La "touche catholique verte" de Benoît

J'ai déjà eu l'occasion de donner mon sentiment (je ne dis pas que j'ai raison à tout prix!) sur cette récupération "verte" du Pape, dont il est permis de supposer qu'elle n'est pas exempte d'arrières pensées.
Voir par exemple ici: A Loreto, le Pape et l'écologie et ici: Le "Pape vert" (bis)
L'article de John Allen est plus nuancé que ce qu'on lit d'habitude sur le sujet, il le dit même avec humour:

"... dans son message d'aujourd'hui, Benoît a pris soin de signaler qu'il n'est pas prêt à prendre une carte de membre d'une association "La terre d'abord" ("Earth First!"). Autrement dit, son attitude est une nuance différente de vert catholique"

Article original sur le site de NCR:
In World Peace Day message, Benedict paints a Catholic shade of green

Ma traduction

Sur ce thème, voir aussi:
L'humanité est une grande famille
Ecologie: la famille a besoin d'une maison
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Dans le message pour la Journée mondiale de la paix, Benoît ajoute "une touche catholique verte"
John Allen, 11 décembre 2007

Au cours de la dernière année, le Pape Benoît XVI a considérablement affiné son message environnemental, non seulement en paroles mais aussi en actes, approuvant par exemple l'initiative de poser des cellules solaires sur le toit de la Salle Paul VI et de replanter des arbres dans une portion de la forêt hongroise afin de compenser la production annuelle de carbone du Vatican.

Dans son message annuel pour la Journée mondiale de la Paix, publié aujourd'hui dans une conférence de presse du Vatican, il revient une fois de plus sur l'urgence de mesures de protection écologiques efficaces, insistant sur le fait que "les problèmes se dessinant à l'horizon sont complexes et le temps est compté."
Dans les 3000 mots de son message, Benoît aborde également la famille, la course aux armements, et les fondements moraux du droit international.

Le message est intitulé "La Famille humaine, une Communauté de paix."
En matière d'environnement, cependant, Benoît est aussi bien conscient du fait que son plaidoyer écologique naissant attire le feu des critiques de ceux qui l'accusent d'apporter aide et soutien aux écologistes laïques radicaux, y compris les penseurs qui nient tout statut moral aux êtres humains ou qui refusent la notion Biblique de bonne gestion de la terre comme étant excessivement "anthropocentrique".

Ainsi, dans son message d'aujourd'hui, Benoît a pris soin de signaler qu'il n'est pas prêt à prendre une carte de membre d'une association "La terre d'abord" ("Earth First!"). Autrement dit, son attitude est une nuance différente de vert catholique.

"Les êtres humains, à l'évidence, sont d'une valeur suprême à l'égard de la création dans son ensemble", écrit le pape. "Le respect de l'environnement ne veut pas dire considérer que la matière ou la vie animale sont plus importantes que l'homme."

"Il est important que les évaluations (sur l'environnement) se fassent avec prudence, dans un dialogue entre experts et sages, sans précipitations idéologiques vers des conclusions hâtives", dit le pape.

Une fois ces réserves mises de côté, l'accent mis par Benoît sur l'écologie, dans le nouveau message, est fort.

"Nous avons besoin de prendre soin de l'environnement", écrit Benoît. "Il a été confié à des hommes et des femmes de le protéger et de le cultiver dans une liberté responsable, en conservant le bien de tous comme constant critère déterminant."

Le pape va même jusqu'à dire que de nouvelles institutions internationales pourraient être nécessaires pour promouvoir la bonne gestion de la demeure commune des hommes

L'approvisionnement en énergie est une source particulière de préoccupation papale.

"Les pays technologiquement développés sont confrontés à deux besoins pressants: réévaluer le niveau élevé de consommation en raison de l'actuel modèle de développement, et investir dans les sources d'énergie de remplacement et d'une plus grande efficacité énergétique", dit Benoît.

"Les pays émergents ont de grands besoins énergétiques, mais il arrive que ces besoins soient satisfaits au détriment des pays pauvres qui, à cause de l'insuffisance de leurs infrastructures même sur le plan technologique, sont obligés de vendre à bas prix les ressources énergétiques dont ils disposent. Parfois, leur liberté politique elle-même est mise en cause par des formes de protectorat ou tout au moins de conditionnement qui apparaissent clairement humiliantes." (traduction Zenit, pour ce passage de la lettre)

Sur la course aux armements, Benoît qualifie le trafic mondial d'armes de "commerce néfaste", et appelle à une "démilitarisation effective", en particulier pour les armes nucléaires.

