Un vent de folie sur le monde et sur l'Eglise
J'ai trouvé cette magnifique réflexion d'un prêtre italien, Don Matteo De Meo, sur le site Fides et Forma.
On a oublié en effet que le christianisme se fonde sur un évènement , et non sur une idée (ce que Benoît XVI ne cesse de rappeler).
À une époque où une grande confusion, c'est-à-dire l'incapacité de jugement, semble se propager partout, il est urgent de garder nos yeux fixés sur celui qui seul peut nous indiquer la route et confirmer notre foi: “Tu es Petrus...Portae inferi non prevalebunt.”. (18/11/2009)
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Publié sur le site Fides et Forma (Francesco Colafemmina): http://fidesetforma.blogspot.com/2009/11/cosa-e-mai-questo-vento-di-pazzia.html
Mardi 17 Novembre 2009
Mais qu'est-ce que c'est que ce vent de folie ...?
Par don Matteo De Meo
[professeur de théologie fondamentale et d'ecclésiologie à la Faculté de théologie des Pouilles: voir aussi ]
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Dans une culture comme la nôtre, où la conviction que tout est relatif menace de plus en plus, où les certitudes sont considérées comme une dangereuse intolérance, où le sentiment, l'instinct et l'absurde sont préférés à la raison, la foi est vécue comme une conviction personnelle dont dépend plus ou moins le fait chrétien, mais de toutes façons reléguée à la sphère privée et au subjectif!
On peut continuer à descendre dans la rue, peut-être même à défendre ces valeurs qui appartiennent à l'histoire et à la culture chrétienne, mais sans que tout cela soit déterminé par l'expérience ou par un jugement; ces mêmes valeurs "chrétiennes" deviennent un fait subjectif, négociable et manipulable! On se déchire les vêtements pour enlever le crucifix des lieux publics et en même temps, on est prêts pour l'euthanasie ou l'avortement ... On va à la messe, mais ".. ce pape nous conduit à l'échec ...".... etc ...!
Un christianisme de cette sorte est insuffisant pour soutenir la vie!
Que se passe t'il donc?
La foi ne se fonde plus sur un «événement» mais une «valeur». L'Evangile lui-même devient un dépôt "valoriel" des paroles de Jésus, donc la relation avec lui est finalement vécue comme une relation "morale" et non réelle.
Cela crée l'idée selon laquelle le fait d’être chrétien se fonde "sur une décision éthique ou une grande idée (qu'on peut entre autre interpréter ou adapter), et non sur la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive".(cf. Benoît XVI, Deus Caritas est, 1). Ainsi, la foi n'est plus le fondement de la vie, mais un simple complément.
On va encore à l'église, et peut-être se conforme t'on encore à des règles, mais ensuite, dans la réalité, on se réfère à d'autres critères qui de toutes façons ne découlent pas de l'expérience de la foi; l'événement chrétien n'est pas vécu comme un moyen de connaître, c'est pourquoi on doute que la foi puisse être une hypothèse explicative de la réalité, autrement dit on ne la reconnaît pas comme une vraie connaissance, capable de répondre aux nombreuses questions qui se posent de façon plus ou moins dramatiques, dans la vie quotidienne (la vie et la mort, mais aussi la santé et la maladie, le travail, l'amour, lesenfants, l'éducation, la politique, l'économie, etc ...).
On finit par penser - de manière plus ou moins consciente - que c'est la foi (sa propre conviction et son propre raisonnement) qui génère le fait chrétien, ce qui équivaut à dire que le christianisme est en définitive une oeuvre humaine, et son efficacité, ou non, dépend uniquement de l'agir de l'homme, de sa pensée, de sa réflexion, de son intelligence, etc ...
Il n'est donc pas rare de tomber sur des gens (chrétiens engagés, prêtres, évêques et théologiens d'une certaine réputation) qui persistent à soutenir que l'Église a besoin d'un renouveau en douceur, capable de trouver grâce aux yeux du monde; une sorte de méthodologie de l'annonce chrétienne visant à une «pastorale» de plus en plus efficace pour atteindre le cœur de l'homme. La vérité que le monde veut s'entendre dire doit être libérée du cercle «dogmatique» dans lequel l'Eglise l'avait enfermée et devenir "accessible à tous", si on veut être entendu et accepté dans une vision "moderne" de la réalité.
Il y a quelques jours,on m'a signalé un livre dont on fait la promotion et qui est exposé depuis des mois, bien en vue, par la librairie "catholique", http://www.paoline.it/ (il y a le pendant en France!).
L'auteur est Ignazio Marino: «Entre tes mains. Médecine, foi, éthique, droits ", ed. Einaudi, avec la préface "D.O.C." (ndt: Denominazione di Origine Controllata) de Carlo Maria Martini.
