Mariage et unions homosexuelles
Une note doctrinale du cardinal Caffarra, archevêque de Bologne: un cri d'alarme pour sauver le mariage (15/2/2010)
Hier, c'était la fête devenue la plus païenne de l'année: La Saint-Valentin.
Le cardinal Caffarra, qui a succédé au cardinal Biffi comme archevêque de Bologne, a préféré, quant à lui, rappeler les saints Cyrille et Méthode, patrons de l'Europe... chrétienne, pour publier une note doctrinale sur le mariage (l'un des biens les plus précieux de l'humanité) et les unions homosexuelles.
Une réflexion qui s'adresse à tous ceux (y compris non chrétiens) qui veulent bien solliciter leur raison pour débattre sereinement de ce grave sujet de société: aux jeunes, qu'il invite à se laisser illuminer par la beauté du lien conjugal; et surtout aux hommes politiques catholiques, avec qui il est particulièrement sévère: ceux qui voteraient au parlement une loi en faveur de l'équivalence entre mariage et unions homosexuelles commettraient un acte publiquement et gravement immoral.
Selon sa notice sur Wikipedia:
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Carlo Caffara, est né en 1938; il est archevêque de Bologne depuis 2003.
Il a consacré l'essentiel de son ministère sacerdotal à l'enseignement. Il a enseigné la théologie morale dans les séminaires de Parme et Fidenza, et à l'université de Milan.
En août 1974, le pape Paul VI le nomme membre de la Commission théologique internationale. Jean-Paul II le nomme en janvier 1981 président de l'Institut Jean-Paul II pour le mariage et la famille. Il est également consulteur de 1983 à 1988 à la Congrégation pour la doctrine de la foi.
Il a été créé cardinal par Benoît XVI lors du consistoire du 24 mars 2006.
Au sein de la curie romaine, il est membre de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples, du Tribunal suprême de la Signature apostolique, du Tribunal de la Rote romaine et de l'Académie pontificale pour la vie.
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Texte en italien ici (grâce à Raffaella): http://www.caffarra.it/notadottrinale140210.php
Ma traduction:
[Précision: j'ai en général traduit le mot italien equiparare par "assimiler", dans le sens "donner un statut équivalent"].
Mariage et unions homosexuelles:
Note doctrinale du 14 février 2010.
Carlo Caffarra
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La présente note s'adresse en premier lieu aux fidèles afin qu'ils ne soient pas troublés par les rumeurs des mass-media. Mais j'ose espérer qu'elle sera prise en considération par ceux qui, comme non-croyants, ont l'intention de se servir, sans aucun préjugé, de leur raison.
1. Le mariage est l'un des biens les plus précieux de l'humanité. En lui, la personne humaine trouve l'une des formes fondamentales de la réalisation de soi-même; et tous les systèmes juridiques lui ont accordé un traitement de faveur, compte tenu de son intérêt public éminent.
En Occident, l'institution du mariage traverse sans doute sa crise la plus grave. Je ne dis pas cela à cause du nombre croissant de divorces et de séparations; je ne le dis pas à cause de la fragilité qui semble miner toujours plus le lien matrimonial: je ne le dis pas à cause du nombre croissant d'unions libres. Autrement dit, je ne le dis pas en observant des comportements.
La crise concerne le jugement sur le bien du mariage. C'est face à la raison que le mariage est entré en crise, dans le sens où il ne jouit plus d'une estime à la mesure de son caractère précieux. La vision de son unicité éthique incomparable a été obscurcie.
Le signe le plus évident, même si ce n'est pas le seul, de cette "désestime" intellectuel est le fait que certains Etats concèdent, ou vont concéder une reconnaissance légale aux unions homosexuelles qui vise à les assimiler à l'union légitime entre un homme et une femme, incluant la possibilité d'adopter des enfants.
Peu importe le nombre de couples qui pourraient bénéficier de cette reconnaissance - même s'il y en avait un seul! - une telle assimilation constituerait une blessure grave au bien commun.
La présente note vise à aider à voir les dégâts. Elle vise également à éclairer ces catholiques qui ont des responsabilités publiques de toute nature, afin qu'ils n'accomplissent ps des choix qui nieraient publiquement leur appartenance à l'Eglise.
2. L'assimilation, sous quelque forme ou à quelque degré que ce soit, d'unions homosexuelles au mariage aurait objectivement la signification de déclarer la neutralité de l'Etat face à deux manières de vivre la sexualité qui ne sont en réalité pas également pertinentes pour le bien commun.
Alors que l'union légitime entre un homme et une femme assure le bien - et pas seulement biologique! - de la procréation et de la survie de l'espèce humaine, les unions homosexuelles n'ont pas de capacité intrinsèque à générer de nouvelles vies. Les possibilités offertes aujourd'hui par la procréation artificielle, en plus de ne pas être exemptes de graves violations de la dignité des personnes, ne changeront pas sensiblement l'inadéquation du couple homosexuel à générer la vie.
