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Pourquoi Assise

Je voudrais convaincre mes lecteurs que le Saint-Père a de VRAIES raisons d'y aller! Un lecteur m'écrit que sa démarche est en rapport avec le tournant du Pontificat auquel nous assistons: "Pendant 5 ans, le Pape s'est occupé surtout des tradis, des anglicans et des orthodoxes. Aujourd'hui, il concentre son activité sur les autres religions et les païens".
En renfort, un formidable plaidoyer d'Andrea Tornielli (16/1/2011)

-->> Relire ici: Benoît XVI ira à Assise (l'appel au Pape de catholiques italiens)

Sans donner aux polémiques une importance démesurée, et autant de temps à l'avance (au risque de passer pour paranoïaque!), il apparaît évident que la rencontre d'Assise annoncée par Benoît XVI lui-même pour l'automne prochain, a suscité des critiques assez acérées, venant cette fois de l'aile droite de l'Eglise.
Je suis intimement convaincue que le Saint-Père sait ce qu'il fait, et c'est pour faire passer au mieux (et le plus honnêtement possible) cette idée que j'ai commencé ce dossier "Assise".

Bien sûr, on peut avoir des doutes: je mentirais en disant que cette rencontre me transporte de joie, et que je l'aurais appelée de mes voeux. Mais j'ai confiance en lui, et je sais qu'il a ses raisons. Et je sais aussi qu'il va faire en sorte de lever toutes les ambiguïtés. En ce sens, Assise IV pourrait être une réparation, une mise au point, un recadrage, d'Assise I. En ce sens aussi, la lettre des intellectuels italiens pourrait avoir un effet bénéfique.

Je voudrais juste citer deux réactions intéressantes que j'ai reçues de lecteurs:

1. Ces démarches initiées par Jean-Paul II ont-elles abouti à un réel progrès de la paix dans les relations internationales au cours des deux dernières décennies?
Ces démarches ont-elles apporté aux communautés chrétiennes minoritaires, dans les pays musulmans particulièrement, un surcroît de sécurité et de tranquillité?
Ces démarches ont-elles freiné la guerre qui fait rage contre la vie et la famille (avortements, promotion de l'idéologie du genre, banalisation des perversions sexuelles...)?
Et je pourrais continuer en vous entretenant notamment de la guerre sourde menée quotidiennement dans mon pays, la Belgique, contre l'Eglise.
Dans le climat de relativisme et d'indifférentisme où la société vit aujourd'hui, j'ai peur que le signal donné à Assise soit un mauvais signal : celui d'un rassemblement de représentants de toutes sortes de religions et confessions qui semblent s'équivaloir et tenir un discours de paix que dément absolument le spectacle que le monde nous donne et auquel nombre de ces religions sont associées. "Les dieux des païens sont des démons" proclamait saint Paul. Cette proclamation semble se situer à l'opposé de ce que notre Eglise propose aujourd'hui et qui s'apparente plutôt à une espèce de message confusionniste "où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil".
Personnellement, je ne peux souscrire à cette initiative et elle me déçoit profondément.
(Y. W.)

A ce lecteur, dont les interrogations sont peut-être légitimes, je répondrais au moins qu'on ne peut pas être sûrs que ces démarches n'ont rien apporté. L'affirmer tient de l'uchronie : "imaginons ce qui se serait passé si Assise n'avait pas eu lieu"!! Nous n'en savons rien. Et en raisonnant ainsi, l'Eglise se retrancherait définitivement dans un ghetto intellectuel, social, politique, dans l'ombre des sacristies. Selon moi, une catastrophe! Et l'opposé de ce que souhaite le Saint-Père.

C'est ce que dit cette autre réaction, qui me paraît très originale, et très intéressante:

2. Il me semble que personne ne fait le rapprochement entre cette réunion interreligieuse et le tournant du pontificat : la création du conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation.
Pendant 5 ans, le Pape s'est occupé surtout des tradis, des anglicans et des orthodoxes. Aujourd'hui, il concentre son activité sur les autres religions et les païens...
(M.J.)

Je crois que c'est juste, et que c'est aussi la clé pour comprendre la béatification de Jean-Paul II. (Sur la béatification de Jean-Paul II )

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Andrea Tornielli a écrit cet article à ses amis et collègues de La Bussola, signataires de l'appel au Pape.
Je n'en retrancherai pas une ligne.
Texte en italien ici: http://www.labussolaquotidiana.it/... .
Ma traduction.

