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Nouvelles d'Allemagne (I)


Benoît XVI/ Merckel: Le réveil du Kulturkampf. Un très bon article d'Edourd Husson dans Marianne 2 (9/2/2009)
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Note: Le Kulturkampf, ou « combat pour la culture », est un conflit qui opposa le chancelier du Reich Otto von Bismarck, à l’Église catholique et au Zentrum, le parti des catholiques allemands, entre 1871 et 1880 (wikipedia)

Je suis agréablement étonnée de lire sur Marianne 2 une contribution qui, si elle ne vient pas de "notre" côté, n'en est pas moins fine et intéressante, beaucoup moins caricaturale que ce qu'on a lu et entendu partout ces jours-ci.
Comme quoi, pour juger des évènements, il faut connaître un peu l'histoire.

Sans négliger la part du cynisme électoral et les simples concessions aux sondages, l'article d'Edouard Husson donne une clé géopolitique pour comprendre l'attitude de Merckel: il s'agit rien moins que d’abandonner ostensiblement les fondements la politique étrangère chrétienne-démocrate de l'après-guerre.
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En suivant les sondages, Madame Merkel a encore détruit l’un des points d’ancrage de l’Allemagne d’après-guerre. Ce faisant, elle reprend le flambeau de la Réforme et du Kulturkampf. Elle renonce au troisième partenariat fondamental de la CDU depuis les années 1950 : celui, tacite, passé avec le Saint-Siège.
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(..) en renonçant au triangle magique de l’insertion allemande dans la diplomatie internationale depuis Adenauer (Washington, Paris, le Vatican), Madame Merkel brouille les repères.



Ma semaine allemande : un tremblement de terre
Samedi 07 Février 2009
Edouard Husson
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Merkel joue Pékin contre Paris et Washington, demande à Benoît XVI de faire repentance… En renonçant au triangle magique de l’insertion allemande dans la diplomatie internationale (Washington, Paris, le Vatican), elle brouille les repères.

Le choix du « libre-échange » contre l’Europe
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En l'espace d'une semaine, Madame Merkel vient d’abandonner ostensiblement les fondements la politique étrangère chrétienne-démocrate de l'après-guerre. En recevant le Premier ministre chinois, elle a assuré à celui-ci que l’Allemagne avait le même intérêt que la Chine à préserver le « libre-échange » (en fait l'échange asymétrique fondé sur l'inéquité salariale que la Chine garantit aux entreprises du monde); autant dire qu'elle a ouvertement joué contre l'intérêt européen. En temps de crise économique universelle, le chancelier allemand a préféré un tête à tête avec les Chinois à une rencontre des partenaires européens avec les représentants de Pékin. Voilà qui prouve le peu de cas que Madame Merkel fait de l'Europe mais aussi un imperceptible éloignement des Etats-Unis, au moment où ces derniers critiquent la politique monétaire chinoise. Madame Merkel joue Pékin contre Paris mais aussi contre Washington.

Le réveil du Kulturkampf
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Mardi 3 février, Madame Merkel est allée encore plus loin. Elle a publiquement sommé le pape Benoît XVI de s'expliquer sur l'affaire de la levée d'excommunication des évêques de la Fraternité Saint Pie X dans l'Eglise. On ne s’étendra pas ici sur les dessous de l’affaire Williamson, sinon pour mentionner que ce dernier n’est pas seul, de son camp, à avoir déclenché le scandale : alors que le rapprochement entre les traditionalistes et le Vatican était en cours, un autre intégriste allemand, le Père Schmidberger a, en décembre dernier, réveillé de vieux démons en faisant, dans une lettre ouverte à l’épiscopat allemand, profession d’antijudaïsme. Madame Merkel ne s'exprime pas dans l'émotion qui avait suivi l'information (Der Spiegel, 19/1/2009)concernant l’antijudaïsme de Schmidberger et le négationnisme de Richard Williamson mais à froid, plus de deux semaines après les révélations du magazine de Hambourg.
C’est au moment où l'affaire s'apaisait que le chancelier allemand a publiquement demandé au pape de « faire repentance ». En fait, Madame Merkel n’a fait que suivre les sondages. Depuis quinze jours, un rejet de Benoît XVI s'exprime de plus en plus ouvertement chez les Allemands, en particulier chez les catholiques. Un tel phénomène ne surprendra l'observateur que s'il a oublié comment l'élection du cardinal Ratzinger avait été, paradoxalement, mal acceptée en Allemagne.

Les Allemands sont en train de rejeter Benoît XVI
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L'Eglise catholique allemande est profondément sécularisée, et à ce point préoccupée d’insertion dans la société qu’elle en est venue à négliger la spiritualité, la prière, la transcendance, la beauté de la liturgie: tout ce que Benoît XVI entend réhabiliter. Chez les catholiques allemands actuellement déchaînés contre « Ratzinger », la mémoire de la Shoah n'est qu'un prétexte: on a soudain la confirmation, en fait, que la « greffe Benoît XVI » n'a pas pris. Les catholiques se sentent encouragés par les protestants, qui, souvent, détestent un pape qui met des conditions théologiques exigeantes à l'oecuménisme. Ce n'est pas un hasard si le Spiegel, journal de Hambourg, traditionnellement anti-romain, mène croisade en ce moment contre « le pape qui a déraillé » (titre de couverture du numéro daté du 02.02.2009).
L'histoire de la CDU était fondée, de Konrad Adenauer à Helmut Kohl, premièrement, sur un équilibre, précaire mais réel, entre protestants et catholiques et, deuxièmement, sur une confiance discrète dans la papauté. En suivant les sondages, Madame Merkel a encore détruit l’un des points d’ancrage de l’Allemagne d’après-guerre. Ce faisant, elle reprend le flambeau de la Réforme et du Kulturkampf. Elle renonce au troisième partenariat fondamental de la CDU depuis les années 1950 : celui, tacite, passé avec le Saint-Siège.

La fin du « triangle magique »
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Très certainement joue l’antagonisme entre une Allemande du Nord, fille de pasteur et féministe, et un pape bavarois, porte-drapeau de la lutte contre l’avortement et les expérimentations sur les embryons, qui est aussi l’un des derniers témoins de la fierté d’être catholique qui avait caractérisé l’ère du chancelier Adenauer (1949-1963).
Ajoutons cependant que le facteur déclenchant est finalement prosaïque : Madame Merkel a été soupçonnée de faiblesse face à la crise économique et elle vient de trouver le terrain idéal où, pense-t-elle, elle pourra rétablir sa réputation. Il n’est pas sûr, cependant, qu’elle y gagne beaucoup électoralement. Une partie des électeurs de la CDU et de la CSU bavaroise se détourneront du chancelier et ces pertes ne seront pas compensées par des gains au centre ou à gauche. Surtout, en renonçant au triangle magique de l’insertion allemande dans la diplomatie internationale depuis Adenauer (Washington, Paris, le Vatican), Madame Merkel brouille les repères. Elle met en danger la cohésion identitaire de son parti et peut-être, même, le résultat des élections législatives de septembre prochain.
Mais le plus important concerne le long terme : pourrons-nous, depuis la France, travailler efficacement avec une Allemagne dont le chancelier remet radicalement en cause les piliers de l’histoire de la République Fédérale ?

A propos...

de la perception du pape par les catholiques allemands, il n'y a rien de bien nouveau.

Voir ici: http://beatriceweb.eu/Blog06/humeurs/...

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Nouvelles d'Allemagne (II) Pétition