Benoît XVI, au-delà des modes de pensée.
C'est le titre d'un livre sur Benoît XVI qui sort ces jours-ci en Italie. Interviewe de l'auteur, Francesco Antonio Grana. (10/2/2010)
Décidément, pour connaître quelqu'un (et en parler honnêtement) il faut l'aimer. Le Saint-Père l'avait dit, à propos de Jésus, je n'arrive plus à retrouver quand.
C'est ce que souligne cette interviewe du dernier biographe italien du pape, Francesco Antonio Grana (déjà rencontré ici).
Il vient de publier un livre "Benedetto XVI oltre le mode del pensiero". Je suis à sa recherche sur Internet.
Il pourrait s'agir d'une sorte de réponse à plusieurs ouvrages de commande parus récemment en France, par exemple "Pourquoi le Pape a mauvaise presse", de Bernard Lecomte.
Pourquoi, en effet?
Au-delà de l'incompréhension, la presse ne travaillerait-elle pas sciemment à cette mauvaise image qui tente de se superposer à la vraie?
La préface du livre, rédigée par le cardinal Michele Giordano, archevêque émérite de Naples, avait été publiée en avant première sur le blog de Raffaella en novembre dernier.
Francesco Antonio Grana explique comment, souvent, les médias représentent un Ratzinger qui n'existe pas.
Benoît XVI et les préjugés de la presse
Andrea Acampa
(texte en italien: Raffaella)
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"Comprendre Benoît XVI n'est pas facile. Et le communiquer aux gens l'est encore moins. Dans ce sens, le nouveau livre du journaliste Francesco Antonio Grana est destiné à donner une clef de lecture médiatique de l'actuel pontificat, au-delà des schémas habituels de pensée".
Le cardinal Michele Giordano (archevêque émérite de Naples: http://fr.wikipedia.org/wiki/Michele_Giordano ), auteur de la préface du nouveau livre de Francesco Antonio Grana, "Benedetto XVI oltre le mode del pensiero", n'a aucun doute. Alors que les fidèles, qui étaient habitués au langage gestuel éloquent du pape Jean Paul II, véritable encyclique non écrite, se sont mis avec entrain à suivre le nouveau pape, il n'en a pas été de même des médias, qui ont préféré user de clichés plutôt que d'approfondir qui est et ce que propose le personnage Ratzinger. On assiste ainsi très souvent à la lecture de nouvelles homologuées, dictées essentiellement par les titres des agences.
- Benoît XVI au-delà des modes de penseée. Un titre énigmatique. Francesco Antonio Grana pourquoi ce choix?
"Comme professionnel de la communication, je devrais répondre: pour capter l'attention des médias et de l'opinion publique. Mais je me mentirais d'abord à moi-même. Un évêque me disait qu'aujourd'hui, il n'est pas rare que même les livres sur le Pape et l'Eglise soit une occasion de business. Il ajoutait que ce n'est pas mon cas, avec l'affection et l'estime pour moi de quelqu'un qui a suivi mon parcours ces dernières années. En fait le titre est né en écrivant le livre. En racontant Benoît XVI au-delà des clichés, au-delà des lieux-communs de la communication, au-delà des caricatures dont ce Pape est la victime, au-delà des façons de penser, justement.
- Dans quelle mesure les médias réussissent-ils à communiquer le vrai message du Pape?
"Je ne veux pas être pessimiste, mais je suis tenté de l'être. Nous, les journalistes, nous n'avons pas attendu de voir les premiers gestes de Benoît XVI pour comprendre comment il définirait son pontificat, surtout après le long règne du grand Pape Jean Paul II.
Nous avons au contraire superposé nos convictions, souvent diamétralement opposées à la réalité, au magistère de Benoît XVI, disant, par exemple, que seul un pape anticonciliaire pouvait réhabiliter la messe en latin et lever l'excommunication des évêques lefebvristes. Bien que Benoît XVI ait très clairement expliqué le sens authentique de ces gestes conduisant à la réconciliation, nous avons préféré imposer nos croyances, nos clichés, sur la réalité. "
- L'ennemi de Benoît XVI est donc le mauvais journalisme.
"D'une certaine façon le mauvais journalisme est devenu une sorte d'anti-pape, qui s'oppos au Pontife régulièrement élu par les cardinaux en conclave. La voix du premier étouffe celle du second. Souvent, pour comprendre ce pense vraiment Ratzinger, le seul moyen est de lire ses homélies et ses discours dans leur intégralité, et non les articles des journaux.
- Certains prétendent que le Pape Benoît XVI serait un Pape enfermé dans des constructions intellectuelles raffinées, appliqué à répéter sans pitié des "non", sourd à la modernité, hostile aux autres religions. C'est ça?
"Bien différent est le Ratzinger que nous avons vu dans ces quatre années de pontificat. Un pape qui sait communiquer avec les théologiens et avec les enfants, avec la foule de la Place Saint-Pierre et les fidèles qui l'accueillent dans ses visites pastorales dans les cinq continents, avec les dirigeants de toutes les religions et avec les jeunes du monde entier. Un homme qui, dans le sillage de ses prédécesseurs, a mis au sommet de son pontificat, le dialogue œcuménique et interreligieux. Un pape qui parle au cœur de l'homme et qui reçoit une attention considérable au-delà de la stricte géographie catholique. Et cela ne plaît pas à certains".
- C'est tellement difficile de se syntoniser sur la longueur d'onde de Benoît XVI?
"Je ne crois pas. Il suffirait, comme l'a rappelé le cardinal Tarcisio Bertone, de rapporter ses simples paroles et ses gestes de véritable père du peuple de Dieu, sans l'ajout d'interprétations tordues. Ce n'est que de cette façon que nous, journalistes servirons la vérité".
- Samedi dernier, vous avez donné à Benoît XVI vos quatre livres. Qu'a dit le Pape?
"C'était très émouvant de rencontrer Benoît XVI et de lui donner mes travaux, pour lesquels le Pape, avec une grande bonté, a montré beaucoup d'intérêt, s'arrêtant sur les différents volumes: depuis celui consacré à Jean-Paul II, en passant par celui qui analyse la communauté de l'Eglise jusqu'aux deux qui racontent son propre pontificat.
Le cardinal Michele Giordano a eu des mots très beaux en me présentant au Saint-Père, m'appelant son fils spirituel. Benoît XVI l'a remercié pour avoir soutenu mon travail dans la diffusion de son magistère, en écrivant la préface des volumes et en les présentant au grand publicc. Après la rencontre, j'ai demandé au pape de prier pour moi, et lui, avec une douceur unique, m'a demandé de faire la même chose pour lui. Benoît XVI a une sensibilité raffinée et j'espère que cela sera de plus en plus perçu par le peuple des croyants et par tous les hommes.
© Copyright L'Avanti, 10 febbraio 2010