Réaffirmation du "leadership" de Benoît XVI
Le vaticaniste du Corriere della Sera en récapitule les dernières manifestations - particulièrement spectaculaires (30/6/2010)
"Vous verrez, ce Pape surprendra", avait-on lu ici et là en avril 2005. Et de citer le Pape Jean XXIII, élu lui aussi à un âge avancé, qui avait ouvert la "grande aventure" de Vatican II.
Un grand pontificat s'annonce, disaient d'autres, qui le connaissaient mieux, ses proches collaborateurs de la CDF, comme Mgr Amato, ex-secrétaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Il est certain que Benoît XVI n'a pas surpris, dans le sens où certains l'attendaient. Pas plus qu'il ne s'est révélé.
Peut-on dire pour autant qu'il s'est affirmé? Pas davantage: il est lui-même - et en plus, le Pape, tout simplement.
En cette veille de période estivale, c'est-à-dire de pause pour tout le monde, y compris pour lui, le Saint-Père témoigne donc d'une intense activité, qui n'est pas frénésie mais acte raisonné de gouvernement.
A tous ceux qui prétendent qu'il est las, vieilli, ballotté par les évènements, jouet de la Curie (voir l'épisode de la proclamation manquée du curé d'Ars comme patron de tous les prêtres du monde: Fin de l'année sacerdotale ), il prouve, et de quelle façon, que c'est lui le chef: on avait déjà eu droit au même scenario en décembre, et après la nuit de Noël, l'incroyable sang-froid avec lequel il avait fait face à l'agression d'une furie durant la messe de minuit avait mis un terme provisoire aux méchantes rumeurs.
Cet article de Gian Guido Vecchi, le vaticaniste du Corriere della Sera, fait une excellente synthèse des derniers évènements, dont certains n'ont pas été suivis dans ces pages, faute de temps.
Benoît XVI affirme bel et bien son "leadership", autant que sa puissance intellectuelle et sa personnalité hors-normes.
C'est un Pape combattif, et jeune, comme l'Eglise qu'il conduit.
Je viens de lire sur un blog catholique un excellent commentaire qui résume bien ma pensée, et que je me permets de reproduire ci-dessous (1).
Du théologien au timonier
Ratzinger à propos des cardinaux "Moi seul peux les accuser"
Gian Guido Vecchi
Texte ici.
Ma traduction
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Les scandales , les polémiques, les divisions. Mais , au-delà, "l' éclipse du sens de Dieu" dans les sociétés de vieille tradition chrétienne .
"Les défis d'aujourd'hui sont certainement au-delà des capacités humaines", murmure le pape dans la basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs (cf: L'Occident, terre de mission ... ) .
Pourtant , dit-il , aux apôtres qui "expérimentaient leur impuissance" Jésus "a démontré qu'avec la foi en Dieu rien n'est impossible".
C'est une journée intense pour Benoît XVI .
Le matin, il a convoqué une "réunion de clarification" entre le cardinal Angelo Sodano et le cardinal Christoph Schönborn de Vienne(cf: Fin de jeu pour le cardinal Schönborn ) , qui avait accusé l'ancien secrétaire d'Etat d'avoir offensé les victimes de prêtres pédophiles , avec beaucoup de "regrets" exprimés par Schönborn et un communiqué de la salle de presse du Saint-Siège soulignant que "dans l'Église , quand il s'agit d' accusations contre un cardinal, la responsabilité en incombe uniquement au Pape .
Puis, il a fait rédiger une une "note pour protéger la réputation de la Congrégation d'évangélisation des peuples", ex Propaganda Fidei (cf http://www.oecumene.radiovaticana.org/.. ) suite aux enquêtes mettant en cause, entre autre, le cardinal Sepe.
Et maintenant , dans la basilique , annonçant la naissance du Conseil Pontifical pour la «nouvelle évangélisation» de l'Occident ( demain sera rendue officielle la désignation en tant que président de l'archevêque Rino Fisichella ) , Benoît XVI a rappelé " le programme de mise en œuvre du Concile" de Paul VI, l'élan missionnaire de Wojtyla et les mots qu'il prononcés au début de son pontificat , " l'Eglise est jeune , ouverte à l'avenir" (Cf: L'Occident, terre de mission ...) .
Après quoi, il a ajouté solennellement : « Je le répète aujourd'hui, près du tombeau de saint Paul , l'Eglise est dans le monde une force immense de renouvellement, non pas par sa force , mais par la force de l'Evangile ".
