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J'ai traduit trois articles italiens qui, loin des ragots, mettront peut-être du baume au coeur de tous ceux qui aiment le Saint-Père (26/5/2012. Mise à jour le 27)

Il y a Marco Tarquino, le directeur de l'Avvenire, qui dit l'essentiel, en peu de mots très émouvants, Vittorio Messori qui s'est (au sens propre du terme) retiré dans un couvent pour mettre la dernière main à son livre sur Sainte Bernadette, , et qui juge (donc) les choses avec une hauteur de vue rafraîchissante, et Angela Ambrogetti, qui se demande avec nous "pourquoi a-t-il fait cela?".


Marco Tarquino


Notre affection pour le Pape
Quelqu'un, et nous tous
http://www.avvenire.it/Commenti/Pagine/qualcuno-a-noi-tutti.aspx

Aujourd'hui, nous disons sur cette première page d'une douleur et d'un péché. Et peu de choses au monde doivent être manipulées avec autant de pudeur et tout autant de délicatesse.
La douleur est grave et profonde, parce que c'est celle de notre Pape et de tous ceux qui l'aiment. Le péché est grave, parce que cette fois encore - comme toujours, mais plus que les autres fois - il est un signe amer et sombre de division, de présomption, de dissimulation, ou au contraire, il souligne l'abandon à une logique maligne.
Nous savions depuis des mois que quelqu'un, parmi ceux qui par leur travail et leur service lui sont les plus proches, trahissait misérablement la confiance du Saint-Père.
Nous savions que quelqu'un fouillait dans sa correspondance, dans ses papiers. Nous savions que quelqu'un en était venu à donner à d'autres gens des documents du pape. Et nous savions que quelqu'un avait fait en sorte qu'ils soient publiés. Aujourd'hui, nous savons que quelqu'un a été trouvé en possession de documents confidentiels. Nous ne savons rien de plus, pas plus que nous ne savons quelque chose - peu importe ce qui, hier, a été condamné et écrit - de "corbeaux" et autres animaux de gros titres de journaux et de télévision.

Mais nous savons que la douleur du pape Benoît XVI est une douleur lente et longue, comme lente et longue est la douleur de toute trahison révélée. Pas l'unique douleur, ni la la plus grande, que le Pape porte sur lui, lui qui chaque jour vit la Croix - et comme il sait nous le dire, et comme il nous le prouve - acceptée comme "lieu authentique" du Vicaire du Christ.
Et alors, et encore, nous lui sommes tous proches. Avec simplicité, dans la prière, avec la pauvre et tenace fidélité de notre affection de fils.

* * *

Vittorio Messori


«L'habituel nid de vipères. Mais maintenant, le vrai problème, c'est la médiocrité croissante»
Le commentaire de Vittorio Messori
Michele Brambilla
http://vaticaninsider.lastampa.it/

«Cela fait toute une vie que je fréquente l'histoire de l'Église et, quoique rarement, aussi l'Eglise. Imaginez donc si je me scandalise!».
Vittorio Messori est dans l'Abbaye de Maguzzano, une merveille entre les collines morainiques et le lac de Garde, qui a traversé l'histoire de l'Église depuis quinze siècles, de Saint-Benoît à Don Calabria. Ici Messori s'est trouvé un bureau dans lequel il se retire lorsqu'il est sous pression, comme aujourd'hui, puiqu'il lui reste quelques semaines pour livrer à son éditeur (Mondadori) le livre sur Lourdes auquel il tient beaucoup. Il s'intitule «Bernadette ne nous a pas trompés».

Mais y a-t-il quelqu'un qui nous trompe au Vatican?
Je demande à Messori ce que peut éprouver un catholique pratiquant en apprenant la nouvelle de cardinaux qui s'entre-tuent, de dossiers remis à des journalistes sous la table, de lettres dérobées au pape, d'intrigues bancaires, d'assassins enterrés avec tous les honneurs.
«La curie romaine», répond-il, «a toujours été un nid de vipères. Mais autrefois, au moins, c'était l'organisation d'Etat la plus efficace au monde. Elle administrait un empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais, et avait une diplomatie à l'avenant. Aujourd'hui qu'est-ce qui reste? ».

