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Les origines maçonniques de l'Amérique

Une thèse dangereuse et anti-chrétienne. Et le dernier méfait de Dan Brown, une attaque "en douce" contre l'Eglise.
Très intéressante analyse de Massimo Introvigne dans L'Avvenire (3/10/2009)

Sur Dan Brown, lire aussi ce billet du Suisse romain, déjà évoqué à la rubrique "Lu ailleurs" du 23 septembre:
Pour la sortie de son nouveau roman, la communication de Dan Brown, tente d'impliquer le Pape, ni plus, ni moins. Elle va jusqu'à affirmer que le best-seller "Jésus de Nazareth" de Benoît XVI, est une sorte de réponse au Da Vinci Code.

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Ci-contre: Jardins du George Washington Masonic National Memorial, Wikipedia.
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Le dernier roman de Dan Brown, The Lost Symbol est sorti aux Etats-Unis le 15 septembre, précédé d'un tapage médiatique planétaire. Un film est annoncé, un jeu video, des millions (milliards?) de dollars sont en jeu, la traduction en français est prévue pour le mois prochain. Et aussi, fait à la fois surprenant et inquiétant (on en jugera après lecture de l'article qui suit):
"la Ville de Washington DC a mis en ligne une section spéciale dédiée à The Lost Symbol et permettant de visiter les lieux cités dans le roman" (source).

Lorque l'on parle de Dan Brown, dans certains milieux, il est de bon ton de froncer le nez avec mépris, en disant "je ne lis pas ce genre d'âneries".
On a peut-être tort de le prendre à la légère.
Si 70 millions de personnes ont lu le Da Vinci Code, (et si seulement 10% d'entre eux l'ont pris au premier degré, cela fait quand même beaucoup de monde), ce n'est plus une anecdote, mais un fait sociologique - et peut-être donc politique - majeur.
Il est aussi intéressant de noter que ce dernier roman est présenté dans les medias comme un brûlot contre la franc-maçonnerie (façon de dire: vous voyez bien qu'il ne s'en prend pas qu'à l'Eglise!).
Or, il semble quil n'en soit rien. De façon nettement plus subtile que les deux précédents best-sellers, c'est une nouvelle attaque contre l'Eglise.
Il faut donc en parler.
C'est justement ce qu'a fait le philosophe italien déjà rencontré dans ces pages, Massimo Introvigne (ici, ici, et ) dans un article publié le 17 septembre dans l'Avvenire, et reproduit sur le site Messa in Latino avec les intéressants commentaires du rédacteur du blog, parmi ceux, plus inégaux, des lecteurs.

Au moment où le nouvel ambassadeur américain vient d'apporter au Pape ses lettres de créances , il me semble que les réflexions de Massimo Introvigne sont au coeur de l'actualité de l'Eglise.
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http://blog.messainlatino.it/2009/09/lultimo-feuilleton-dellautore-del.html
Ma traduction
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Dan Brown sert à attester la thèse, dangereuse et antichrétienne, que les Etats-Unis sont exclusivement un produit maçonnique. Thèse qui amène à exclure Dieu (le vrai, et pas le Grand Architecte) de la shère pubblique américaine et donc, à justifier les choix antichrétiens, spécialement dans le domaine moral.

Cette critique contre Dan Brown est donc aussi une critique des "racines maçonniques"; en positif, cette critique est dans le sens de faire ré-affleurer les racines chrétiennes des Etats-Unis, dont s'est aussi réclamé Benoît XVI (sans toutefois pouvoir nier que beaucoup de Pères fondateurs étaient maçons - une maçonnerie par ailleurs différente de la maçonnerie anti-cléricale des pays catholiques).
(commentaire du rédacteur)