Pourquoi être avec le pape à Assise
Andrea Tornielli
14-01-2011
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Au début de l'année, Benoît XVI au cours de l'Angelus, a annoncé la convocation - avec sa participation - d'une rencontre mondiale des religions à Assise pour invoquer la paix, à l'occasion du vingt-cinquième anniversaire du premier rassemblement voulu par le vénérable (et bientôt bienheureux) Jean-Paul II en Octobre 1986.

Cette première réunion fut précédée et accompagnée de nombreuses polémiques. Certains cardinaux influents ont exprimé des doutes sur l'opportunité de la convoquer. Tandis que Mgr Marcel Lefebvre, à l'époque suspendu a divinis, mais pas encore excommunié, en appela à sept cardinaux, dont l'archevêque de Gênes Giuseppe Siri, en leur demandant d'arrêter le pape, qui selon lui persistait "à ruiner la foi catholique" tournant en dérision le Credo et le Décalogue, et définissant comme "abominable" le meeting inter-religieux (ndt: www.laportelatine.org/ ).

En cette occasion , pas par la faute du Pape, il y eut des bavures et quelques abus (mais tout n'est pas vrai, parmi ce qui circule et s'auto-reproduit sur le Web). Le discours de Jean-Paul II, à l'élaboration et à la révision duquel travailla celui qui était alors le cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, était clair. Bien que, comme Ratzinger lui-même l'a souligné plus d'une fois, il convient de prendre au sérieux les inquiètudes de ceux qui craignent que ces rencontres ne véhiculent l'idée que toutes les religions sont égales, qu'elles conduisent toutes de manière égale au salut.

Ces derniers jours, plusieurs historiens catholiques et journalistes proches de la sensibilité traditionnelle (ndt: il n'a pas écrit "traditionaliste") ont signé un appel au pape Benoît XVI publié dans le quotidien Il Foglio (Benoît XVI ira à Assise), reprenant ces préoccupations et ces doutes. Certains d'entre eux sont des collaborateurs appréciés de La Bussola. Ils demandent au pape de considérer les risques d'un tel événement, et se disent sûrs que quoi que Ratzinger dira ou fera à Assise, le message véhiculé par les médias sera celui - erroné - du syncrétisme religieux, d'une accolade périlleuse entre vérité et erreur qui met tout et tout le monde sur le même plan. Et il est clair que les perplexités exprimées par les signataires sont partagées par plus d'un dans l'Eglise.

Personne ne nie la possibilité de critiquer la décision papale sur la base de motivations de convenance, et on ne peut certainement pas dire que "l'appel d'Assise" est irrespectueux. Paul VI, Jean-Paul II et aujourd'hui Benoît XVI ont été soumis au sein de l'Eglise à des critiques et des dissidences autrement graves, souvent caustiques, et féroces. Cela dit, l'auteur de ces lignes a toutefois trouvé hors de propos les raisons invoquées dans la lettre ouverte au pape, et le fait que, malgré la longueur de l'appel lui-même, on y ait omis toute mention de la deuxième réunion des religions du monde à Assise, convoquée, toujours par Jean-Paul II en Janvier 2002 après les attentats contre les Twin Towers. (ndt: en réalité, il y a eu trois "rencontres d'Assise", Andrea Tornielli oublie 1993)

Venons-en d'abord aux motivations. Les signataires, pour convaincre le pape de repenser à Assise, dans l'espoir qu'il n'ira pas (bien que non explicite, c'est bien là le sens), avancent des raisons théologiques, citant des textes de Léon XIII et de Pie XI. De toute évidence plus que légitime, même si, selon moi, mal venu: l'effet obtenu - au-delà des intentions - est en effet de vouloir expliquer à un pape théologien, qui connaît très bien l'enseignement de ses prédécesseurs, les raisons pour lesquelles il devrait revenir sur une annonce déjà faite.

Il est hasardeux d'en appeler au pape pour lui expliquer qu'il ne doit pas prendre une initiative déterminée parce qu'elle n'est pas dans la ligne de son pontificat. Parce qu'au fond, c'est ce qu'on lit dans cet appel. On y dit au Successeur de Pierre que pour être en conformité avec son propre enseignement, il doit changer d'idée. Ce qui prouve l'existence de "ratzingeriens" qui se révèlent être, ou paraître, plus ratzingeriens que Ratzinger. En somme, l'initiative ne se limite pas à être la lettre soucieuse de gens demandant au pape d'éviter les risques une mauvaise interprétation, elle est susceptible au contraire d'être lue comme une volonté de dicter au pape sa ligne, pour l'empêcher de sortir du programme de son propre pontificat.

