Articles Images La voix du Pape Lectures, DVD Visiteurs Index Sites reliés Recherche
Page d'accueil Articles

Articles


Voyages 2011, en deux collages Liens Le Pape en Espagne Nicolas Sarkozy chez le Pape Synode pour le Moyen-Orient La luce del Mondo

Le Pape, le préservatif et les imbéciles

Une magistrale analyse de Massimo Introvigne (22/11/2010)

Massimo Introvigne n'est pas vaticaniste: il ne se livre donc pas à la course aux scoops douteux, et ne se prête pas au jeu romain des luttes d'influence (ou prétendues telles) au sein de la Curie.
Comme Messori (cf. Messori explique ce qu'a dit le Pape ), mais dans un style très différent, très scientifique, il prend le temps de la réflexon, et ses analyses (parmi les plus récentes, sur le voyage en Espagne, et sur l'exhortation apostolique Post-synodale Verbum Domini) sont en général exceptionnelles.
Ici, il nous livre une explication de texte magistrale des propos du Saint-Père.
Je n'oublie pas qu'au plus fort de la crise de pédophilie, il avait écrit un article mémorable sur les phénomènes de "panique morale", que j'avais traduit, et je ne crois pas non plus exagérer en disant que ce texte a fourni des "munitions", en France, aux meilleurs "avocats" du Saint-Père.
On peut compter sur lui.

J'avais donc traduit dimanche matin, en toute hâte, car cela me paraissait important, les "bonnes pages" publiée par l'OR (cf. La luce del Mondo ), où effectivement "prostituée" était au féminin. Une version rectifiée est ici: Le passage de "Luce del mondo" sur le préservatif

Je m'en veux de n'avoir pas compris immédiatement que le genre était le noeud de l'affaire. J'étais obnubilée par la colère - toujours mauvaise conseillère - car la radio que j'avais entendu annoncer triomphalement la nouvelle dès samedi 18 heures avait parfaitement compris que le Pape parlait des prostitués "mâles". Preuve qu'il leur arrive de dire des choses exactes, quand cela les arrange - quitte à les salire ensuite.
Massimo Introvigne renvoie dos à dos les associations gays, et les traditionalistes les plus mesquins. A ceux qui ont pu être (légitimement) troublés, parce qu'ils n'avaient pas compris, il propose un éclairage vraiment essentiel.

Le Pape, le préservatif et les imbéciles
Massimo Introvigne
http://www.cesnur.org/2010/mi_pre.html
---------------------
Du livre-interview du Pape "Lumière du monde" , il faudra parler en son temps, comme il le mérite.
Aujourd'hui, au contraire, nous parlons des imbéciles.
Depuis les associations gays jusqu'à certains soi-disant traditionalistes, tous à dire que le Pape a changé la doctrine catholique traditionnelle sur le contrôle des naissances. Des titres en neuf colonnes sur la première page. Les Nations Unies qui exultent. Les commentateurs qui expliquent comment le pape a admis qu'il est préférable que les prostituées se protégent contre les grossesses non désirées avec des préservatifs: donc, si nous commençons avec les prostituées, comment ne pas étendre le principe à d'autres femmes pauvres qui ne peuvent pas élever des enfants , puis progressivement à toutes?

Dommage, cependant, que - comme cela arrive souvent - les commentateurs se soient laissés aller à des commentaires sur la base de dépêches d'agence, sans lire la page entière consacrée à ce thème dans l'interviewe de Benoît XVI, qui pourtant fait également partie de l'anticipation adressée aux journalistes. Le Pape, à propos de la lutte contre le sida, a déclaré que la "fixation absolue sur le préservatif implique une banalisation de la sexualité", et que "la lutte contre la banalisation de la sexualité fait aussi partie de la lutte pour veiller à ce que la sexualité soit considérée comme une valeur positive". Dans le paragraphe suivant - en traduisant correctement le texte original en allemand - Benoît XVI a poursuivi: "Il peut y avoir un fondement dans le cas de certaines personnes, comme quand un prostitué utilise le préservatif (wenn etwa ein Prostituierter ein Kondom verwende), et ceci peut être un premier pas vers une moralisation, un début de responsabilité, sur le chemin de la reprise de conscience que tout n'est autorisé et qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut. Mais ce n'est pas vraiment la façon d'affronter le mal de l'infection du HIV. Cela ne peut être fondé que sur une humanisation de la sexualité"

Je ne sais pas si le volume italien qui va sortir traduira correctement "un prostitué", comme dans l'original allemand, ou rapportera - comme dans certaines anticipations journalistiques italiennes, - hélas aussi l'"Osservatore Romano" - "une prostituée".
"Prostituto", au masculin, est du mauvais italien, mais c'est l'unique traduction de "ein Prostituierter", et si on met le mot au féminin, la phrase entière du pape n'a plus de sens.
En effet, les prostituées femmes, n'"ulitisent" évidemment pas le préservatif: tout au plus, ce sont leurs clients qui l'utilisent. Le pape a en tête précisément la prostitution masculine, où, souvent, - comme le rapporte la littérature scientifique sur le sujet - les clients insistent pour que les "prostitués" n'utilisent pas de préservatifs, et où de nombreux "prostitués" - le cas de Haïti, longtemps paradis du tourisme homosexuel est criant - sont atteints du sida et infectent des centaines de leurs clients, dont beaucoup meurent. Certains pourraient dire que "prostitué" s'applique également aux gigolo hétérosexuels qui accompagnant les femmes moyennant paiement, mais l'argument est spécieux car c'est parmi les "prostitués" homosexuels que le SIDA est notoirement épidémique, sans compter qu'en allemand aussi, pour le "prostitué" masculin qui va avec les femmes on utilise couramment le mot "gigolo".