Se promenant dans le cloître, puis parmi les oliviers, Messori explique la décadence:
«Les ecclésiastiques de la Curie romaine enrôlaient les meilleurs éléments de tous les diocèses du monde. Les évêques avaient pléthore de clergé, et n'avaient aucune difficulté à les leur céder. Aujourd'hui, les séminaires sont fermés, ou sont à moitié vides. Ainsi, si un évêque a quelque prêtre valable, il se le garde. Et le pape est comme Charles Quint, qui administrait un empire sans limites et dans l'Espagne dépeuplée criait: «Donnez-moi les hommes».

- Mais en Afrique, essayé-je d'objecter ...
«Le boom des vocations? Je ne me fais pas d'illusions. En Afrique, on va au séminaire pour les mêmes raisons pour lesquelles on y entrait ici, quand on mourait de faim. Une façon de gagner sa vie. Et puis dans la culture africaine, le célibat est incompréhensible, c'est pourquoi l'Église, disons les choses ainsi, ferme un œil. Il y a beaucoup de prêtres avec femmes et enfants. Que faites-vous, vous les envoyez à Rome? Pour être évêque? ».

Il poursuit: «Le déclin qualitatif est évident. Il n'y a même plus de latinistes à la hauteur. Lorsque Luciani (JP 1er) a été élu pape, on a dû bloquer les rotatives de l'Osservatore Romano, car il y avait une erreur en latin dans le titre de la première page. Même dans les encycliques récentes de Jean-Paul II, il y a des erreurs en latin, pensez un peu».

En somme, pour l'homme qui a écrit deux livres avec les deux derniers Papes, cette boîterie de l'Église dépend de la médiocrité de son personnel.
Mais est-ce seulement une question d'incapacité? On semble être ici en face de rancoeurs, de rivalités, de cupidité, de méchanceté, d'infidélité.
«La mesquinerie méchante est souvent la marque de personnalités médiocres. Quelqu'un qui est fort n'a pas besoin de cirer les chaussures (ndt: je n'ose pas dire "cirer les pompes", mais c'est bien l'idée) des autres pour arriver».

- Reste le scandale, et Jésus a dit: «Malheur à celui par qui le scandale arrive». Y a-t-il de quoi perdre la foi?
«Non, le chrétien connaît bien la distinction de Maritain entre la Personne de l'Église, qui est sainte, et le personnel de l'Église, qui, comme toute institution humaine est marqué par la limite, par le péché de chacun de nous. L'important est que l'Église annonce l'Evangile. Si en plus celui qui l'annonce est saint, rendons grâce au Tout-Puissant. Si c'est une fripouille, tant pis: il est toujours le gardien de la grâce».

- Mais aujourd'hui, les fripouilles ne sont-elles pas un peu trop nombreuses, et trop hauts-placées?
«Le clergé du bas Moyen Age, de la Renaissance, ou les évêques poudrés du XVIIIe siècle étaient bien pires. Et n'oublions pas une chose: aujourd'hui, le personnel est décadent, mais la qualité du sommet n'a jamais été aussi élevée. Depuis l'époque de Napoléon, tous les papes ont été canonisés, ou méritent de d'être. Il n'en a pas toujours été ainsi».

Il me salue avec ces mots qui expliquent sa sérénité: «Jésus l'avait annoncé: "Le Fils de l'homme sera placé dans les mains des hommes et ils en feront ce qu'ils voudront". Il l'a dit, mais de nombreux exégètes et de nombreux mystiques voient dans ces mots, non seulement la prophétie de la Passion, mais aussi de ce qui arriverait après. C'est pourquoi je ne suis pas étonné de voir les scandales. Le Dieu des chrétiens a voulu avoir besoin des hommes. Avec toutes les conséquences qui en découlent».

