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Les 4 éveques lefebvristes

L'analyse à chaud, après le dernier communiqué du Saint-Siège, du site Messa in Latino. (18/5/2012)

Du même auteur:
¤
Bientôt le retour de la FSSPX?

Et aussi:
¤ Ping-pong avec les lefebvristes

     



JEUDI 17 MAI 2012
FSSPX: Durcissement au Vatican
(http://blog.messainlatino.it/, Enrico)
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Quand j'ai lu, hier, le communiqué de la Salle de presse du Vatican, j'ai soupiré: nous voilà revenus à la normale. Je trouvais en effet vaguement irréel et même inquiétant (cela ressemblait au calme avant la tempête) que les pourparlers entre Rome et la Fraternité Saint-Pie X puissent filer, si lisses, avec des sursauts des lefebvristes, certes, mais sans coup férir de la part de l'Église officielle, qui est opposeé à la réconciliation (presque tout le monde à l'exception du Pape et de quelques autres).

Eh bien, un "ultime soubresaut" (*), ou pire encore, ramène à ce à quoi on pouvait physiologiquement s'attendre: business as usual. Il est facile d'imaginer que la dernière version du préambule doctrinal, retouché par Mgr. Fellay, ait été avalée de travers parmi les cardinaux éminents de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi et leurs collaborateurs: non seulement ceux qui s'accrochent encore au mythe du Concile, mais aussi ceux qui - plus papistes que le pape - voudraient intégrer dans le Credo les mots: «Credo ermeneuticam continuitatis Sacrosanctae Vaticani II Synodi».

Mais je ne crois pas que l'aspect doctrinal de la question revête une importance particulière. L'impression est qu'il s'agit plus d'une excuse pour retarder et gagner du temps, que de l'apparition de graves difficultés dogmatiques. Après tout, on tenait pour acquis jusqu'à tout récemment, et même de façon semi-officielle (pensons à la déclaration faite par Mgr. Arrieta, secrétaire du Conseil pour les Textes législatifs), qu'il ne subsisterait plus de problèmes sur ce point. La solution semblait à portée de main (le bien informé Tornielli parlait de la fin du mois) et cela a été implicitement confirmé par le P. Lombardi à la conférence de presse d'hier, quand il a dit: «il n'est pas question, comme cela semblait être le cas, de temps très court». Si le nouveau texte du préambule doctrinal convenait jusqu'à hier, il ne peut pas être soudainement devenu déplorable. Donc, si il y a des obstacles, ils sont d'une nature différente.

Le problème est tout au plus en amont: l'Eglise officielle peut-elle digérer le fait de réintégrer une institution qui depuis des décennies, représente une pierre d'achopement par rapport à toute la mentalité jusque là prédominante? Aujourd'hui, certainement, plus que jamais: d'un côté les catastrophes causées par ce funeste Concile ne peuvent plus être cachées sous le tapis usé de la rhétorique; de l'autre, les coryphées de l'événement conciliaire, et même ceux qui ont grandi avec ce mirage, cédent graduellement la place, pour raison d'âge, à ceux qui, du Concile, ont surtout vécu les effets délétères.

Mais la résistance est encore forte et le Pape est le premier à le savoir. Dans la lettre à ses trois confrères rebelles, Mgr Fellay rapporte que le Pape lui a fait savoir qu'il serait bien plus facile tant pour lui (le Pape) que pour la Fraternité Saint Pie X, de laisser les choses comme elles sont.

Si donc «faire la paix» avec les lefebvristes était déjà indigeste pour la plupart, les cardinaux, hier, au moment d'en venir aux faits, ont voulu au moins s'ôter de l'estomac le risque d'avoir à réintégrer les trois évêques anti-accordistes, ou plutôt, l'un d'eux, c'est à dire Mgr Williamson, dont les positions négationistes avaient créé un énorme scandale médiatique. Et ce n'est pas par hasard que Williamson a été expressément mentionné dans la conférence de presse du P. Lombardi. La lettre dans laquelle les trois évêques exposent leur opposition aux accords a offert le prétexte pour camoufler sous des problèmes d'orthodoxie (qui existent aussi: Fellay accuse en pratique les autres évêques de sédévacantisme) ce qui est en premier lieu une raison d'opportunité.

En somme: les dicastères du Vatican pourraient même - obtortissimo collo (serrés à la gorge i.e. à contre-coeur) et vu que Papa Ratzinger s'obstine - soutenir le retour de la Fraternité, sauf le problème de faire ensuite avaler la couleuvre aux conférences épiscopales nationales. Mais ils ne veulent absolument pas revenir aux mois d'orage de l'année 2009, quand l'Église et le Pape subirent une attaque sans précédent pour la révocation de l'excommunication de l'évêque négationniste. La récente visite au Vatican du vice-président du Bundestag, qui s'est dérangé juste pour exprimer la préoccupation de la Grande Nation Germanique pour la réintégration d'un groupe considéré comme fondamentaliste et antisémite, n'est que le hors-d'oeuvre de ce qui se passerait.

Voilà le motif réel de cet espèce de procès de Sainte Inquisition auquel, selon le communiqué de presse d'hier, devraient être soumis les trois évêques avant de rentrer. Une façon de dire: 'nous ne vous voulons pas'. Ou du moins, pas tous (ce qui me semble le sens de ces deux adverbes du communiqué apparemment inquiètants, «la situation sera examinée séparément et individuellement», comme pour dire: nous évaluerons qui nous allons prendre et qui nous ne prendrons pas).

Mais si les raisons d'opportunité peuvent aussi se comprendre (éviter d'offrir l'argument facile de l'antisémitisme à ceux qui, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Église, ne veulent pas d'une FSSPX réconciliée), le jeu risque d'être très dangereux. Car une chose est de savoir si l'un des trois évêques refusé la main tendue du Pape: il s'exclurait de lui-même, réalisant en plus un acte d'insubordination envers son Supérieur Fellay, et se chargeant aussi du poids moral d'une fracture de la Fraternité (à partir des signaux que j'ai recueillis, il ne semble pas que les trois évêques étaient prêts à passer à cet extrême). Mais aujourd'hui, au contraire, c'est Rome qui montre qu'il ne veux pas qu'ils rentrent, sinon au prix de fourches caudines humiliantes, entrant pesamment dans la dialectique interne de la FSSPX. Avec l'effet inévitable de contraindre Mgr Fellay à prendre la défense de ses confrères, bien qu'à contrecœur, et à rassembler la communauté sur les positions, pour le moment, moins accordistes. Ou mieux: plus attentistes.

À ce stade, tout semble reporté à après le chapitre général que la Fraternité a convoqué pour le début de Juillet. À moins que quelque nouveau coup de théâtre qui, permettez-moi de l'ajouter, n'est pas du tout invraisemblable.



(*) Colpo di coda: une réaction à l'improviste de la part de quelqu'un que l'on croit battu