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Ettore Gotti-Tedeschi

et les cardinaux divisés. Dossier. (28/5/2012)

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A propos d'Ettore Gotti-Tedeschi, relire ici une interviewe d'Angela Ambrogetti, après l'épisode qui en 2010 l'avait vu accusé par la justice italienne de n'avoir pas respecté les procédures anti-blanchiment:
"Ce que pense Gotti-Tedeschi"
(benoit-et-moi.fr/2010-III).


Le rôle de la presse

J'ai essayé de rassembler quelques éléments d'informations en Italie, ne trouvant rien de satisfaisant dans la presse française.
Il est évident que le départ de M. Gotti Tedeschi de la tête de l'IOR, est directement lié à l'affaire du corbeau. Non moins évident que, comme il est question d'argent, le diable s'en est mêlé. Et que, comme on va le voir, on n'est pas très loin de ce que j'avançais hier (cf. Troisième vague d'attaques contre l'Eglise ).

Tout est peut-être parfaitement explicable - sauf le fait qu'une mésentente entre les cardinaux (certains pouvant avoir été manipulés) prenne les dimensions d'une affaire d'Etat.

Et le rôle de la presse, dans tout cela?
Curieusement, par un excès de pudeur suspect, il n'y est fait allusion nulle part, alors qu'il y a eu vol de document, et donc, à l'autre bout de la chaîne, recel de documents volés. Et l'on ose parler de devoir professionnel d'informer, et de déontologie!!!
Sans Gianluigi Nuzzi, l'auteur du livre de révélations "Sua Santità" qui n'est que le dernier épisode d'une longue série - et les medias qui sont derrière - tout cela n'aurait pas pu prendre de telles proportions: d'autant plus que les prétendus malversations financières du "Vatican" n'en sont peut-être, et même sans doute, pas, mais seulement la réticence à s'insérer dans le système financier mondial - et tout est une question d'interprétation.

Sa biographie sur Wikipedia nous rappelle qu'il est l'auteur d'un numéro du magazine télévisé d'enquêtes "Gli intoccabili", le 25 janvier 2012, intitulé “Congiura in Vaticano” (Conjuration au Vatican) (www.ilpost.it/2012/01/27/gli-intoccabili-e-il-vaticano), où il s'en prenait au Vatican à coups (déjà!) de "révélations" et de documents volés. L'émission avait fait l'objet d'une ferme mise au point du Père Lombardi. Notons que le producteur de l'émission n'est autre que Gad Lerner, qui avait joué le rôle du modérateur peu loyal lors du mémorable débat de 2000 entre le cardinal Ratzinger et Paolo Florès-d'Acaïs, le directeur de la Revue Micro-Mega, ayant donné lieu à la publication du livre "Est-ce que Dieu existe?" (cf. http://beatriceweb.eu/Blog). Le monde est petit.
Et le même Nuzzi a "commis" en 2009 un livre intitulé Vaticano spa, sous-titré "La vérité sur les scandales financiers et politique de l'Eglise".

Nous y voilà!!


Finances du Vatican: un bref résumé

Tout d'abord, faisant des recherches, je suis tombée sur un site dont l'auteur n'est certainement pas de la même "sensibilité" que moi. C'est une litote.
Sans nier l'intention évidemment peu bienveillante de l'énumération, il y a un vrai travail de synthèse, et les faits rapportés sont exacts (cf. http://eglise1piege.unblog.fr).



Les cardinaux divisés

Les cardinaux divisés. Bertone critiqué pour sa gestion
Vatican Insider
28/5/2012
Giacomo Galeazzi,
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L'affaire de l'IOR divise les cardinaux. Jeudi, le conseil laïque de surintendance de la banque du Vatican a enterré son président Ettore Gotti Tedeschi sous un déluge d'objections. Mais, la plupart ne le savent pas, le «coffre-fort du Pape» est en fait géré par un régime «dual». Au-dessus du Conseil des Laïcs , il y a le comité de surveillance des cardinaux, qui s'est réuni vendredi, sans réussir à approuver un communiqué. Un événement sans précédent, signe qu'on n'a pas pu trouver un accord au sein du directoire, conduit par le secrétaire d'Etat Tarcisio Bertone, et composée des cardinaux Attilio Nicora, Jean-Louis Tauran, Telesphore Placidus Toppo et Odilo Pedro Scherer. A ce que l'on a appris, Nicora et Tauran ont contesté à Bertone la gestion de la sortie de Gotti Tedeschi et toute la conduite des négociations qui devaient conduire à l'admission du Saint-Siège dans la «liste blanche» de l'OCDE (1), à savoir la liste Les pays «vertueux».