Mardi 29 Septembre 2009
Le dernier feuilleton de l'auteur du Da Vinci Code

Lost Symbol: "Dan Brown aux pieds de la Franc-Maçonnerie"

par Massimo Introvigne (Avvenire, 17/9/2009)
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Robert Langdon, le professeur de symbologie que les quatre-vingt millions de lecteurs du Da Vinci Code connaissent, arrive au Capitole, à Washington, invité par son vieil ami Peter Salomon, un maçon de haut rang, pour faire un discours. Mais quand - au début du nouveau roman de Dan Brown The Lost Symbol (le symbole perdu) - il pénètre dans le bâtiment, Langdon découvre qu'en fait, l'appel est faux, et il fait une découverte macabre: il trouve une main coupée, celui de Salomon, sur laquelle sont gravés des tatouages maçonniques. La main désigne un tableau de 1865, représentant le premier président des États-Unis, George Washington (1732-1799), sous les traits d'un dieu païen. Le méchant qui a tendu un piége à Langdon (et dont la véritable identité n'est révélée qu'à la fin du roman) se fait appeler Mal'akh , "l'Ange", il a le corps recouvert de tatouages comme une œuvre d'art, et il est à la recherche d'une pyramide Maçonnique cachée quelque part sous Washington avec des pouvoirs mirobolants. Avec l'aide (et bientôt, comme d'habitude, l'amour) de la belle soeur de Salomon, Katherine, Langdon qui étudie la science miraculeuse de la noétique (ndt: branche de la philosophie qui traite des questions de l'intellect et de la pensée http://fr.wikipedia.org/) accomplit un parcours d'obstacles entre les mystères du Rite écossais de la franc-maçonnerie, des alchimistes, des rabbins et des agents de la CIA, défait les méchants et sauve les Etats-Unis d'un dangereux complot.

Il ménage la chèvre et le chou (Un colpo al cerchio e uno alla botte) : après s'en être pris à l'Église dans le Da Vinci Code, cette fois, Brown s'en prend-il aux franc-maçons? Pas vraiment. Certes, Brown est toujours Brown, un écrivain que personne n'a jamais accusé de faire des recherches historiques sérieuses avant d'écrire ses livres. Par conséquent, en termes de Rite Écossais, de pyramides, de cérémonies maçonniques, d'architecture et d'urbanisme de Washington qui résulteraient d'une carte établie par les francs-maçons, sans compter les extravagantes exigences New age de la noétique, le spécialiste retrouve sans difficulté les niaiseries habituelles. Pierre Charles L'Enfant (1754-1852), qui dessina le plan de la ville de Washington en 1791-1792 n'est pas un franc-maçon, et se conforme aux directives du gouvernement, qu'il reçoit non pas du maçon George Washington, mais du "non"-maçon Thomas Jefferson (1743-1826). La légende est née aux États-Unis, mais elle est devenue le patrimoine commun de ceux qui lisent certains livres, avec un texte de 1989, de Michael Baigent et Richard Leigh, deux des auteurs anglais du livre "Le Saint-Graal" (en français L'énigme sacrée?) , dont Dan Brown s'était déjà largement inspiré pour les théories sur les Mérovingiens et Marie-Madeleine, dans le Da Vinci Code. Et beaucoup de sombres histoires sur le rite écossais de la franc-maçonnerie et sur son dirigeant du dix-neuvième siècle, Albert Pike (1809-1891) ont été inventées pendant les controverses du dix-neuvième siècle, ou pire encore, proviennent du foyer français de Léo Taxil(1854-1907), un Maçon imposteur qui feignit d'être converti au catholicisme et fit des révélations incroyables au sujet de rituels macabres, et d'apparitions du Diable dans les loges, avant de confesser publiquement la supercherie en 1897.

Et pourtant, alors que le Da Vinci Code est un anti livre-catholique et anti-chrétien, The Lost Symbol n'est pas anti-maçonnique. Certes, les francs-maçons se plaindront de certaines inexactitudes et exagérations. Mais ici, les francs-maçons - contrairement à l'Opus Dei dans le Da Vinci code ou à l'Eglise ennemie de la science dans le roman Anges et Démons (beaucoup plus virulent que le film, qui a considérablement modéré le ton) - ne sont pas «mauvais». Tandis que tirer sur l'Église est considérée dans les milieux fréquentés par Dan Brown, comme politiquement correct, on a le sentiment que lorsque l'auteur traite de la Franc-Maçonnerie, il procéde avec prudence et écrit après avoir glissé sa main dans un beau gant de velours. Ce faisant, Brown (ne?) mélange (pas?) le sacré et le profane. (Brown, così, scherza coi santi e lascia stare i fanti).

