La nouvelle colonisation...

elle concerne la nature humaine. C'est le titre du IVe rapport sur la doctrine sociale de l'Eglise dans le monde, publié par «L'Observatoire Van Thuân». Un article du site Korazym.org, à lire absolument avant la grande manifestation du 13 janvier. (10/1/2013)

>>> Image ci-contre: vers le site de L'Osservatorio Van Thûan

L'article s'adresse avant tout à ceux qui croit que les réformes sociétales du gouvernement ne sont que des mesures "cosmétiques" destinées à camoufler son échec dans le domaine économique et social.

>>> Ici, une interviewe du président de l'Observatoire, l'archevêque Giampaolo Crepaldi: kairosterzomillennio.blogspot.fr (l'article ci-dessous en reprend l'essentiel)

Sur ce site, (re)lire:
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¤ Principes non négociables (benoit-et-moi.fr/2013-I)
¤ Le véritable enjeu du "mariage pour tous (benoit-et-moi.fr/2012(III))
¤ Non à la manipulation de la vie humaine - Joseph Ratzinger (benoit-et-moi.fr/2012(III))
¤ Mariage homo ou mariage pour tous (benoit-et-moi.fr/2012(III))
¤ Plusieurs articles sur l'Observatoire Van Thûan: http://tinyurl.com/athnmkq

et bien sûr:

¤ Le discours du Saint-Père devant le Bundestag le 22 septembre 2011 (www.vatican.va )
¤ Ses voeux à la Curie Romaine du 21 décembre 2012 (www.vatican.va)

     

La nouvelle colonisation? Elle concerne la nature humaine
Andrea Gagliarducci
7 Janvier 2013
http://www.korazym.org
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Le discours de l'année (au sens large!)? Celui que Benoît XVI a prononcé au Bundestag à Berlin en Septembre 2011. Dans ce discours, le Pape a souligné d'emblée que son intention était de ramener Dieu au centre du débat juridique, comme dans la société. Et ceux qui pensent que le débat juridique influe peu sur la société devraient lire le IVe rapport sur la doctrine sociale de l'Eglise dans le monde, publié par «L'Observatoire Van Thuân» , dont le titre est «La colonisation de la nature humaine».

Parce que, parmi les nombreux traits qui menacent la Doctrine sociale de l'Église dans le monde, celui qui apparaît le plus urgent concerne précisément l'énorme pression internationale sur les gouvernements pour modifier leurs lois traditionnelles sur la fécondité, sur la famille et sur la vie.
Le discours du pape au Bundestag est une pierre milliaire, car il met l'accent sur la loi morale naturelle, sans laquelle les États deviennent une «bande de brigands», comme l'écrivait saint Augustin. Et l'exemple pratique a été donnée par l'expérience des Allemands. «Nous - a dit le Pape - nous avons expérimenté la séparation du pouvoir d'avec le droit, le pouvoir s'opposant au droit, piètinant le droit, de sorte que l'Etat est devenu l'instrument de la destruction du droit - était devenu une bande de brigands très bien organisée, qui pouvait menacer le monde entier et le pousser au bord du précipice. Servir le droit et combattre la domination de l'injustice est et demeure la tâche fondamentale du politicien. À un moment de l'histoire où l'homme a acquis un pouvoir inconcevable auparavant, cette tâche devient particulièrement urgente. L'homme est capable de détruire le monde. Il peut se manipuler lui-même. Il peut, pour ainsi dire, créer des êtres humains et exclure d'autres êtres humains d'être des hommes».

Ce sont des mots qui racontent, au fond, toute la situation décrite dans le Rapport. La colonisation de la nature humaine est considérée par les auteurs comme «le fait nouveau concernant la Doctrine sociale de l'Eglise» et qui «impose de reconsidérer les stratégies culturelles et politiques qui s'inspirent d'elle au niveau mondial». Certes, il y a eu dans l'année en cours des crises graves liés à la pauvreté et à l'exploitation. Mais celles-ci ne sont pas nouvelles, ni «peut-être un dommage comparable à la colonisation de la nature humaine».
Un phénomène qui jouit d'une bonne presse - les ressources qui y sont utilisées sont considérables - bien qu'il ait «un caractère subversif des liens sociaux, de fragmentation fonctionnelle des relations,d'accentuation de l'individualisme désincarné».