Les experts de MONEYVAL, le groupe du Conseil de l'Europe qui s'occupe de l'évaluation des systèmes contre le blanchiment d'argent et contre le financement du terrorisme, continuent à examiner les procédures et les normes du Vatican. Nicora, en outre, conteste à Bertone la soustraction de pouvoirs à l'AIF - l'Istituzione dell'Autorità di Informazione Finanziaria (2) , l'autorité interne d'information financière qu'il préside, ralentissant ainsi le parcours vers la transparence financière. Difficile à dire si l'affrontement au sein de la commission des cardinaux est dû à l'évaluation de l'action de Gotti Tedeschi.

Ce qui est certain, c'est que cette opposition aura des effets sur la nomination de nouveau chef de l'IOR. Actuellement, le candidat le plus accrédité pour la succession du banquier de Piacenza est le président "intérimaire" Ronaldo Hermann Schmitz, mais les hypothèses sont nombreuses. Le profil idéal est celui de l'ancien numéro 1 de la Bundesbank, Hans Tietmeyer qui est allemand, comme l'aimerait le Pape, mais très âgé. En somme, au sein de la commission cardinalice, aujourd'hui, deux "âmes" s'opposent ouvertement.

D'un côté, ceux qui croient (Nicora, Tauran) que la ligne de la transparence, la nécessité d'adapter les normes internationales pour entrer dans le club des plus vertueux, est pour le Vatican un idéal à ne décevoirà aucun prix; de l'autre ceux qui, comme Bertone, croient que cette même ligne devrait être poursuivie avec modération, car le Vatican a ses propres caractéristiques qui le rendent non assimilable à d'autres Etats souverains.
A la première inspection de Moneyval, en Novembre dernier, par certains aspects, la législation aurait été jugée «trop vague» et a donc subi des ajustements non négligeables.
Non sans polémiques et luttes intestines (entre autres choses avec les fuites de documents). Le 25 Janvier (3), «par nécessité urgente», la législation a été «modifiée et complétée» avec des ajustements sur les pouvoirs de contrôle de l'AIF, dont les «inspections» sont désormais «disciplinées» par un règlement. A part quelques maux d'estomac et une certaine résistance dans les dicastères concernés, l'intention du Saint-Siège est d'arriver à des règles qui soient effectivement conformes aux normes internationales. Il y aurait, dans ce contexte, plusieurs aspects à organiser et à adapter. Et la nouvelle tempête au sommet de l'IOR pourrait causer à la négociation des dommages difficiles à prévoir.

* * *

Notes
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(1) Organisation de coopération et de développement économiques: organisation internationale d’études économiques, dont les pays membres - des pays développés pour la plupart - ont en commun un système de gouvernement démocratique et une économie de marché. Elle joue essentiellement un rôle d’assemblée consultative (wikipedia).

(2) L'AIF a été instauréepar Benoît XVI, par un motu Proprio du 30/12/2010 (ndt: non traduit en français sur le site du Vatican), pour la prévention et la lutte contre les activités illégales dans le domaine financier et monétaire. (cf. http://www.iuscanonicum.it/AIF.htm )

(3) En janvier dernier, Andrea Tornielli consacrait un article à cette nouvelle norme.
Voir ci-dessous.


La nouvelle loi sur la transparence

Approuvée le 25 Janvier, elle modifie les règles précédentes, attribuant un pouvoir d'inspection à l'Autorité de surveillance financière interne
Vatican Insider
Andrea Tornielli

«Savez-vous quelle est la première et principale institution concernée par l'application des normes internationales sur la transparence, qui devraient amener le Vatican à entrer dans la «liste blanche» des Etats vertueux? C'est l'IOR ... et vous savez pourquoi? Parce qu'elle a absolument besoin de cette entrée pour pouvoir effectuer ses activités financières».

Le prélat, évêque de la Curie romaine depuis de longues années, bien versé dans les affaires qui concernent l'Institut pour les Œuvres Religieuses, la «Banque du Vatican», nous invite à regarder à la substance. « Et la substance - explique-t-il - c'est le décret du 25 Janvier, la nouvelle loi sur la transparence, qui a été approuvée et met à jour l'ancienne, mettant le Vatican en conformité avec les règles internationales anti-blanchiment». Une loi déjà en vigueur mais qui n'a pas encore été rendue publique, que La Stampa a pu consulter.