Le pape ne dispense personne de blâme.
"Les pays du monde industrialisé profitent immensément de la vente d'armes, tandis que le pouvoir des oligarchies, dans de nombreux pays pauvres souhaite renforcer leur fief par l'acquisition d'armes toujours plus sophistiquées", écrit Benoît.

Dans une déclaration présentant le message de Benoît à la presse, le Cardinal Renato Martino, Président du Conseil pontifical "Justice et Paix", a dit que les dépenses mondiales sur les armes ont atteint 1,204 milliards de dollars en 2006, et que les dépenses d'armement ont augmenté de 37 pour cent au cours de la période 1997-2006.

"C'est le plus grand niveau de dépenses jamais enregistré, même à l'époque de la 'guerre froide' ", selon Martino.
De plus, selon Martino, la course aux armements que ces dépenses alimentent est en fait contre-productive en regard des efforts contre le terrorisme, puisque la prolifération des armes, rend le monde non pas plus sûr, mais moins sûr.

Au-delà de ces préoccupations politiques, Benoît XVI est revenu sur un thème désormais familier, dans son message 2008 pour la journée de la paix.

Quand Benoît XVI revient à la politique, son leitmotiv est généralement le suivant: Il n'y a pas de base solide pour un monde en dehors de Dieu. Soit le monde reconnaît un droit moral universel et objectif fondé sur un Créateur transcendant, ou bien, en fin de compte l'égoïsme humain et la volonté de puissance aveugle l'emportent.

En ce sens, le coeur de l'argumentation du pape se trouve dans le paragraphe 12, sur la relation entre le droit international et la morale:

"La norme juridique qui régit les relations entre les individus, discipline les conduites extérieures, et établit des sanctions pour les contrevenants, a comme critère la norme morale enracinée dans la nature elle-même", écrit le pape. "Il est nécessaire de revenir à la norme morale naturelle comme base de la norme juridique, sinon, cette dernière reste constamment à la merci d'un consensus fragile et provisoire".

Voilà, en résumé, l'argument constant du pontificat de Benoît à chaque fois qu'il revient vers les questions de paix et de justice, depuis sa récente encyclique 'Spe Salvi' jusqu'à son livre 'Jésus de Nazareth' et à son discours au Brésil lors de son voyage en mai dernier.

Sans s'imprégner de valeurs transcendantes enracinées dans la foi, avertit le pape, le droit international et les relations entre les États seront toujours "soumis à la manipulation pour des raisons idéologiques ou égoïstes."

Benoît suggère que c'est la raison pour laquelle il ouvre ses réflexions sur la paix dans le monde par une affirmation sur la conception chrétienne traditionnelle de la famille, enracinée dans le mariage entre un homme et une femme marqué par "l'acceptation responsable d'une nouvelle vie".
Une référence indirecte à l'enseignement de l'église sur le contrôle des naissances et l'avortement.

Compte tenu du rôle de la famille comme école primordiale de paix, Benoît indique que "le déni, voire la restriction des droits de la famille, en occultant la vérité sur l'homme, menace les fondements mêmes de la paix."

Dans un communiqué publié ce matin par la Conférence des évêques catholiques des Etats-Unis, le cardinal de Chicago Francis George, président de la conférence, a dit que le message du pape fait remarquer qu'à chacun d'entre nous, individuellement et en tant que nation, incombe la responsabilité de la paix, ce qui commence à la maison, tant dans la manière dont nous nous traitons les uns les autres que dans la manière dont nous utilisons toutes les ressources de la Terre. "

En conclusion de son message, Benoît XVI note que 2008 marque trois anniversaires importants: c'est le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme de l'ONU, le 25e anniversaire de l'adoption par le Saint-Siège de la Charte des droits de la famille, et le 40e anniversaire de la Journée mondiale de la paix elle-même.
Le Pape Paul VI en a instauré la célébration annuelle comme un signe de la préoccupation de l'église catholique pour la paix, et l'a placée le 1er janvier Jour de l'An, plutôt qu'un jour de fête catholique traditionnelle, afin de signaler l'ouverture à tous "les hommes et les femmes de Bonne volonté. "



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