Par conséquent, une fois établi le fait que les grossesses n'ont rien à voir là-dedans, parce qu'il semble assez difficile que des enfants naissent de la prostitution homosexuelle, le Pape n'a rien dit de révolutionnaire.
Un "prostitué" qui a une relation mercenaire avec un homosexuel - en fait, quiconque a des rapports sexuels avec une personne du même sexe - commet du point de vue catholique un péché mortel. Si, toutefois, conscient d'avoir le SIDA, il infecte son client en étant conscient de l'infecter, en plus du péché mortel contre le sixième commandement (ndt: "tu ne commettras point d'impuretés"), il en commet un autre contre le cinquième ("tu ne tueras point") car il s'agit d'homicide, ou au moins de tentative. Commettre un péché mortel ou en commettre deux n'est pas la même chose, et même dans les péchés mortels, il y a une gradation. L'immoralité est un péché grave, mais l'immoralité unie à l'homicide l'est encore plus.

Un "prostitué" homosexuel atteint du sida, qui infecte systématiquement ses clients est un pécheur à la fois immoral et meurtrier. Si, pris de scrupules, il décide de faire ce qui - à tort ou à raison (la question de l'efficacité ou l'inefficacité du préservatif dans une relation homosexuelle n'est plus morale, mais scientifique) - lui semble réduire le risque de commettre un assassinat, il n'est pas devenu d'un seul coup une bonne personne, mais a fait un "premier pas" - certes insuffisant, et extrêmement partial - vers le repentir. De Barbe-Bleue (Gilles de Rais 1404-1440), on dit qu'il attirait les enfants, avait des relations sexuelles avec eux et ensuite les tuait. Si à un moment donné, il avait décidé de continuer à faire de mauvaises choses avec les enfants, mais ensuite, qu'au lieu de les tuer, il les avait laissé partir, cette "première étape" n'aurait pas été suffisante pour lui permettre de devenir une personne morale. Mais pouvons-nous dire que cela aurait été insignifiant? Certes, les parents de ces enfants auraient préféré les avoir en vie.

Donc, si un "prostitué" meurtrier, à un certain point, tout en restant "prostitué", décide de ne plus être meurtrier, ceci "peut-être une première étape".
"Mais - comme le dit le Pape - cela n'est pas vraiment la façon d'affronter le mal de l'infection par le VIH". Il faudrait plutôt arrêter de faire des "prostitués", et de trouver des clients.

La délicatesse du confesseur pour trouver des "routes humainement praticables" pour faire face aux cas pratiques les plus délicats de la doctrine catholique - qui toutefois ne change pas - en matière de contraception, évoquée par le pape dans une autre partie du livre-interview, n'a rien à voir avec le passage dont nous parlons sur le "prostitué". C'est le passage qui a été jeté dans les titres et a déclenché la spirale de commentaires hâtifs publiés avant de savoir de quoi diable on parlait.
Ici, cependant, où sont la nouveauté et le scandale si ce n'est dans la malice de certains commentateurs?
À cet égard, la palme du titre le plus absurde revient au premier jet de l'Associated Press, en version anglaise (heureusement corrigé ensuite, mais on peut encore le trouver indexé par Yahoo avec ce titre: "Le Pape: la prostitution masculine est admissible, à condition d'utiliser un préservatif". Seuls les imbéciles confondent Marrazzo (1) avec le Pape, même si tous deux vivent à Rome.

Note

(1) Piero Marrazzo, né en 1958 à Rome, est un journaliste et homme politique italien, gouverneur (Parti démocrate) du Latium de 2004 à 2009.
Titulaire d'un diplôme en philosophie du droit, il milite au cours de sa jeunesse pour le socialisme réformiste. Il devient ensuite un journaliste de télévision de premier plan, travaillant pour la Rai.
En novembre 2004, Piero Marrazzo quitte son emploi afin de briguer la présidence de la région du Latium, sous les couleurs de L'Unione, coalition électorale de centre-gauche. Lors des élections régionales de 2005, il est élu avec 50,7 % des suffrages. Le 24 octobre 2009, après la révélation de l'existence d'une vidéo dans laquelle il apparaît en compagnie d'un transexuel, il démissionne de ses fonctions.

La doctrine de l'Eglise n'a pas varié Plus simple, plus doux, plus sage...