La loi 127 du Vatican sur le blanchiment a été rédigée à la fin de 2010, et est entré en vigueur en Avril de l'année dernière. Rédigée à la hâte, pour mettre en œuvre la Convention monétaire avec l'Union européenne de 2009, en plus lors d'une période difficile pour l'IOR, qui avait vu «gelés» par le pouvoir judiciaire italien 23 millions d'euros parce les règles anti-blanchiment n'avaient pas été respectées, cette première loi a été soumise au cours des dernières semaines à un "restyling" décisif. Le 25 Janvier, a été approuvé le décret numéro 159, signé par le Président du Gouvernorat du Vatican, le néo-cardinal Joseph Bertello, et les amendements sont entrés en vigueur immédiatement.

Il y a beaucoup de changements par rapport à l'ancienne loi.
...
[Suit une énumération technique à lire ici]

Avec la nouvelle loi sont affirmés quelques principes fondamentaux, comme par exemple le principe général de transparence et d'intégrité des secteurs économiques, financiers et professionnels (article 1 a); le principe de l'approche basée sur le risque (art. 28 a). Sont rendus non-optionnels les protocoles d'entente entre l'AIF et les organismes similaires dans d'autres pays. Est reconnu le rôle d'autres organismes dans l'ordre juridique vatican, comme la gendarmerie, et les tribunaux, qui était presque absents dans l'ancienne loi. Enfin, est explicitement reconnu l'indépendance opérationnelle de l'AIF, qui a des pouvoirs de contrôle sur chaque transaction financière des Dicastères de la Curie romaine et des organismes qui dépendent du Saint-Siège, y compris l'IOR, le Gouvernorat et la Secrétairerie d'Etat elle-même, dans la mesure où ils exerçent des activités qui relèvent de la loi anti-blanchiment (LAB).

Les modifications à la loi précédente, contenues dans le décret d'urgence du 25 Janvier peuvent être reliées au travail conduit au Vatican en Novembre dernier par un groupe d'experts juridiques de MONEYVAL, l'organisme du corps du Conseil de l'Europe qui s'occupe d'évaluer les procédures anti-blanchiment en vigueur dans différents pays. Avec la nouvelle loi, le Vatican se rapproche des normes internationales, c'est à dire des «49 recommandations du GAFI» (Groupe d'action financière du Fonds monétaire international), que tous les États vertueux doivent suivre.

Au décret du 25 Janvier, on est parvenu après des discussions, des débats, différentes ébauches. Il y avait ceux qui voyaient l'ancienne loi - écrit par Marcello Condemi - déjà suffisante en soi, et ceux qui au contraire jugeaint nécessaire de s'adapter aux normes internationales. Il a été souligné que les inspections de l'AIF devront être réglementées par la Commission pontificale pour l'Etat de la Cité du Vatican. Mais le pouvoir par rapport aux règlements d'application, eux aussi contraignants, reste dans les mains de l'Autorité de vigilance. Sans compter que la nouvelle loi vient introduire explicitement le pouvoir d'inspection, absent dans la norme précédente.


Le sacro-saint principe de transparence

Je conclus ce dossier par ce texte du Père Scalese: http://benoit-et-moi.fr/2010-III/

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Mercredi 3 Novembre 2010
IOR, transparence et .. prudence
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Je ne suis désormais plus un jeune homme , les années continuent à passer. Parmi les nombreux inconvénients de l'âge, il y a aussi des avantages: l'expérience vous permet de regarder avec un certain détachement les vicissitudes de la vie. Pensons à la politique: de temps en temps se présentent de nouveaux hommes et de nouveaux mouvements politiques qui promettent monts et merveilles; mis à l'épreuve, ils s'avèrent être en tous points semblables, sinon pires que ceux qui les ont précédés.

Je ressens le même sentiment de détachement, ces jours-ci, à propos de l'IOR. Sans compter les événements des années lointaines, dont j'ai été informé par d'autres qui les avaient vécus, me limitant à ce dont je peux me souvenir personnellement, j'ai été témoin à plusieurs reprises d'annonces des réformes radicales de l'Institut, ayant systématiquement fini dans l'impasse (de sorte qu'à chaque fois, le besoin de nouvelles réforme s'est fait ressentir). C'est pourquoi quand j'entends dire qu'à partir de maintenant tout va changer, je n'y crois plus parce que je sais que tout restera comme avant. Pas plus que ne je m'en scandalise , parce que j'en suis arrivé à la conclusion que le monde est, et sera toujours, ce qu'il est.