* * *

Commentaire (mise à jour)

Je me permets d'ajouter ce petit commentaire, auquel je tiens beaucoup.
Pas plus que Vittorio Messori, je n'ai d'inquiètude pour l'Eglise. Elle en a vu d'autres, et je n'ai aucun doute qu'elle se remettra de cette affaire qui au fond n'est pas si terrible à l'échelle de son histoire bimillénaire. Par contre, à titre personnel, je suis très inquiète pour le cher Saint-Père.
Même après avoir lu ce beau (pour une fois!) commentaire du cardinal Martini qui, interrogé par le journal www.unionesarda.it a eu cette réponse:
Etre trahi et vendu a été une expérience de Jésus, cela ne pouvait pas ne pas être aussi une expérience du Pape...
Et Benoît XVI ne peut pas ne pas y avoir pensé.
(mise à jour du 27/5)

Angela Ambrogetti


Un serment sacré trahi; et nous ne savons pas pourquoi

Angela AMBROGETTI
Samedi 26 mai 2012
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Dès que j'ai entendu le nom de celui qui avait transmis les papiers du Pape et de son secrétaire à la presse, j'ai eu un sursaut. Paolo Gabriele habitait à quelques mètres de ma maison, jusqu'à ce qu'il déménage au Vatican. Récemment, je l'ai rencontré à la messe du dimanche avec sa famille, au supermarché, nous avons même échangé quelques mots à propos des vacances d'été, et bien sûr, je l'ai vu lors des "pool" dans la bibliothèque du Pape, quand les journalistes sont autorisés à suivre la partie publique d'une rencontre du Pape avec un chef de l'Etat. Connaissance superficielle, bien sûr, mais cela suffit pour me poser la question: pourquoi?
Si les enquêtes confirment sa responsabilité dans le vol des documents, la chose la plus difficile à comprendre, c'est précisément la raison de son acte. Paolo Gabriele ne semble pas être un 007 de pacotille. Il a vécu à Borgo Pio (ndt: la rue commerçante contigüe au Vatican), il a fréquenté le lycée professionnel du secteur, et là, il a rencontré sa femme. Trois enfants, lié à la paroisse de Sainte-Anne, ami de beaucoup de gens du quartier. Voilà, certains disaient: un peu trop ami de tout le monde. Quand on est dans sa position, on ne devrait pas trop parler parce que parfois, même involontairement, on peut laisser sortir des informations convoitées. Et il y en a qui pourraient penser à vous utiliser.
C'est une tâche difficile d'être aux côtés d'un Pape tous les jours. Ils en sont bien conscients, ses prédécesseurs qui fréquentent encore le Vatican. Tous les employés du Saint-Siège, même dans postes beaucoup moins sensibles, doivent tenir le serment qu'ils ont fait quand ils sont entrés en service.

Dans le réglement de la Curie, il est écrit à l'article 36: «Tous sont obligés de respecter strictement le secret professionnel. Ils ne peuvent donc donner à quiconque non autorisé aucune information concernant des actes ou des nouvelles dont ils ont eu connaissance à la suite de leur travail» et à l'article 40: «Il est interdit d'emporter des documents originaux, des photocopies, des copies électroniques ou autres documents d'archives et de travail concernant l'Office, et de conserver hors du bureau des notes privées sur les questions qui sont traitées dans les dicastères».
Et le serment, après la récitation du Credo, se poursuit ainsi:
« Je m'engage en outre, et je promets solennellement de remplir loyalement les fonctions qui m'ont été confiées dans cet Office, et d'observer strictement la confidentialité inhérente à la charge; je promets aussi de ne pas solliciter ni accepter d'offres comme indemnisation, même si elles sont présentés sous la forme d'une donation. Que Dieu m'y aide et ces saints Évangiles que je touche de mes mains».

