Rechercher:

Pages spéciales:

Page d'accueil

Vatileaks

Rencontre des familles

Toscane

Accord avec la FSSPX

Anniversaires

Hier, jour de Pâques, le cardinal Vingt-Trois était l'invité de l'émission politique dominicale d'Europe 1. Madame Caroline P. en "invité surprise". Fragments (9/4/2012)

     



Hier, jour de Pâques, le cardinal Vingt-Trois était l'invité de l'émission politique dominicale d'Europe 1, interrogé par Elkabach, et deux de ses acolytes dont je n'ai pas retenu le nom.
Voir ici: http://www.paris.catholique.fr/
Je livre en vrac quelques réflexions:
* * *

On pourrait penser que c'est une belle initiative, et une preuve de bonne volonté, de la part d'une station aussi "laïque", d'inviter l'archevêque de Paris le jour où l'on célèbre la Résurrection du Christ. Encore aurait-il fallu qu'on lui laisse un tout petit peu annoncer la Bonne Nouvelle. Or, cela ne rentrait en rien dans les intentions des trois larrons, qui entendaient bien mettre le cardinal au banc des accusés, le sommant de s'expliquer sur plusieurs sujets que je vais évoquer rapidement, cherchant à le pousser à la faute, voire au dérapage, pourquoi pas sur l'islam (c'est bon pour l'auto-promotion) et surtout, essayant de l'instrumentaliser contre leur fantasme récurrent, le Front National.
Qu'on ne vienne pas me dire que c'est le jeu de la démocratie. Car il est clair qu'elle est ici confisquée au profit de certains, et que la liberté religieuse au sens que lui donne le Pape a été foulée aux pieds.
Le Cardinal Vingt-Trois est un homme calme, sage, il porte en lui la conviction que lui donne sa foi, et il m'arrive d'éprouver de la sympathie pour lui, mais il n'a pas l'étoffe d'un martyre (enfin, je ne crois pas, et de toutes façons, je suis mal placée pour le lui reprocher) et tout en tentant de repousser pied à pied les attaques (c'est ainsi que je l'ai perçu), il n'a pas vraiment "osé" répondre: on peut le regretter.

- Alors que les immans et les rabbins nous jouaient à Toulouse un remake de la pièce de Labiche "Embrassons-nous Folleville" (c'est moi qui le dis...): "Où étiez-vous, où étaient les catholiques?" commence par demander sévèrement le procureur Elkabach. Tout au plus le cardinal a-t-il pu répondre que l'Eglise était représentée par l'Archevêque de Toulouse. Excusez du peu, mais apparemment, cela ne suffisait pas.

- L'Eglise est contre le mariage gay, alors que c'est un progrès évident dans l'intérêt de la Société. Le cardinal répond plutôt finement, laissant provisoirement ses agresseurs sans voix: "vous aurez beau faire, vous ne pourrez jamais faire d'enfants". Le "vous" m'a paru particulièrement savoureux.

- Un autre sujet abordé, c'est la parité au sein de l'Eglise. Et nos trois compères de "porter" les revendications (hautement représentatives du catholique de base, comme chacun sait) du "Comité de la Jupe", dont on sait qu'il a été constitué à la suite d'une sortie humoristique du cardinal que les sufragettes du parvis emmenées par Mesdames Pedotti et Soupa ont interprétée comme une charge contre leurs capacités intellectuelles - c'est elles qui voient, elles ont sans doute leurs raisons. Il est sommé de s'expliquer sur le non-accès des femmes au sacerdoce, et l'atteinte contre la dignité des femmes dont sont coupables toutes les religions, y compris les catholiques. Là, l'attaque était tellement caricaturale que ses arguments ont été vraiment faibles. Il aurait pu citer les propos de Benoît XVI lors de la messe chrismale, trois jours plus tôt, " sur la question de l’Ordination des femmes, à propos de laquelle le bienheureux Pape Jean-Paul II a déclaré de manière irrévocable que l’Église, à cet égard, n’a reçu aucune autorisation de la part du Seigneur".
Un point à son actif, cependant, puisqu'il est interrogé par trois représentants de la gente masculine: "il n'y a pas beaucoup de femmes parmi les commentateurs". On lui apporte un démenti... peu convaincant, car à Europe 1, les femmes sont certes nombreuses, mais réduites à des rôles subalternes. Quand on voit le niveau, on se dit que ce n'est pas plus mal.