Le prélat célèbre et éclairé introduit le lecteur au contenu du livre en déclarant: «... Le livre révèle une humanité, une honnêteté dans l'examen des cas individuels qui incite à la confiance à se mettre "entre les mains" de nombreux serviteurs de la vie ..." .
Tout laisse présager un contenu édifiant et propre à clarifier plusieurs questions qui nous tiennent particulièrementà coeur: «La vie, la mort, la douleur, la maladie ...". Mais qui est ce docteur Marino, si vénéré et loué par Son Eminence ...?
Le Docteur Ignazio Marino, scout catholique, a été formé à la Faculté de médecine de l'Université catholique. Eh bien, dirions-nous, il a tout ce qu'il faut pour être un bon catholique, adulte et engagé! Mais il nous échappe peut-être que l'auteur en question est précisément ce sénateur Marino, qui se rallia aux partisans les plus acharnés de l'assassinat par la faim, par la soif et par la loi, de la pauvres Eluana Englaro! Eh oui c'est lui! Le sénateur Marino, en effet, a lutté sans relâche afin que soit affirmé un respect absolu de la liberté et des droits de l'homme. Son principal objectif dans la campagne électorale lors des primaires démocrates étaient ce qu'on nomme "l'Etat laïc", et l'auto-détermination dans son projet de loi sur "le testament biologique". Ses positions ont été considérés comme extrémistes, même par sa coalition de gauche.
Une sorte d'optimisme grotesque continue à être annoncé dans l'aréopage de ces chrétiens «engagés» et «adultes» qui ont depuis longtemps renoncé à chercher la vérité des faits: optimisme envers l'époque, envers l'humanité en général, envers le monde des incroyants et des autres religions, envers l'état interne de l'Église elle-même. Un christianisme "gai", pour lequel l'essentiel est d'obtenir une vérité partagée, le dialogue à tout prix, une liturgie accessible à tous, une Eglise toujours plus "humaine", même si cela exige des compromis subtils entre la vérité du Christ et les sentiments du monde.
Un christianisme compris et accepté par le monde, comment l'annoncer? Comment le rendre assimilable et intéressant, face aux défis de plus en plus attractifs et intéressants de la modernité? Questions qui résonnent continuellement de la part de nombreux catholiques, donnant vie à un catholicisme sécularisé, trouvant partout applaudissements et éloges, tandis que la "doctrine saine n'est plus supportée"; "Car il viendra un temps où les hommes ne supporteront pas la saine doctrine; mais, ayant la démangeaison d'entendre des choses agréables, ils se donneront une foule de docteurs selon leurs propres désirs, détourneront l'oreille de la vérité, et se tourneront vers les fables. (II Tim. IV, 3, 4.)
On nous convainc de la nécessité du changement, ou plutôt de l'«adaptation» ou de la «réconciliation» avec l'époque, dans tous les domaines: parler, écrire (ndt: communication, et internet!) et prêcher une charité sans la foi, le tout dans un style "buoniste", pacifiste et optimiste, comme étant les composants essentiels d'une foi adulte et ouverte.
Tout cela devrait conduire à une sorte de printemps "dans l'Eglise et dans le monde", une ère de paix et de fraternité digne de ces scénarios de fiction, et d'une certaine façon étonnament prophétiques (toujours peu lus et peu connus) que nous trouvons dans le triomphe de l'humanisme du «Maître du monde» de Benson, ou dans le vert et pacifiste "Antechrist" de Soloviev.
Où nous a til mené, ce flot de "changement à tout prix", d'un certain «progressisme» catholique, qui, depuis plus de trente ans, déferle au sein de l'Eglise elle-même?
Au résultat opposé: des catholiques de plus en plus divisées, la diffusion de doctrines hétérodoxes soutenues avec force et conviction par de nombreux théologiens, la division au sein de l'Église, un affaiblissement de la foi chrétienne.
Et nous, que pouvons-nous faire?
Il me vient à l'esprit les paroles d'un grand écrivain et humoriste, qui a fait beaucoup parler de lui, Giovannino Guareschi, lui qui fait dire à son "Don Camillo", "Seigneur, qu'est-ce que c'est que ce vent de folie? Que pouvons-nous faire? "- Et le Seigneur répondit:" ... que peut faire le paysan lorsque le fleuve déborde les digues et envahit les champs ... il faut sauver la semence: la foi. "
À une époque où une grande confusion, c'est-à-dire l'incapacité de jugement, semble se propager partout, il est urgent de garder nos yeux fixés sur celui qui seul peut nous indiquer la route et confirmer notre foi: “Tu es Petrus...Portae inferi non prevalebunt.”.