Dans les sphères élevées du Saint-Siège , après la lettre du pontife (cf: Le Pape à Mgr Léonard ) pour "déplorer" les "modalités" de la descente de police contre les évêques de Belgique et en même temps confirmer que "la justice doit suivre son cours" , ils l'avaient dit: le Pape se prépare à lancer " un message très fort. "
A commencer par le plus évident: n'en déplaise au cliché qui veut le pape théologien enfermé dans son appartement à jouer du piano et à l'écart des problèmes ou ébranlé par eux , Benoît XVI " a pris plus que jamais la situation en main" et gouverne "sûr et tranquille" :il suffit de voir les nominations à la Curie de mercredi ( le cardinal Marc Ouellet président de la Congrégation pour les évêques , Mgr Kurt Koch à la tête le Conseil pour le dialogue entre les chrétiens et les juifs cf: Le Suisse Romain) et aussi la mission du Secrétariat d'Etat à Cuba (cf: Certains s'agitent...) , les succès diplomatiques avec la Russie et le Vietnam et l'attention à l'Orient: justement hier, sur le site du Vatican ont été publiés en chinois des documents du Concile, après la Bible , le catéchisme et le droit canon .
Du reste, il suffit de regarder comment il a affronté l'affaire Schönborn: "une affirmation très ferme de la primauté de Pierre " , dit-on de l'autre côté du Tibre.
Au beau milieu des polémiques sur les prêtres pédophiles, à Pâques , le doyen du Collège des cardinaux Angelo Sodano avait adressé un salutat public et inhabituel au Pape (cf http://benoit-et-moi.fr/2010-I/...) : " Il est avec vous, le peuple de Dieu, qui n'est pas impressionné par les bavardage" . Et le cardinal de Vienne l'avait attaqué (cf. A quel jeu joue le Cardinal Schönborn? ) en parlant aux journalistes d'une "pesante offense aux victimes d'abus", faisant allusion "indirectement" - selon la presse autrichienne - au rôle que l'ancien secrétaire d' Etat aurait eu pour étouffer l'enquête sur le cardinal Hans Hermann Groer , le prédécesseur de Schönborn à Vienne.
Après des rumeurs jamais confirmés d'une lettre du Pape à Schönborn , le cardinal a été reçu hier en audience par le Pape: une rencontre qui a été rapportée en détail , ce qui est très inhabituel. Le cardinal, lit-on "a voulu clarifier le sens exact de ses récentes déclarations sur certains aspects de la discipline ecclésiastique - c'est-à-dire l'ouverture sur le célibat des prêtres, à de multiples reprises défendue et louée par le Pape - ainsi que certains jugements sur l'attitude tenue par le Secrétariat d'État, en particulier par le secrétaire d' État du pape Jean-Paul II de vénérée mémoire , à l'égard du regretté cardinal Hans Hermann Groer , archevêque de Vienne, du 1986 à 1995" .
A ce moment, sont arrivés également Sodano et le secrétaire d' Etat Tarcisio Bertone, et le fameux face à face voulu par le Pape pour "clarifier et résoudre les malentendus largement diffusés". Et Schönborn a exprimé "son regret" pour les "l'interprétations données".
C'est à cet endroit que la note du Saint-Siège précise deux points : d'abord , que "seul le Pape" a la "compétence" en matière d'accusations contre les cardinaux , "les autres instances peuvent avoir une fonction consultative , toujours dans le respect pour les personnes" et, deuxièmement, que le mot "bavardage- chiachiericcio" a été "mal interprété" et que le Cardinal Sodano a pour les victimes "les mêmes sentiments de compassion et de condamnation du mal" exprimées par le Pape
Benoît XVI , en somme, a voulu que les deux parties s'expliquent pour clore la question, ce sont des temps difficiles et ce n'est pas le moment de se diviser entre "lignes": l'unique ligne, c'est celle du Pape et c'est lui, dans ce cas , qui corrige.
© Copyright Corriere della Sera , 29 Juin 2010
Note (1)
Notre Pape est d'un dynamisme et d'une jeunesse!!
Et dire que beaucoup croyaient (espéraient) y voir un Pape de transition...Que j'aime ces desseins de Dieu qui nous prennent toujours à contre-pied: ce vieil homme timide et discret, à la voix fragile, au geste hésitant, est un titan,oui, qui confond les sages et les grands de ce monde; ce pianiste retraité à la silhouette frêle taille à grands coups de hache le visage de l'Eglise de demain; ce théologien étiqueté traditionnaliste rigoureux, qui sous-pèse avec une minutie d'horloger suisse chacun de ses mots, montre une audace et une liberté déconcertantes, embourgeoisant les portraits de nos idoles révolutionnaires; tout cela pour davantage encore servir l'humanité. Quel miracle permanent que l'Eglise du Christ! Vive la naissance de ce Conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation: je vais fêter ça, oui!