C'est pourquoi, quand Ettore Gotti Tedeschi a assumé la présidence de l'IOR, j'ai accueilli avec une certaine méfiance ses intentions de changement radical dans la gestion de l'Institut. Le parquet de Rome s'est alors chargé de prouver que les choses n'allaient pas vraiment dans le sens annoncé par le président de l'IOR. Bien sûr, on se justifie par les effets négatifs de la gestion passée.

Il est évident qu'une telle justification provoque inévitablement la réaction de ceux qui étaient responsables de cette gestion. C'est exactement ce qui s'est passé ces jours-ci. L'ancien président de l'IOR, Angelo Caloia, n'a pas beaucoup apprécié les déclarations de Gotti Tedeschi et a demandé que lui soit donnée la possibilité de répondre à ses insinuations dans les colonnes de "L'Osservatore Romano". Une requête - selon moi - plus que légitime. J'espère sincèrement que la direction du journal du Vatican offrira à Caiola la possibilité de fournir sa version des faits.

Gotti Tedeschi n'a pas été très prudent dans cette affaire. Mais je pense qu'il s'est montré tout aussi imprudent en promettant la "transparence totale" dans la gestion de la banque du Vatican. Il est devenu de bon ton de parler de transparence, mais le plus souvent, on ne se rend pas compte des conséquences que cela peut entraîner. Tant et si bien que, dans le même article de la Repubblica, on parle d'une "course aux abris", pour protéger une confidentialité plus que légitime. J'ai l'impression que, parfois, on ne prend pas en compte les implications des propos que l'on tient; il semble que l'on fasse tout pour plaire aux médias, jusqu'à en adopter le langage; mais on se rend compte après qu'une fois engagé dans cette voie, on ne sait pas où elle va finir. L'autre jour, on a appris qu'un groupe de survivants de l'Holocauste avait réclamé à l'Union européenne une enquête sur l'éventualité que l'IOR ait joué un rôle dans le transfert des biens volés par les nazis aux déportés dans les camps de concentration.

Avant d'avoir la bouche pleine de certaines expressions (et, par conséquent, d'adopter un certain système de valeurs) la prudence voudrait qu'on réfléchisse un instant sur la signification, l'origine et le but de ces expressions.
La «transparence», que je sache, ne fait pas partie des vertus humaines et chrétiennes; il s'agit d'une «valeur» de création récente. Si vous allez chercher dans un dictionnaire, même d'il y a quelques années, vous ne trouverez pas le sens que nous donnons aujourd'hui à ce mot. Peut-être l'idée de transparence a-t-elle commencé à se répandre à l'époque de Gorbatchev (déjà, cela devrait nous donner à réfléchir: la glasnost, autrefois utilisée pour démanteler le système soviétique, a été rapidement mise de côté). J'ai l'impression que la transparence n'est réclamée que quand un objectif précis est poursuivi (qu'on pense, par exemple, à l'insistance sur la transparence au cours de la campagne contre la pédophilie dans l'Eglise).
Un autre aspect à considérer, ensuite, c'est que ceux qui revendiquent la transparence sont généralement les premiers à ne pas la pratiquer. Un exemple: les Juifs continuent de demander l'ouverture des archives du Vatican sur le pape Pie XII, mais en Israël, ils prolongeent la période de vingt années la période où leurs documents sont classifiés (voir l'article sur Haaretz). Je veux dire: nous sommes souvent un peu naïfs, et ne réalisons pas que l'exigence de transparence a le plus souvent des intentions cachées. Pourtant, Jésus nous avait averti: "car les enfants de ce siècle sont, dans leur monde, plus habiles que les enfants de lumière". (Luc 16:8).

Qu'on doive parler de justice et d'honnêteté ou même, plus simplement, d'équité et de rigueur, je suis d'accord; mais quand on commence à parler de «transparence», mieux vaut être prudent. Si au lieu de nous "faire beaux" avec des expressions à la mode, nous pensions à pratiquer la vertu ancienne de prudence, peut-être ferions-nous mieux.