Pourtant, à y regarder de près, il y a bel et bien une thèse idéologique dans le nouveau livre.
Elle aurait fait plus de bruit si Brown avait pu, comme il le voulait, terminer le livre sous le règne de Bush.

En effet, la figure du président qui s'est converti au protestantisme, Born Again et conservateur, donnait de l'éclat à un débat historique animé qui a duré une centaine d'années et qui oppose deux récits sur les origines des États-Unis. Pour le premier, les pères fondateurs des Etats-Unis - même s'ils n'étaient pas tous des exemples de conduite morale et de bonne doctrine chrétienne- placèrent au centre de l'expérience américaine des valeurs communes dont les fondements étaient en gros, chrétiens. Pour le second, le fondement commun qui unissait les pères fondateurs n'était au contraire pas le christianisme mais plutôt le déisme typique de la maçonnerie, utilisés comme vernis philosophique léger pour recouvrir des thèmes gnostiques, ésotériques et, finalement, naturalistes et néo-païens.

Le débat passionne parce qu'il a une portée culturelle et politique. Si les pères fondateurs, sans trop le dire, ont voulu fonder l'expérience américaine sur une sorte de naturalisme néo-païen, gnostique, «maçonnique» dans le sens courant de ce mot aujourd'hui (mais on oublie que la Franc-maçonnerie américaine du XVIIIe siècle n'était pas celle européenne du XIXe siècle ou d'aujourd'hui), alors la prétention - chère à Bush - de présenter les États-Unis comme une nation Chrétienne avec une mission religieuse à accomplir s'écroulerait comme un château de cartes. Et - ajoutent les adeptes du second récit - les tenants du relativisme moral, de l'avortement, du mariage homosexuel sont plus proches de l'esprit païen et gnostique des pères fondateurs que Bush ou les évêques catholiques.

C'est pour le second récit que Brown descend dans l'arène. Pour l'écrivain, le fond gnostico-maçonnique de "l'ethos Américain" est une bonne chose: bien sûr, chez beaucoup d'anti-américains le même fond existe, mais c'est une donnée négative qui confirme combien les chrétiens font bien de ne pas se fier aux Etats-Unis.

Le débat, naturellement, ne se résout pas par des romans, et il est devenu moins vivace avec Obama, pour qui la rhétorique de la Christian nation n'est pas aussi importante que pour Bush. Mais la présentation grossière de Brown est historiquement infondée. Benoît XVI, en visite aux États-Unis en 2008, a défini l'expérience des pères fondateurs américains comme un "modèle fondamental et positif". Sur la pelouse de la Maison Blanche, le pape a déclaré que "depuis les débuts de la République, la recherche de liberté de l'Amérique a été guidée par la conviction que les principes qui gouvernent la vie politique et sociale sont intimement liés avec un ordre moral, fondé sur la seigneurie de Dieu créateur. Les rédacteurs des documents constitutifs de cette nation se fondèrent sur cette conviction, lors qu'ils proclamèrent la "vérité évidente en elle-même" que tous les hommes sont créés égaux et dotés de droits inaliénables, fondés sur la loi naturelle et sur le Dieu de cette nature." (source): le Dieu, a précisé Benoît XVI, de la foi "biblique".
Il est juste que les historiens continuent de débattre.
Mais le pape aux Etats-Unis a dévoilé le jeu de ceux qui présentent avec une intention malicieuse les origines des États-Unis comme seulement maçonniques, afin de légitimer la marginalisation du christianisme de la vie politique aujourd'hui. Dans ce jeu, des romans peuvent aussi apporter leur contribution.

Et, quand passe le train d'une mauvaise cause, Dan Brown ne manque jamais de monter à bord.

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