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Le card. Bernardin accusé à tort d'abus sexuels

Il fut archevêque de Chicago de 1982 à 1996. Son cas est-il isolé? Un texte très fort, et bouleversant, du site Religion en Libertad, traduit par Carlota (18/6/2010)



Carlota

Le frère Jorge Enrique Mújica, rappelle pour « Religion en Libertad » (original ici) l’éprouvante expérience vécue par le cardinal nord-américain Joseph Bernardin faussement accusé d’abus sexuels sur mineur.
Le cardinal Joseph Bernardin, né le 2 avril 1928 à Columbia en Caroline du Sud, de parents immigrés italiens (Peut-être d’origine valdôtaine, la biographie disponible en ligne parle du Nord de l’Italie sans précision – Biographie archives diocèse de Chicago ici) et mort le 14 novembre 1996 à Chicago, a été archevêque de Cincinnati (Ohio) à partir de 1972, puis de Chicago (Illinois) entre 1982 et 1996. Il a été fait cardinal par le pape Jean-Paul en 1983. Il a beaucoup œuvré dans le domaine de la doctrine sociale de l’Église. Et il a même été cité par Obama lors d’un entretien en juillet 2009 où il a déclaré que la tradition catholique avait eu une grande influence sur sa vie (cf article de La Croix ici [1]), mais l’on sait ce que veut dire une « grande influence » en matière notamment du respect de la vie pour l’actuel président des États-Unis! Cette remarque (en fait Obama, «travailleur social » dans les années 80 dans les quartiers sud de Chicago, puis professeur de droit à l’Université de Chicago la décennie suivante, n’a sans doute pas eu des relations suivies avec le prélat) suffit parfois à certains pour rattacher d’une manière pas forcément exacte le cardinal Joseph Bernardin à une certaine « Église » catholique aux Etats-Unis.

Ma traduction du texte du F. Jorge Enrique Mújica, LC

C’est au mois de novembre 1993 que commencèrent les rumeurs selon lesquelles un cardinal nord-américain serait accusé devant la justice civile d’abus sexuels. Le 11 novembre, son nom fut rendu public : il s’agissait du cardinal Joseph Bernardin, alors archevêque, et âgé de 65 ans. « L’accusation me laissa perplexe et abasourdi. J’ai essayé ne pas prendre en compte les rumeurs non confirmées et je me suis remis au travail, mais une accusation aussi extravagante contre mes idéaux et mes engagements les plus profonds a continué à accaparer mon attention», a raconté par la suite dans son célèbre livre de mémoire, « Le don de Dieu » (ndt : Paru sous le titre original The Gift of Peace: Personal Reflection, Doubleday, 1998).
Le nom de l’accusateur fut également révélé : il s’agissait de Steven Cook, qui avait alors 35 ans et était atteint du SIDA (contracté dans sa jeunesse des suites d’une vie sexuelle active avec différents partenaires). Il affirmait avoir été conduit à la chambre du Père Bernardin en 1975, quand il était étudiant au séminaire de Saint Grégoire à Cincinnati, et avoir été soumis à des abus.

Immédiatement, les médias ont commencé à donner le fait pour avéré et à en faire de larges développements dans les journaux et programmes, et même à y consacrer des émissions spéciales. La CNN, (ndt pour Cable News Network, fondé en 1980 par Ted Turner, - accessoirement époux de Jane Fonda. Principale chaîne télévision des Etats-Unis, avec une orientation très mondialiste et onusienne. Sans commentaire !), par exemple et comme d’habitude, en profita pour faire une émission intitulée « La chute de la grâce ». Il n’y eut qu’un seul journaliste, Bill Kurtis, qui suggéra la possibilité que cette affaire en cachait une autre, sur une chaîne locale affilié à CBS (ndt Columbia Broadcasting System, premier réseau radio en 1927 puis télévisé nord-américain en 1939).
Des années après le cardinal lui-même faisait part de la même intuition : « Je ne disposais pas des faits qui confirmaient ma sensation de ce qu’il s’agissait d’un simple pion, - faisant référence à l’accusateur, - pion par rapport à la partie terrible qui se jouait, ce dont j’avais la vive conviction ».

L’équipe du cardinal Bernardin prépara une stratégie face à la presse, mais l’archevêque de Chicago décida que le mieux, ce serait sa stratégie : « Je dirai simplement la vérité ».

À la première conférence de presse, presque soixante-dix journalistes se sont précipités. En reparlant de cet fait, le cardinal Bernardin dira : « Ce moment d’accusation publique et d’inquisition était aussi un moment de grâce […]. Par-dessus tout c’était un moment de croissance spirituelle ».