Voilà, quelqu'un qui fait ce serment, pourquoi ensuite trahit-il le Pape et lui-même?
Qui a fait croire à Paolo Gabriele qu'il faisait la chose juste, et pourquoi?
Qui a besoin d'utiliser quelqu'un (qui de toutes façons s'est laissé utiliser) pour soutenir la thèse selon laquelle la Curie est ingouvernable?
Parce que c'est cela, l'opération en cours. L'aide de chambre qui tous les jours porte le manteau du Pape, l'accompagne lors des voyages, le suit à chaque instant, pourquoi décide-t-il que le trahir est une bonne chose? Certes, ceci n'est que la première partie d'une enquête qui permettra aux cardinaux Herranz, Tomko et De Giorgi d'arriver à celui (ndt: ou ceux) qui a rempli la tête de Gabriele d'idées fausses.
Paolo, ou Paoletto, comme beaucoup l'appelaient dans le quartier, est tombé dans un piège d'enfer, au sens strict du terme. Mais il est important de comprendre qui l'a tendu.
Un journaliste à la recherche d'un scoop facile? (On sait que les secrets du Vatican font toujours recette).
Ou quelqu'un qui, de l'intérieur du Vatican, a manoeuvré pour le convaincre que voler et trahir étaient la «chose juste»?
Mais pourquoi? Ou peut-être qu'il y a une «conjuration de palais» ourdie par des mécontents et des mauvaises langues qui pensent ainsi changer les choses? Et ensuite? Dans l'introduction du livre «Sua Santità» il y a un rocambolesque récit d'histoire d'espionnage qui aujourd'hui apparaît encore plus risible. Si en effet c'est vraiment Paolo Gabriele qui a fait sortir les documents, il était très facile de le rencontrer dans n'importe quel bar de Rome, sinon du Borgo Pio (ndt: donc aux portes du Vatican, mais à l'extérieur).
Personne n'est "filé"; simplement dans une vie «villageoise» comme celle du quartier du Vatican, tout le monde sait tout sur tout le monde. Et Gabriele, il suffisait de le rencontrer pendant les vacances d'été, ou lorsqu'il accompagnait ses enfants à l'école. S'il a été suivi, c'est parce qu'on soupçonnait quelque chose.

Il est évident que l'auteur de ces lignes sait peu de choses de la vie du Vatican.
Et que celui qui a sorti les papiers savait pertinemment qu'il faisait quelque chose de mal.
En réalité, les «papiers secrets» sont de peu de valeur. N'y est révélé aucun «scandale», on y voit tout au plus quelques misères humaines, mais aussi de la transparence dans l'agir (comme les dons virés par le Pape à la Fondation Joseph Ratzinger pour des bourses d'études en faveur de 4 femmes. Bien sûr, il faut savoir ce qu'est la Fondation!). Les chiffrages du service diplomatique? Administration normale du travail diplomatique phénoménal du Saint-Siège. Rapports de l'autorité judiciaire? Idem. Fax, mémos, dossiers? Administration normale du bureau d'un chef de l'Etat. Des documents pour lesquels aucun droit à l'information ne justifie une publication inconsidérée. Alors pourquoi était-ce si important de les faire sortir, et de les publier?

Personnellement, je pense que le motif est de montrer que la Curie est dans la confusion. Et à lire certains journaux, il semble que le plan ait réussi. Beaucoup de gens pensent que c'est vrai. Moi, je ne le crois pas. Les enquêtes ont été menées rapidement et de manière confidentielle. Et elles ne sont pas finies. La Curie poursuit son travail quotidien, quoique dans la douleur et la consternation. Et même le Pape suit son agenda. Certes, cela n'aura pas été facile pour lui de découvrir le mensonge qui vivait dans sa maison. Restent la douleur et l'amertume. Le moment est horrible, la boue impressionnante, et surtout pour l'aspect humain de l'histoire. Et du reste, malheureusement, ce n'est même pas une nouveauté que de l'intérieur de l'«appartement» sortent des documents confidentiels. Rappelez-vous de la photo de Pie XII sur son lit de mort. C'est son archiâtre, Galeazzi Lisi, qui l'a diffusé à la presse. Une vilaine histoire, qui remonte à de nombreuses années, une double trahison: le Pape et le serment d'Hippocrate.