Il s'agit - dira-t-on - uniquement de cosmétique. D'un changement des termes dans une loi. Qu'est-ce qui peut changer au niveau social? Mais, en changeant les mots, tout change. L'exemple le plus frappant, on l'a vu à l'ONU, où une résolution à la fin de cette année a inclus, de manière sournoise, l'ouverture au droit à l'avortement. Mais le mot avortement n'est jamais dit explicitement dans la résolution.On parle plutôt de «droit à la santé reproductive».

L'ONU et l'Union européenne sont parmi les principaux contributeurs financiers à cette «idéologie de la santé reproductive». Et la façon dont ils ont changé à coups de «cosmétique» leur orientation, passant de «en faveur de l'être humain» à «en faveur des droits individuels» a été raconté il y a quelques années dans un livre, «Contre le christianisme. Les Nations Unies et l'Union européenne comme nouvelle idéologie» par Eugenia Roccella et Lucetta Scaraffia (Contro il Cristianesimo).
Par rapport à 2005 (année de publication du livre), les choses sont encore pires. «L'Occident - a affirmé Mgr Giampaolo Crepaldi, président de l'Observatoire international Cardinal Van Thuan - une fois colonisé au sens classique du terme, est maintenant colonisé culturellement, proposant une mentalité contraire à la loi morale naturelle et faisant pression pour que les Etats encore "arriérés" entrent enfin dans le "progrès" ».

Un exemple frappant? L'Argentine.
En 2011, a été adoptée une loi sur la procréation artificielle, qui a "dé-naturalisé" la procréation, une loi sur la reconnaissance de «l'identité de genre» et un amendement au Code civil afin d'autoriser la location d'utérus (les mères porteuses, ou GPA, dans la novlangue destinée à camoufler les réalités). Certaines lois ont été votées en 2012, mais ont été discutés et élaborés en 2011, tandis que d'autres sont encore à l'étude par une branche du Parlement après avoir été approuvées par l'autre. Mais - dit le rapport - «la tendance est claire. Dans une seule année le fondement de l'ensemble de la société en Argentine a été révolutionné, la notion de «nature humaine» a été mise de côté et l'inspiration de la foi catholique pour la construction de la société a été placée dans un coin».
Un autre exemple est celui des Philippines, où l'Eglise locale mène une dure bataille contre la loi sur la contraception, le Reproductive Health Bill adopté récemment qui - tel qu'il a été rédigé - est clairement le début d'une nouvelle approche post-naturelle de la notion de famille et d'être humain.

La nature humaine est colonisée par les lois et par la cosmétique, c'est vrai. Mais elle est colonisée aussi par les idéologies. Comme l'idéologie du genre, véritable problème de notre temps, au point que Benoît XVI lui-même l'a explicitement citée et critiquée dans son discours de vœux à la Curie romaine cette année. Répandue dans le monde occidental, sans beaucoup d'opposition, l'idéologie du genre est désormais exportée aussi dans les pays émergents (1).