Elkabach contre-attaque, et le grossier personnage ose dire: "Nathalie Artaud, la candidate Lutte Ouvrière aux présidentielles a proposé la prison pour les patrons d'entreprise qui ne respecteraient pas la parité hommes/femmes. Ne faudrait-il pas étendre cette mesure aux dirigeants de l'Eglise?". "On peut aussi rétablir la terreur" rétorque (trop?) calmement le cardinal.

- A un autre moment, on aborde le fait que parmi les candidats, certains vivent en union libre. Le but est sans aucun doute celui de présenter l'Eglise comme intolérante, éloignée de la vie des "vrais gens". Là, le cardinal Vingt-Trois s'en sort plutôt bien. Après avoir constaté qu'il serait surprenant, du point de vue statistique, que le monde de la politique ne reflète pas la société, il botte en touche - pour employer le vocabulaire sportif que les journalistes affectionnent. En gros, je cite de mémoire, si on n'est pas capable de gérer sa vie privée, comment pourra-t-on prétendre gérer un pays?

....

Le meilleur (ou le pire) était pour la fin.
Elkabach (au nom de qui, à quel titre?) interroge le cardinal sur deux inquiètudes pour l'Eglise.
- D'abord, pour les chrétiens d'Orient. Sans doute est-elle justifiée - à défaut d'être sincère - et nous le remercions pour sa sollicitude, mais les chrétiens d'Orient aimeraient mieux quelle se traduise concrètement.
- Nous le remercions beaucoup moins, en revanche, pour celle concernant la santé du Pape. Là, Elkabach a cité "mon éminente consoeure, généralement très bien informée sur les choses du Vatican, Caroline Pigozzi" (si tout le reste est aussi vrai!!!). Et nous avons eu droit au déballage détaillé de tous les commérages révoltants que j'ai déjà évoqués dans ma "Lettre à Madame P" à se demander s'il ne s'agissait pas d'une attaque croisée concertée - n'oublions pas que Paris-Match et Europe 1 font tous deux partie du groupe Lagardère. Et là, je suis obligée de dire que la réponse du Cardinal n'a pas été à la hauteur. Il aurait dû (et pu!!) corriger la "consoeure" d'Elkabach. Il a certes manifesté une indignation convenable contre les soupçons de manoeuvres électoralistes de la part des cardinaux en vue d'un prochain conclave, mais sur la santé du Pape, il s'est contenté de platitudes sur son âge. Il aurait pourtant été facile d'observer que Caroline Pigozzi n'est pas du tout "bien informée" mais bien plutôt "désinformatrice", et surtout de répondre qu'il n'avait pas l'habitude d'écouter les rumeurs de caniveau.

- L'émission s'est terminée par des considérations sur les finances de l'Eglise, et sa mise en faillite éventuelle: de quoi j'me mêle?

* * *

Au final, on peut se demander à quoi sert, pour un dirigeant de l'Eglise, de répondre à ce genre d'invitation.
A aucun moment, le Cardinal n'a fait entendre la voix de l'Eglise ou le message de l'Evangile. Déjà parce qu'il n'a pas pu le faire - qu'il ne le peut pas (les lois liberticides n'y sont pas étrangères), et c'est vrai, il faudrait un certain courage, mais après tout, le risque est d'être excommunié par l'univers médiatique, ce n'est pas si grave, c'est même un bien, et Benoît XVI a suffisamment donné l'exemple. Il n'avait pas le contrôle des questions, et s'il avait tenté de s'écarter du schéma prévu, les autres l'auraient interrompu - grossièrement, au besoin, lorsque l'on s'adresse à un cardinal, l'insolence est de bon aloi. Il n'a même pas défendu la vie de façon explicite (je n'ai rien entendu sur l'avortement, c'était pourtant le moment de faire entendre sa voix sur la question) , se contentant de renvoyer à son dernier livre, "Quelle société voulons-nous?" , que peu de gens ont lu, ou liront, sans doute, parmi les auditeurs d'Europe 1.
Il a tout juste servi de faire-valoir (ou de repoussoir) aux idées de ses contradicteurs. Et il n'a même pas pu leur répondre ce qui est quand même une évidence, à propos de sujets comme l'ordination des femmes, ou les finances de l'Eglise: de quoi vous mêlez-vous?

Bref, une occasion manquée.
Mais c'était prévisible.