Cessons de tirer le Saint-Père par la soutane
Une réflexion du Père Scalese à propos de ceux qui demandent trop au Pape, au risque de le mettre dans l'embarras, ou pire... (29/10/2009)
J'avais une fois trouvé sur un site italien (Petrus) une expression qui m'avait bien plu, s'adressant à un groupe quelconque qu'il serait hors-sujet de rappeler ici: "arrêtez de tirer le Saint-Père par la soutane". Façon de dire: "il sait ce qu'il a à faire, inutile de faire pression sur lui".
C'est l'idée développée ici par le Père Scalese, s'adressant au site "Messa in Latino", qui rêve de voir une fois au moins le Saint-Père célébrer une messe selon le rite de Saint-Pie V - un souhait récurrent sur un certain forum français fréquenté entre autre par des traditionalistes.
Message reçu par moi aussi. J'essaie(rai) de ne pas trop "le tirer par la soutane", - en pensée, car je ne le ferai jamais sur ce site - même si la tentation est parfois forte.
Article en italien: http://querculanus.blogspot.com/...
Ma traduction:
A tu per tu, sommessamente
Mercredi 28 Octobre 2009
En tête à tête, à voix basse
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Dans leur dernier message, les amis de Messainlatino.it ont avancé "deux requêtes au Saint-Père".
Bien sûr, chacun est libre de demander ce qu'il veut au Pape, ou à n'importe qui d'autre, mais je voudrais, en toute amitié, dire quelques mots à voix basse à la Rédaction du blog et à ses nombreux lecteurs.
Sur la première demande, rien à redire; je ne vois absolument aucun inconvénient que le dimanche après-midi soit célébrée une messe selon le rite extraordinaire dans la basilique de Santa Maria Maggiore, et pourquoi pas dans la chapelle du Saint-Sacrement (où est enterré saint Pie V: ce serait aussi une façon de vénérer sa mémoire).
C'est la seconde requête qui m'a causé davantage de problèmes. J'ai noté avec plaisir le ton utilisé par la rédaction, plus nuancé que celui souvent utilisé par les lecteurs dans les commentaires. Dans le cas présent, elle réclame "une célébration publique, ou au moins l'assistance du pape à la liturgie extraordinaire". Je prends acte avec satisfaction que l'équipe éditoriale de Messainlatino.it se rend compte que l'on ne peut demander au Saint-Père: "Alors, quand le Pape se décide-t'il à célébrer la messe traditionnelle?". Mais personnellement, je crois que même sous cette forme plus nuancée, la demande est encore un peu surfaite. Pourquoi?
Je reconnais qu'un peu chacun de nous (je me mets en premier sur la liste), nous avons la tentation de tirer le Pape de notre côté. Mais justement, il s'agit d'une tentation, il faut la reconnaître comme telle, et savoir y résister. Essayons de comprendre: le Pape est, comme on disait autrefois, le «père commun», le père de tous dans l'Église; il n'est pas le chef de tel ou tel courant ecclésial actuel, tel ou tel mouvement, groupe ou association. Tout simplement parce qu'il est le père de tous, il est légitime de se tourner vers lui avec confiance. Mais dans le même temps, nous devons veiller à ne pas le compromettre.
Nous savons très bien à combien de problèmes il est confronté tous les jours pour ses positions, pas toujours acceptées par tous. Fort heureusement, il ne se décourage pas et continue son chemin, avec douceur et décision. Laissons-le donc décider ce qui est le mieux à faire dans les différentes situations; ne le pressons pas acec nos revendications; ne lui soufflons pas dans le cou; ne le tirons pas par la soutane dans la direction où nous voudrions qu'il aille. A trop le tirer d'un côté, on rend au Pape un très mauvais service.
Aux amoureux de la "Messe de toujours", je demande: qu'est-ce que Benoît XVI n'a pas fait, quil aurait pu faire? Plus que de publier le motu proprio Summorum Pontificum; plus que d'établir dans son diocèse une paroisse personnelle pour les fidèles attachés à la tradition; plus que de laisser les cardinaux et les prélats de la Curie célébrer le rite extraordinaire; qu'aurait-il pu faire d'autre? Ces décisions ont déjà suscité beaucoup de critiques. Heureusement, il ne s'en soucie pas (même si nous savons qu'il n'est pas du tout indifférent à leur égard). Mais vous imaginez le tollé qui se passerait si le pape célébrait selon le rite tridentin?
Après tout, il ne faut pas oublier que le rite traditionnel n'est, dans la liturgie actuelle de l'Église, que la forme «extraordinaire» du rite romain, le Missel de Paul VI en restant la «forme ordinaire». Cela me semble une chose évidente que le pape célébre la messe dans sa "forme ordinaire". En disant cela, je ne veux mettre aucune limite aux décisions du Pape: il n'y aurait rien de scandaleux s'il célébrait parfois selon la forme «extraordinaire», mais cela doit dépendre uniquement de sa volonté. Cela ne me semble pas respectueux de l'exiger de lui comme si c'était presque un devoir.
...
Qu'ajouter à ces sages propos? Il est clair que certaines personnes, peut-être animées des meilleures intentions (??) ne se rendent tout simplement pas compte de la lourdeur de la charge qui pèse sur les épaules d'un seul homme "un fragile serviteur de Dieu", comme il s'était défini lui-même dans l'homélie de la messe d'inauguration du Pontificat.
Est-ce manque d'imagination, d'empathie, est-ce mesquinerie, petitesse intellectuelle, égoïsme, attachement aux détails, et pas à l'ensemble, dont lui seul peut avoir une vue? Ou bien est-ce une telle confiance en lui qu'on croit qu'il peut tout?
Je ne sais pas.
Et cela ne vaut pas que pour la célébration de la messe tridentine.
Mais le Saint-Père, dans la même homélie, nous avait dit "priez pour moi, afin que je ne me dérobe pas par peur devant les loups".
Je crois que c'est ce qu nous pouvons faire de mieux, en effet: prier pour lui.
Heureusement, beaucoup le font.