Il s'agit - lit-on dans l'introduction du rapport - d'«une idéologie subtile et omniprésente» qui «se réclame des "droits individuels", dont l'Occident a fait son propre dogme, et d'une égalité présumée entre individus asexués, à savoir abstraits, pour conduire à une déconstruction de l'ensemble du système social». Le résultat est un incroyable renversement des valeurs. Le rapport dit: «Si ce n'est pas le sexe, comme fait anthropologique global, mais la sexualité comme comportement, qui est à l'origine des relations sociales, alors celles-ci ne nous sont pas "données", mais ce sont des "choix" ». Il est facile d'arriver à la «discrimination de l'hétérosexualité, c'est-à-dire la différenciation sexuelle, et à l'imposition culturelle de la transsexualité, c'est-à-dire l'indifférenciation sexuelle. Il s'agirait de la domination absolue de la technologie sur les relations humaines. La technique a rendu possible l'émancipation de la culture de la nature, et a ainsi permis d'être mère sans être femme, d'être père sans être un homme, d'être un homme tout en étant une femme, d'être une femme tout en étant un homme,d' être père ou mère sans savoir de qui et être un fils sans savoir de quel père ou de quelle mère. La technique rend possible la sexualité privée de nature, donc comme un exercice purement technique par un être dépourvu d'identité. Dans la société avance non pas l'absolutisation du sexe, mais de la sexualité et la mise à l'écart du sexe, dont l'Eglise catholiqueest presquer la seule à parler encore».
Ainsi, «dans tous les Etats où les couples de fait (coppie di fatto) ou les unions homosexuelles sont reconnus, suit inévitablement la réforme du droit de la famille, de la fiscalité, des buts et des méthodes des structures éducatives.
L'impossibilité de condamner moralement l'homosexualité pour ne pas risquer d'être accusés d'homophobie compromet la libre expression des idées, l'éducation des enfants, la difficulté de proposer publiquement le modèle de la famille hétérosexuelle. Les «nouvelles familles» sont promues par les médias, sans possibilité de contradiction, car il s'agit d'une unique pensée dominante».

La dénonciation du rapport est très dur.
Si la vielle colonisation «parmi beaucoup d'aspects négatifs en avait aussi d'héroïques, et était motivée par le désir d'exporter quelque chose de significatif», cette nouvelle colonisation est au contraire «l'exportation du néant». Une exportation du néant qui est aussi une attaque directe contre l'Église catholique, la religion la plus persécutée au monde, à la fois si on se penche sur le nombre des martyrs qui chaque année augmente et si l'on considère les attaques à la doctrine sociale de l'Eglise. Parce que - lit-on dans le rapport - «en abolissant par la loi la famille naturelle, on empêche l'expérience de la famille. Aujourd'hui, l'expérience de la famille a une fonction sociale, car elle est l'apprentissage fondamental de la vie en société, mais aussi une fonction religieuse, puisque tout le lexique de la vie chrétienne tourne autour de la «famille», et ceux qui ne savent pas ce que signifie Père, Mère, Fils, époux, épouse, ne peuvent pas comprendre la révélation chrétienne.
Ne pas faire l'expérience de la famille naturelle détruit la société et surtout détruit l'Eglise. En Argentine, comme dans beaucoup d'autres pays, on veut que le christianisme disparaisse, le privant des conditions naturelles pour être connus et compris».

Mais l'avenir de la foi chrétienne dépend du maintien de la dimension naturelle, dans la procréation et dans la famille. Mais en réalité, - disent les rédacteurs du rapport - «c'est la réciproque qui est vraie: c'est l'avenir de la dimension naturelle du bien humain qui dépend de la foi chrétienne. Quand les hommes se détournent du Christ, ils perdent aussi de vue leur bien véritable sur le plan naturel».
C'est pourquoi le Magistère de Benoît XVI est tout centré sur le retour de l'homme à Dieu. Un magistère incessant, et malheureusement parfois caché par les médias. Qui sont (presque) tous orientés vers la colonisation de la nature humaine.

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Note

(1) Le site de L'Osservatorio a consacré un article au discours à la Curie Romaine (ici).

Il commence en ces termes:

L'idéologie du genre: une bombe culturelle à haute potentialité destructrice

Benoît XVI nous a habitués à des discours de haut niveau lors de ses rencontres avec la Curie Romaine pour la présentation des vœux de Noël. C'est arrivé à nouveau cette année. Le 21 Décembre, il a approfondi deux questions de grande importance: la famille et le dialogue entre les religions. Nous nous occupons dans cette page du premier argument. Qui sait si les catholiques engagés dans la politique ont lu ce discours du Pape...