Ce qui signifie, en fin de compte, qu'on s'est fait une certaine idée de Benoît XVI qui ne correspond pas à la réalité, aussi parce que c'est le Pape lui-même - sans aucune pression ou suggestion de quiconque - qui a décidé de convoquer Assise III.

Nous arrivons au second point. C'est Jean-Paul II, peu avant son départ pour Assise en Janvier 2002, qui voulut avoir à côté de lui, le cardinal Ratzinger (ndt: cf La splendeur de la paix de François ). Lequel participa et écrivit à à son retour une profonde méditation sur la signification du geste et de l'expérience vécue (ibid).

"Il ne s'est pas agi - écrit le futur pape sur 30 Giorni - d'une auto-représentation de religions qui seraient interchangeables entre elles. Il ne s'agissait d'affirmer une égalité des religions, qui n'existe pas. Assise a été plutôt l'expression d'un chemin, d'une recherche, du pèlerinage pour la paix qui ne l'est que si elle est unie à la justice".
"Avec leur témoignage en faveur de la paix, avec leur engagemnt pour la paix dans la justice - écrit encore le cardinal Ratzinger" les représentants des religions ont entrepris dans la limite de leurs possibilités, un voyage qui doit être pour tous un chemin de purification".

Les amis et collègues qui ont signé l'appel n'ont présenté que les doutes et les risques, en évitant de mentionner les motivations du futur Pape. Cela vaut pourtant la peine de rappeler que dans le livre "Foi, vérité et tolérance", Joseph Ratzinger affirmait que même s'il y a toujours des "risques indéniables" d'incompréhension, "il serait tout aussi erroné de rejeter entièrement et sans condition, la prière multi-religieuse", laquelle doit être liée à des conditions précises et rester un signe "dans des situations extraordinaires, où, pour ainsi dire, s'élève un cri commun d'angoisse, qui devrait toucher le cœur des hommes et en même temps secouer le cœur de Dieu ".

On peut être en désaccord, on peut exprimer son inquiétude , mais on ne devrait pas ignorer ce que Ratzinger lui-même dit à ce sujet, expliquant la signification de ces gestes. En 2002, les bavures de 1986 ne se répétèrent pas, comme l'a récemment reconnu le supérieur de la Fraternité Saint-Pie X lui-même, Mgr Bernard Fellay (ndt: cf. www.summorum-pontificum.fr/) et le vénérable et bientôt le bienheureux Pape Jean Paul II, a voulu rassembler les religions pour ôter toute justification théologique à l'utilisation de la violence, à l'abus du nom de Dieu pour justifier le terrorisme.

À une époque où le choc des civilisations était présenté comme inévitable, il voulait indiquer le rôle des religions dans la construction de la paix. Depuis dix ans maintenant, il nous semble que sur la scène mondiale l'idée dominante est celle du conflit entre les religions et de l'exaspération de ce dernier, et pas de l'"accolade" syncrétique qui fait apparaître tous égaux et tous bons.

Attribuer aux rencontres d'Assise la responsabilité de la perte de la foi en Jésus Sauveur unique, faire valoir qu'à la suite de ces rencontres interreligieuses les gens en sont venus à considérer l'égalité de toutes les religions, nous semble objectivement injuste. Tout comme il est injuste d'attribuer au Concile Vatican II la crise de la foi qui a caractérisé les dernières décennies du siècle écoulé.

Le pape a indiqué cette année la liberté religieuse comme un moyen indispensable pour construire la paix, il y a quelques jours, il a rappelé qu'on ne peut nier "la contribution des grandes religions du monde au développement de la civilisation".
Le successeur de Pierre considère que l'humanité vit aujourd'hui un moment suffisamment difficile pour justifier les risques d'Assise III.

On peut ne pas être d'accord avec lui, mais il n'est pas juste de dire que le pape n'est pas d'accord avec lui-même. S'il y en a un dont on peut être sûr qu'il ne donnera pas prise à des malentendus, c'est bien Joseph Ratzinger, aujourd'hui Benoît XVI.

C'est à nous qui sommes en charge de l'information
, comme du reste plusieurs des signataires de l'appel, de faire passer le bon message sur cet événement.

La pourpre et le choeur (I) Assise, 25 ans après