'avais traduit ici un compte-rendu (enthousiaste, et enthousiasmant) à relire absolument: Papa Ratzinger, grâce à Dieu (1)

Relisons aussi l'homélie du cardinal, prononcée entièrement a braccio. Fabuleuse, surtout si l'on regarde (et surtout entend) en même temps la video de la RAI, sur le site de CL, commentée par le défunt Giuseppe de Carli (vers 45'50"): http://it.clonline.org/

     


Chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,

"Les disciples se réjouirent en voyant Jésus". Ces paroles de l'Evangile qui viennent d'être lues nous montrent le coeur de la personnalité et de la vie de notre cher don Giussani.

Don Giussani avait grandi dans une maison - comme il le disait lui-même - pauvre de pain, mais riche de musique; et ainsi, dès le début, il fut touché, et même blessé, par le désir de la beauté; il ne se contentait pas d'une beauté quelconque, d'une beauté banale: il recherchait la Beauté elle-même, la Beauté infinie; c'est ainsi qu'il a trouvé le Christ, qu'il a trouvé dans le Christ la beauté véritable, le chemin de sa vie, la joie véritable.

Dans sa jeunesse, il avait déjà créé une communauté qui s'appelait Studium Christi. Son programme était de ne parler que du Christ, car tout le reste apparaissait comme une perte de temps. Naturellement, il sut ensuite surmonter l'unilatéralité, mais la substance est toujours restée. Seul le Christ donne un sens à tout dans notre vie; dom Giussani a toujours gardé le regard de sa vie et de son coeur tourné vers le Christ. Il a ainsi compris que le christianisme n'est pas un système intellectuel, un ensemble de dogmes, un moralisme, mais que le christianisme est une rencontre; une histoire d'amour; qu'il est un avertissement.

Cet amour pour le Christ, cette histoire d'amour qui fut toute sa vie, était cependant loin de tout enthousiasme superficiel, de tout romantisme vague. En voyant le Christ, réellement, il sut que rencontrer le Christ signifie suivre le Christ; cette rencontre est une voie, un chemin; un chemin qui traverse également - comme nous l'avons entendu dans le Psaume - la "sombre vallée". Dans l'Evangile, nous avons précisément ressenti l'obscurité ultime de la souffrance du Christ, de l'absence apparente de Dieu, de l'éclipse du Soleil du monde. Il savait que le suivre signifie traverser une "sombre vallée"; avancer sur le chemin de la croix, et toutefois vivre dans la joie véritable.

Pourquoi en est-il ainsi? Le Seigneur lui-même a traduit ce mystère de la croix, qui est en réalité le mystère de l'amour, par une formule dans laquelle s'exprime toute la réalité de notre vie. Le Seigneur dit: "Qui cherche sa vie la perdra et qui perd sa propre vie la trouvera".

Don Giussani voulait réellement ne pas garder sa vie pour lui, et il a donné sa vie; c'est précisément ainsi qu'il a trouvé la vie non seulement pour lui, mais aussi pour tant d'autres. Il a réalisé ce que nous avons entendu dans l'Evangile: il ne voulait pas être un maître, il voulait servir, il était un fidèle "serviteur de l'Evangile", il a distribué toute la richesse de son coeur, il a distribué la richesse divine de l'Evangile, dont il était imprégné et, servant ainsi, en donnant la vie, celle-ci a porté des fruits abondants - comme nous le voyons en ce moment - . Il est réellement devenu le père d'une multitude, ayant guidé toutes ces personnes, non pas vers lui, mais vers le Christ, il a vraiment gagné les coeurs, et contribué à améliorer le monde, à ouvrir les portes du monde pour le ciel.

Ce caractère central du Christ dans sa vie lui a également donné le don du discernement, le don de déchiffrer de la meilleure manière les signes des temps à une époque difficile, pleine de tentations et d'erreurs, comme nous le savons.

