Quand Benoît XVI encourageait ses prêtres.


Quelle différence avec François! Un autre hommage du Père de Souza, un prêtre canadien qui tient une rubrique dans le National Catholic Register, pour le 65e anniversaire de l'ordination du Pape émérite (7/7/2016)

>>> Voir aussi, du même:
Une rencontre inespérée avec Benoît XVI

>>> Photo ci-dessous: Ordinations épiscopales du 5/2/2011 (benoit-et-moi.fr/2011-I)


Benoît XVI offre beaucoup d'encouragement aux prêtres


Fr. Raymond J. De Souza
30 juin 2016
www.catholicregister.org
(ma traduction)

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C'est devenu désormais une routine. François administre une correction spontanée aux prêtres qui font telle ou telle chose qu'il désapprouve, et les prêtres se consultent pour se demander quoi en faire.
Comme cela arrive assez souvent, j'ai une réponse en trois parties, que j'ai eu récemment l'occasion d'employer après le dernier assaut rhétorique dans lequel le Saint-Père a parlé de quelques prêtres comme étant des "animaux" qui pratiquent "la cruauté pastorale" (cf. Quand le Pape "a braccio" dérape). Le Bureau de presse du Saint-Siège, toujours prêt à expliquer ce que François a voulu dire, a aimablement expliqué que ce n'était pas que le pape pensait que certains prêtres étaient des "«animaux", mais plutôt qu'ils traitaient leurs ouailles "comme des animaux", ce qui est peut-être un peu mieux.

En tout cas, le processus en trois étapes fonctionne aussi bien, que ce soit pour examiner les remarques originelles du Saint-Père, ou celles modifiées émises par la suite.

Étape 1: Mettons de côté le langage, et considérons le comportement que le Saint-Père critique. Examinons notre conscience sur la question. Une grande partie de ce que le Saint-Père critique chez les prêtres mérite d'être critiqué - distance de notre peuple, recherche de confort, cœur endurci. S'il prend plaisir à souligner nos manquements, eh bien, trois ans auraient dû nous apprendre à le tolérer. Chaque prêtre doit développer quelque chose comme une peau épaisse quand il s'agit des critiques, y compris les critiques du pape.
Étape 2: Lisons les passages de l'Evangile où Jésus parle comme... eh bien, comme François le fait. «Race de vipères», «hypocrites» et «sépulcres blanchis», tout cela était adressé au clergé de l'époque. François n'a évidemment pas dans sa prédication et ses commentaires l'équilibre qu'a Jésus, mais cela applique à chacun d'entre nous. Jésus a parlé durement, à l'occasion. François parle durement presque tous les jours, en commençant généralement son homélie quotidienne par une revue de ceux qui ne parviennent pas à la hauteur de l'Evangile. C'est inhabituel pour nous, car nous avons depuis longtemps été enclins à éviter tout ce qui pourrait apparaître comme un jugement sévère. Nous n'avons pas à être aussi critique ou sévère que François l'est habituellement, mais nous avons quelque chose à apprendre de lui pour corriger les défauts du peuple confié à nos soins.
Étape 3: Si vous avez besoin d'encouragement - et c'est le cas pour nous tous, prêtres! - revenez en arrière et lisez Benoît XVI, une âme douce qui a écrit magnifiquement sur le sacerdoce.

En l'honneur du 65e anniversaire de l'ordination du pape émérite, permettez-moi donc de fournir ce service - un passage encourageant de Benoît XVI, extrait de son homélie en la fête des saints Pierre et Paul de 2011, pour le 60e anniversaire de son ordination:


« Non iam dicam servos, sed amicos » - « Je ne vous appelle plus serviteurs mais amis ! » (cf. Jn 15, 15). À soixante années du jour de mon Ordination sacerdotale, j’entends encore résonner en moi ces paroles de Jésus, que notre grand Archevêque, le Cardinal Faulhaber, avec une voix désormais un peu faible et cependant ferme, nous adressa à nous les nouveaux prêtres à la fin de la cérémonie d’Ordination. Selon le déroulement liturgique de l’époque, cette acclamation signifiait alors aux nouveaux prêtres l’attribution explicite du mandat pour remettre les péchés. « Non plus serviteurs, mais amis » : je savais et j’avais conscience qu’à ce moment précis, ce n’était pas seulement une parole rituelle, ni une simple citation de la Sainte Écriture. J’avais conscience qu’en ce moment-là, le Seigneur Lui-même me l’adressait de façon toute personnelle. Dans le Baptême et dans la Confirmation, Il nous avait déjà attirés vers Lui, Il nous avait déjà accueillis dans la famille de Dieu. Cependant, ce qui arrivait à ce moment-là était quelque chose de plus encore. Il m’appelle ami. Il m’accueille dans le cercle de ceux auxquels il s’était adressé au Cénacle. Dans le cercle de ceux que Lui connaît d’une façon toute particulière et qui ainsi sont amenés à Le connaître de façon particulière. Il me donne la faculté, qui fait presque peur, de faire ce que Lui seul, le Fils de Dieu, peut dire et faire légitimement : Moi, je te pardonne tes péchés. Il veut que moi – par son mandat – je puisse prononcer avec son « Je » une parole qui n’est pas seulement une parole mais plus encore une action qui produit un changement au plus profond de l’être. Je sais que derrière cette parole, il y a sa Passion à cause de nous et pour nous. Je sais que le pardon a son prix : dans sa Passion, Lui-même est descendu dans la profondeur obscure et sale de notre péché. Il est descendu dans la nuit de notre faute, et c’est seulement ainsi qu’elle peut être transformée. Et par le mandat de pardonner, Il me permet de jeter un regard sur l’abîme de l’homme et sur la grandeur de sa souffrance pour nous les hommes, qui me laisse deviner la grandeur de son amour. Il me dit : « Non plus serviteurs, mais amis ». Il me confie les paroles de la Consécration eucharistique. Il m’estime capable d’annoncer sa Parole, de l’expliquer de façon juste et de la porter aux hommes d’aujourd’hui. Il s’en remet à moi. « Vous n’êtes plus serviteurs mais amis » : c’est une affirmation qui procure une grande joie intérieure et qui, en même temps, dans sa grandeur, peut faire frémir au long des décennies, avec toutes les expériences de notre faiblesse et de son inépuisable bonté.

« Non plus serviteurs mais amis » : dans cette parole est contenu tout le programme d’une vie sacerdotale. Qu’est-ce que vraiment l’amitié ? Idem velle, idem nolle – vouloir les mêmes choses et ne pas vouloir les mêmes choses, disaient les anciens. L’amitié est une communion de pensée et de vouloir. Le Seigneur nous dit la même chose avec grande insistance : « Je connais les miens et les miens me connaissent » (cf. Jn 10, 14)


Merci Père Benoît! Ad multos annos!