Presque à la fin de la conférence de presse un journaliste goguenard (ndt en espagnol a aussi le sens de sournois) interpela le cardinal : « Êtes-vous sexuellement actif ? ».
Joseph Bernardin sentit l’abîme qui séparait le monde du journaliste du sien. Et il lui a répondu : « J’ai toujours vécu une vie chaste de célibat ». Quelques instants après, et pas qu’un petit nombre de journalistes s’approcheront pour lui dire : « Maintenant nous savons que vous dites la vérité, mais nous devons poser ces questions. Notre travail en dépend ». Le lendemain le Chicago Tribune titrait: « Il a mené une vie chaste ».

100 jours plus tard, l’affaire était résolue en faveur du cardinal Bernardin. Nous étions déjà en 1994. Les « preuves » mises en avant se limitaient à une photo de groupe et à un livre qui ne portait même pas la signature du cardinal. Paradoxalement l’archevêque d’origine italienne ne voulut pas poursuivre Steven Cook: « J’ai fait savoir à mes avocats que je ne voulais par poursuivre »

Mais tout ne s’est pas terminé ainsi. « Je pensais souvent à Steven et à sa solitude, à son exil, assombri par la maladie, tant de la maison de ses parents que de l’Église ». Bernardin prit contact avec Mary, la mère de Steven. Le 30 décembre 1994 il s’envolait vers Philadelphie, accompagné d’un groupe de prêtres, pour rencontrer son accusateur.

«Nous nous sommes donnés la main et je me suis assis à côté de Steven sur un canapé […]. Je lui ai expliqué que l’unique raison de la rencontre c’était de mettre fin aux faits traumatisants de l’hiver passé en lui faisant savoir que personnellement je n’avais en moi aucun ressentiment à son égard. Je lui ai dit que je souhaitais prier pour lui, pour son bien être physique et spirituel. Et Steven a répondu qu’il avait décidé de me rencontrer pour pouvoir pour demander pardon pour l’ennui et le mal qu’il m’avait causé. Dans ces mots, tous les deux nous cherchions la réconciliation ».

Steven a raconté au cardinal Bernardin que lorsqu’il était jeune séminariste il avait été l’objet d’un abus de la part d’un prêtre qu’il considérait comme un ami. Au début Steven n’aspirait qu’à un jugement contre cette personne mais on lui avait conseillé de taper directement sur le cardinal Bernardin. Et les « conseils » venaient d’un autre prêtre et de l’avocat qui lui a donné les éléments pour porter l’accusation. Or le cardinal Bernadin a écrit au moins une lettre à Steven durant le procès, mais la lettre ne a jamais été remis par l’intermédiaire de son avocat.

«J’ai regardé en face Steven qui était assis à quelques mètres de moi.
- Tu sais, ai-je dit, que je n’ai jamais abusé de toi.
- Je le sais, a-t-il répondu doucement. Pouvez-vous me le répéter ?
- Je n’ai jamais abusé de toi. Tu le sais, n’est-ce pas ?, ai-je dit en le regardant dans les yeux.
Steven a acquiescé de la tête et a répondu:
- Oui, je le sais et je désire demander pardon pour avoir dit que vous l’avez fait.
[…] Je lui ai dit que j’avais prié pour lui tous les jours et que je continuerais à le faire pour sa santé et sa paix spirituelle».
Le cardinal Bernardin a donné une Bible à Steven, et lui l’a embrassée alors que ses yeux se remplissaient de larmes. Il a sorti un vieux calice et il lui dit qu’un homme inconnu lui avait fait ce cadeau pour qu’il célèbre une messe pour lui. Et Steven lui a demandé de célébrer la messe là, maintenant. Dans l’accolade de paix, le cardinal donna à Steven un signe émouvant de pardon et de charité et puis il l’ondoyé de l’huile des malades.

Steven est mort le 22 septembre 1995 complètement réconcilié avec l’Église. Six mois après la rencontre entre le cardinal et son accusateur, on diagnostiqua un cancer du pancréas à l’Archevêque de Chicago. Le cardinal Bernardin mourra en odeur de sainteté en novembre 1996.
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Note

[1] La Croix, 5 juillet 2009

Le président américain rencontre vendredi 10 juillet Benoît XVI, à l’issue du G8 de L’Aquila. À cette occasion, il a reçu à la Maison-Blanche plusieurs journalistes de la presse catholique, dont Dan Connors, de "Catholic Digest", partenaire de "La Croix" aux États-Unis

Une des raisons qui me poussent à établi une relation avec les évêques est important pour moi, c’est le très bon souvenir que j’ai du cardinal Bernardin, qui était à Chicago quand j’y suis arrivé pour être animateur de communauté et pour travailler avec les paroisses catholiques des quartiers sud de Chicago. Je sais le potentiel des évêques américains à s’exprimer avec force sur les questions de justice sociale. Je pense qu’il y aura toujours des domaines où nous aurons des accords profonds et d’autres où nous seront en désaccord. C’est sain.

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