Messori explique ce qu'a dit le Pape
C'est un acte de charité, la doctrine reste intacte (21/11/2010)
Après les anticipations DU livre, les commentaires vont bon train.
Parmi eux, à mes yeux, le plus précieux est celui de Vittorio Messori, qui, je crois connaît le mieux le Pape (au-delà de la barrière de la langue), par empathie. Le grand Messori, à qui le saint-Père aurait pu confier de mener l'interviewe à la place de Peter Seewald (il est trop tôt pour dire qu'on le regrette, Messori est peut-être trop intellectuel, trop "spirituel", et je pense que le Saint-Père voulait vraiment s'adresser à tous, ce "tous" étant peut-être mieux représenté par notre bavarois).
Vittorio Messori répond donc aux questions de Giacomo Galeazzi, dans La Stampa.
Texte en italien grâce à Raffaella.
Ma traduction.
Vittorio Messori répond donc aux questions de Giacomo Galeazzi, dans La Stampa
C'est un acte de charité. La doctrine reste intacte"
Vittorio Messori:"Comme la chasteté à l'époque de la peste"
Giacomo Galeazzi
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- Vittorio Messori, 25 ans après son "Rapport sur la foi", Joseph Ratzinger confie encore à un livre interview une volte-face historique. En 1985, c'était la fin de la contestation post-conciliaire, aujourd'hui l'ouverture au préservatif. Pourquoi choisit-il des occasions «informelles» pour des coups de barre?
"Il y a un quart de siècle, notre conversation a été un signal à tous ceux qui voyaient en Vatican II une rupture radicale avec la tradition. Ce geste de restauration de l'orthodoxie catholique contre les excès progressistes lui ont valu l'étiquette de Panzerkardinal;, en fait, je peux témoigner que Joseph Ratzinger est tout sauf un inquisiteur impitoyable. Plusieurs fois, je l'ai entendu répéter en privé les paroles libératrices de Jésus: c'est la loi pour l'homme et non l'inverse ".
- Donc , vous n'êtes pas surpris que, dans certaines circonstances, il admette le préservatif?
"Ce dont parle le Pape est un acte de charité. Il n'en découle pas de conséquences destructrices sur la doctrine. Rien n'est rayé dans la structure éthique du magistère. Benoît XVI se réfère à l'utilisation du préservatif non pas à des fins contraceptives, mais de charité. C'est-à-dire qu'il s'agit d'une prostituée qui demande à son client de mettre un préservatif pour éviter la contamination "
- C'est juste un acte de charité?
"Oui, comme quand au temps de peste, le devoir conjugal fut suspendu. Un peu comme le non de l'Église à l'euthanasie, mais aussi à l'acharnement thérapeutique. Le Pape se réfère à un acte de bonté, mais l'interdiction d'utiliser le préservatif est lié à la condamnation de la contraception et n'a rien à voir avec le danger de contagion. Joseph Ratzinger a une façon de raisonner différente des stéréotypes qui circulent autour de lui. Quand je lui ai demandé pourquoi il est entré au Vatican comme théologien considéré comme progressistes pour ensuite critiquer le post-Concile, il m'a dit, "ce sont les autres qui ont changé, je suis resté le même."
Il ne se soustrait jamais aux questions posées par la modernité. Il est beaucoup plus disponible à la confrontation que ses adversaires ne le dépeignent, de façon instrumentale.
- Quelle place a la morale pour Benoît XVI?
"Pour lui, elle est au second plan par rapport à la foi, comme le sont la politique et l'économie d'orientation chrétienne. Ce qui le préoccupe, c'est la crise de la foi: à Fatima, il l'a comparée à une flamme qui ne trouve plus d'aliment. Le célibat, le non au contrôle des naissances, la pauvreté, la chasteté et d'obéissance des ordres religieux sont à dénoncer à l'ONU ou Amnesty International, s'ils ne sont pas encadrés dans une perspective chrétienne. L'éthique catholique est la plus rigoureuse. Protestants et orthodoxes acceptent le divorce, les musulmans acceptent même la polygamie. Le rejet du préservatif, comme d'autres obligations éthiques catholiques, sont inhumains en dehors d'une perspective de foi. "
- Sans l'interdiction de l'utilisation du préservatif, la morale catholique s'écroule?
"Le problème pour l'Eglise n'est pas le préservatif, mais la préservation de la vie qui, pour ceux qui croient, est un don de Dieu à ne pas perdre. Il existe un moyen très sûr de prévenir les maladies sexuellement transmissibles et le sida et c'est la chasteté conjugale. Le point crucial est le désordre sexuel, pas le préservatif. Le SIDA ou la syphilis ne s'attrappent pas en buvant un café au bar. L'Église encourage la fidèlité pour les personnes sexuellement actives. D'éminents scientifiques s'accordent sur le fait que la fidélité est la principale stratégie de prévention des épidémies comme celles répandues dans l'Afrique subsaharienne. Des échappatoires efficaces, il n'y en a pas".
- Vous êtes surpris par le ton désinvolte de Joseph Ratzinger?
"Je sais quelle est son ouverture d'esprit. Les stéréotypes qui le suivent depuis des décennies l'amusent. Durant les jours de repos, en montagne, il ne manquait jamais de m'interroger sur les blagues qui circulaient sur son compte dans les sacristies. Comme bavarois, il revendique son côté latin. Il voudrait que le monde ait une foi colorée, un christianisme en «technicolor» comme dans son enfance en Bavière, plein de fleurs, de mangeailles et de fêtes. "
© Copyright La Stampa, 21 Novembre 2010