Nous pensons aux années 68 et à celles qui suivirent: l'un de ses premiers groupes s'était rendu au Brésil et se trouva là face à la pauvreté extrême, à la misère. Que faire? Comment répondre? Et grande fut la tentation de dire: pour le moment, nous devons faire abstraction du Christ, faire abstraction de Dieu, car il y a des urgences plus pressantes; nous devons tout d'abord commencer à changer les structures, les choses extérieures, nous devons tout d'abord améliorer la terre, puis nous pourrons également retrouver le ciel. La grande tentation de cette époque était de transformer le christianisme en un moralisme, le moralisme d'une politique, de remplacer le fait de croire par l'action. Car que comporte le fait de croire? On peut dire: en ce moment, nous devons faire quelque chose. Toutefois, à ce rythme, en remplaçant la foi par le moralisme, le fait de croire par l'action, on tombe dans les particularismes, on perd surtout les critères et les orientations, et pour finir, on ne construit pas, mais on divise.

Monseigneur Giussani, avec sa foi inébranlable et inaltérable, a su que dans cette situation aussi, le Christ et la rencontre avec Lui doit demeurer, car celui qui ne donne pas Dieu, donne trop peu et celui qui ne donne pas Dieu, qui ne permet pas de trouver Dieu dans le visage du Christ, ne construit pas mais détruit, car il laisse l'action humaine se perdre dans des dogmatismes idéologiques et erronés. Don Giussani a conservé le caractère central du Christ et c'est précisément ainsi qu'il a apporté son aide à l'humanité à travers les oeuvres sociales, à travers le service nécessaire dans ce monde difficile, où la responsabilité des chrétiens à l'égard des pauvres du monde est très grande et urgente.

Celui qui croit doit également traverser la "sombre vallée", les vallées obscures du discernement, et aussi des difficultés, des oppositions, des contrariétés idéologiques, qui arrivent jusqu'aux menaces d'éliminer les siens physiquement pour se libérer de cette autre voix qui ne se contente pas d'agir, mais qui apporte un message plus grand, et ainsi une plus grande lumière.

Avec la force de la foi, Monseigneur Giussani a traversé, tout en restant inébranlable, ces sombres vallées; cependant, en raison de la nouveauté qu'il apportait, il connut également la difficulté de se situer au sein de l'Eglise. Lors-que l'Esprit Saint, selon les besoins des temps, crée la nouveauté, qui est en réalité un retour aux origines, il est difficile de s'orienter et de trouver l'ensemble pacifique de la grande communion de l'Eglise universelle. L'amour de dom Giussani pour le Christ était également un amour pour l'Eglise, c'est pourquoi il est toujours resté un fidèle serviteur, fidèle au Saint-Père, fidèle à ses Evêques.

Avec ses fondations, il a aussi interprété à nouveau le mystère de l'Eglise.

"Communion et Libération" nous fait immédiatement penser à cette découverte propre à l'époque moderne, la liberté, et nous fait également penser à la parole de saint Ambroise "Ubi fides est libertas".
Le Cardinal Biffi a attiré notre attention sur la grande similitude de cette parole de saint Ambroise avec la fondation de "Communion et Libération". Mettant ainsi en évidence la liberté comme don propre à la foi, il nous a également dit que la liberté, pour être une véritable liberté humaine, une liberté dans la vérité, a besoin de la communion. Une liberté isolée, une liberté ne concernant que le Moi, serait un mensonge et pourrait détruire la communion humaine. Pour être véritable, et donc pour être également efficace, la liberté a besoin de la communion, et pas de n'importe quelle communion, mais de façon ultime de la communion avec la vérité elle-même, avec l'amour même, avec le Christ, avec le Dieu trinitaire. C'est ainsi que se construit la communauté qui crée la liberté et qui donne la joie.

L'autre fondation, les Memores Domini, (ndt: ce sont des memores domini qui constituent la "famille" du Pape, et ce n'est sûrement pas un hasard) nous fait à nouveau penser au second Evangile d'aujourd'hui: la mémoire que le Seigneur nous a donnée dans la Sainte Eucharistie, mémoire qui n'est pas seulement un souvenir du passé, mais une mémoire qui crée le présent, mémoire dans laquelle Il se donne lui-même entre nos mains et dans nos coeurs, nous faisant ainsi vivre.

