Vu de France (VI)

L'hommage de Mgr François Blondel dans son homélie de la messe (du 3e dimanche de carême) qu’il a célébrée à la cathédrale de Viviers (7/3/2013)

(grâce à Riposte Catholique)

>>> Image ici (avec le témoignage de l'Evêque de Viviers, reçu récemment en visite ad limina)

     
     


« Si nous sommes là cet après-midi, si nous sommes venus dans la Cathédrale, c’est parce qu’il ne nous suffit pas de lire les journaux en papier glacé, d’écouter la radio, et de jouer aux pronostics sur l’élection du successeur de Benoît XVI.
Le moment que nous vivons est pour nous un évènement d’Eglise, avec la profondeur que prend dans la foi le mot « évènement ». Evènement d’Eglise, c’est-à-dire de rassemblement, de prière ensemble, de reprise de notre vocation, de notre cap. Et le ministère du Pape nous en fait bien signe, ministère du Pasteur, Serviteur de l’unité; ministère du Pasteur qui redit que nous sommes un Corps, sauvés par le Christ, marqués du baptême, témoins pour la société. Cet après-midi, nous prenons tout simplement notre place dans ce Corps avec simplicité, avec aussi une certaine exigence

« Ne soyez pas paresseux dans votre foi ». Soyons des artisans d’unité fraternelle, ce qui nous demande de sortir de nous-mêmes. Nous sommes heureux d’être là, nous ne sommes ni inquiets, ni tendus, ni crispés. L’Eglise est un Corps Vivant, fragile certes, mais ayant sa mission dans l’aujourd’hui du monde. C’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le moment du Salut. D’une certaine manière la grande histoire que nous rappelle la figure de Moïse se continue. Le Pape a été aussi un visionnaire du Buisson ardent. Il a été un envoyé pour dire la Bonne Nouvelle du Salut à un peuple dont Dieu voit la misère et pour le guider avec en main le bâton pastoral. Et vous avez là une des clés des quelques années où le Seigneur nous l’a donné : le lien intime réciproque entre la foi, la prière et l’action, la charité, la justice que nous rappelle encore le message de Carême cette année. Ceci parce que Dieu est Amour, c’est le titre de sa première encyclique. Et puis, parce que « à l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un évènement, une personne qui donne à la vie un nouvel horizon et prend là une orientation décisive ».

Laissons-nous fasciner par Jésus Christ, ouvrons la porte de la foi, partageons entre nous la Parole de Dieu, soyons dans sa diaconie, son service et son Amour.
Le Pape ne serait pas content de moi si dans mon homélie je ne me tournais pas avec vous vers cette parole telle qu’elle nous est dite aujourd’hui dans ce 3ème dimanche de Carême. Jésus est dans l’actualité, voilà une prise d’otage, voilà le massacre de ceux que l’on considère comme une secte, voilà une tour qui s’effondre sur les habitants. Une actualité qui est lourde, de violence, de peine, et il faut bien le voir. Une actualité où l’on peine, et il y a bien peu de fécondité, les figuiers sont souvent stériles, de toute façon ce ne sont pas les figuiers des jardins de Viviers qui pourraient nourrir l’humanité entière. La Parole de Jésus aujourd’hui rejoint ce monde qui a perdu le sens, qui est marqué par le péché, ce monde qui se veut superficiel et que le Pape a ressenti avec tellement d’intensité ; cette société dont il a diagnostiqué l’indifférence. Nous, chrétiens, nous sommes dans ce monde, nous sommes de ce monde d’ailleurs, pécheurs avec les autres, nous sommes de pauvres pécheurs, pas des purs.
Et ce Pape, comme ses prédécesseurs, a tenu à reconnaître les faiblesses et les fautes de l’Eglise. Mais il les a combattues avec clarté et nous sommes appelés à nous situer de la même manière. Nous sommes appelés à la conversion et nous sommes appelés à l’espérance. Ces deux lignes sont très riches chez Benoît XVI. La conversion est un effort chrétien, une prise au sérieux de l’Evangile. Nous sommes invités à vivre le Carême. Ne nous disons pas que les soucis habituels suffisent, non, je regarde ma vocation devant la croix du Christ et dans la lumière de Pâques, c’est tout autre chose. Une conversion habitée d’espérance, la victoire de la croix a eu lieu, la force de la résurrection est à l’oeuvre, nous sommes des sauvés et donc l’horizon est ouvert. C’est toute la force de l’encyclique Spes salvi, dans l’espérance nous avons été sauvés. « Apparaît comme élément caractéristique des chrétiens le fait qu’ils ont un avenir ». Le découragement ne peut pas exister, et quand vient une épreuve, une pauvreté, je peux relever la tête. Bien sûr, je suis blessé et je souffre, mais je peux accueillir la lumière et la vie. Il y a dans Saint Paul un lien très fort entre la patience dont nous a parlé la parabole du figuier et la persévérance et l’espérance qui ne déçoit pas car l’Amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par l’Esprit Saint.

Nous entendons un certains nombre de questions : que va-t-il faire maintenant, à quoi va-t-il servir ? Là aussi il y a un message. Aujourd’hui, quand on n’est plus au top, quand on n’est plus actif, quand on n’est plus producteur, et bien on disparaît de la société. Une efficacité repérable, c’est le seul critère. Mais rendons-nous compte que c’est une vision du capitalisme matérialiste. C’est ainsi qu’un vieillard est d’abord une charge, un coût, il coûte bien plus cher qu’il ne rapporte, il n’a plus qu’à s’excuser et à partir sur la pointe des pieds. Je suis heureux, et c’est un bon signe, que le Pape Benoît rejoigne ainsi la cohorte de tous ceux et celles qui sont dans le grand âge. Il nous rappelle qu’un sens réel de gratuité et d’ouverture, de préparation à la vie éternelle se manifeste là jusque dans la pauvreté et le dépouillement. C’est un service réel du Royaume et de la Foi. Merci à lui. »