Traverser les sombres vallées. Lors de la dernière étape de sa vie, dom Giussani a dû traverser la sombre vallée de la maladie, de l'infirmité, de la douleur, de la souffrance; mais là aussi, son regard était tourné vers Jésus, et il resta ainsi tel qu'il était tout au long de sa souffrance. En voyant Jésus, il pouvait se réjouir, la joie du Ressuscité était présente, Lui qui, même au cours de sa passion, reste le Ressuscité et nous donne la lumière véritable et la joie; dom Giussani savait que - comme le dit le Psaume - même en traversant cette vallée, "je ne crains aucun mal car je sais que Tu es avec moi et que j'habiterai dans la maison du Père". Telle était sa grande force: savoir que "Tu es avec moi".

Mes chers fidèles, chers jeunes en particulier, ayons ce message à coeur, ne perdons pas de vue le Christ et n'oublions pas que sans Dieu, on ne construit rien de bon et que Dieu reste énigmatique s'il n'est pas reconnu dans le visage du Christ.

Votre cher ami, dom Giussani, a maintenant rejoint la rive de la Vie et nous sommes convaincus que la porte de la maison du Père s'est ouverte. Nous sommes convaincus que, maintenant, cette parole se réalise pleinement: "en voyant Jésus ils se réjouirent", il se réjouit avec une joie que personne ne peut lui ôter. En ce moment, nous voulons rendre grâce au Seigneur pour le grand don de ce prêtre, de ce fidèle serviteur de l'Evangile, de ce père. Nous confions son âme à la bonté de son Seigneur, de notre Seigneur.

En cette heure, nous voulons également prier de manière particulière pour la santé de notre Saint-Père, à nouveau hospitalisé. Que le Seigneur l'accompagne, lui donne force et santé. Et nous prions pour que le Seigneur nous illumine, nous donne la foi qui édifie le monde, la foi qui nous fait trouver la route de la vie, la joie véritable.

Amen!

Papa Ratzinger, grâce à Dieu (1)


Sara Fumagalli
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C'était le 24 Février.

Le Dôme de Milan débordait de monde, et la place grise de pluie et de vent, s'étiolant sous les panneaux qui en recouvraient la façade, mais illuminée par notre Bela Madunina, était archi-comble.

A l'intérieur de notre Temple, en toile de fond à l'imposante et magnifique nef soutenue par de puissants piliers en pierre, une tache étendue de silhouettes blanches et violettes assises derrière l'autel.

Devant, au centre, gisait le simple cercueil de Don Giussani, père et âme bonne du grand mouvement Communion et Libération, ayant rayonné de la Lombardie dans le monde entier.

Assis dans un pompeux fauteuil, dans le coin, le Cardinal à la tête du diocèse ambrosien (ndt: Dionigio Tettamanzi, successeur lui aussi progressiste du cardinal Martini, et ex-futur "papabile" des medias), le plus important du monde, observant en regardant par en-dessous tous ces fidèles Lombards, parmi lesquels beaucoup de jeunes avec le chapelet à la main. Derrière lui, on croyait voir surgir l'ombre énigmatique du cardinal émerite dont on s'apprêtait à lire le message de circonstance.

Mais là-haut, sur la chaire accrochée à un pilier, où ma génération n'a pas été habitué à regarder, là-haut était tournés les yeux et l'attention de tous les fidèles.

Tout là-haut, debout, le cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, sans lire son texte, répandait, comme quelqu'un qui dispose de l'autorité, les paroles de l'Esprit et de la vie.

Il parlait et c'était comme un miracle, car il parvenait à exprimer un son très doux, en dépit de son accent aussi gothique que la cathédrale.

Il parlait du Christ, avant tout, et de son "infinie beauté"; du christianisme "qui n'est pas un système intellectuel, un ensemble de dogmes, un moralisme", mais "une rencontre, une histoire d'amour, un événement"; de la nécessité de préserver la centralité du Christ contre "la grande tentation - et les années 68 et suivantes - de transformer le christianisme en moralisme, et le moralisme en politique, de substituer le faire au croire ... et, citant en particulier le cardinal Biffi (!), il parlait de "liberté" , avec les paroles de saint Ambroise "Ubi fides est Libertas".

S'adressant à ses "chers fidèles" et "chers jeunes en particulier", il parlait en substance de la foi. Mais en réalité, il ne parlait pas: il témoignait, émanait littéralement la foi.

Ce n'était pas un discours, mais un événement métaphysique.
...
L'article en entier est à lire ici: benoit-et-moi.fr/2010-I/