En outre, il est démontré que l'absence de bi-polarité sexuelle peut créer des obstacles sérieux au développement de l'enfant éventuellement adopté par ces couples. Ce fait aurait le profil d'une violence commise contre le plus petit et le plus faible, inséré dans un milieu inadapté à son développement harmonieux.
Ces simples considérations montrent comment l'Etat, dans son système juridique, ne devrait pas être neutre face au mariage et aux unions homosexuelles, puisqu'il ne peut pas l'être face au bien commun: la société doit sa survie non pas aux unions homosexuelles, mais à la famille fondée mariage.
3. Une autre considération que je soumets à ceux qui veulent réfléchir sereinement à ce problème.
L'assimilation aurait, d'abord dans l'ordre juridique, puis dans l'ethos de notre peuple, une conséquence que je n'hésite pas à qualifier de dévastatrice. Si les unions homosexuelles devaient être traitées comme le mariage, celui-ci serait dégradé à n'être plus qu'une des façons de se marier, indiquant que pour l'Etat, il est indifférent que l'on fasse un choix plutôt qu'un autre.
En d'autres termes, l'assimilation signifierait objectivement que le lien de la sexualité avec la procréation et l'éducation des enfants est un fait qui n'intéresse pas l'État étant donné qu'il n'a aucune importance pour le bien commun. Et avec cela, c'est l'un des piliers de notre ordre juridique qui s'écroulerait: le mariage comme un bien public. Un pilier déjà reconnu non seulement par notre Constitution, mais aussi par des systèmes juridiques antérieurs, y compris ceux aussi farouchement anticléricaux que la maison de Savoie.
4. Je voudrais maintenant prendre en considération quelques-unes des raisons invoquées à l'appui de cette assimilation.
La première et la plus courante est que la tâche première de l'Etat est de supprimer toute discrimination dans la société, et dans un but positif, d'étendre le plus possible la sphère des droits subjectifs.
Mais la discrimination consiste à traiter de façon inégale ceux qui se trouvent dans la même condition, comme le dit Thomas d'Aquin reprenant la grande tradition éthique grecque et juridique romaine: "L'égalité qui caractérise la justice distributive consiste à conférer à des personnes différentes des biens différents en rapport avec les mérites de ces personnes (..)"
Ne pas attribuer le statut légal du mariage à des formes de vie qui ne sont pas et ne peuvent pas être des mariages, n'est pas de la discrimination, mais simplement reconnaître les choses comme elles sont. La justice est la Seigneurie de la vérité dans les relations entre les personnes.
On objectera qu'en n'assimilant pas les deux formes, l'État impose une vision éthique de préférence à une autre vision éthique.
L'obligation de l'Etat de ne pas assimiler trouve son fondement non pas dans le jugement éthiquement négatif sur les comportements homosexuels: L'Etat est incompétent en la matière. L'obligation découle de la considération du fait que, pour le bien commun, dont la promotion est la tâche première de l'Etat, le mariage a une importance différente de l'union homosexuelle. Les couples mariés ont le rôle d'assurer la succession des générations et sont donc d'un intérêt public éminent, par conséquent la loi civile doit leur accorder une reconnaissance institutionnelle appropriée à leur tâche. Ne jouant pas ce rôle pour le bien commun, les couples homosexuels ne justifient pas de reconnaissance égale.
Il est évident - la chose n'est pas en question - que les partenaires de même sexe peuvent toujours utiliser, comme tout citoyen, le droit commun à protéger les droits ou les intérêts nés de leur coexistence.
Je ne prends pas en compte d'autres difficultés, parce qu'elles ne le méritent pas: ce sont des lieux-communs, plutôt que des arguments rationnels. Par exemple l'accusation d'homophobie à ceux qui soutiennent l'injustice de l'équivalence, la référence obsolète dans ce contexte à l'État laïc, l'élévation de toute relation affective à un titre suffisant pour obtenir la reconnaissance civile.
5. Je m'adresse à présent au croyant qui a des responsabilités publiques, de quelque sorte que ce soit.
Outre le devoir partagé avec tout un chacun de promouvoir et de défendre le bien commun, le croyant a aussi un grave devoir de cohérence totale entre ce qu'il croit et ce qu'il pense à ce sujet et propose pour le bien commun. Il est impossible de faire cohabiter dans sa propre conscience la foi catholique et le soutien pour l'égalité entre les unions homosexuelles et le mariage: les deux sont contradictoires.
De toute évidence la responsabilité la plus grave incombe à ceux qui proposent d'introduire dans notre système juridique cette assimilation, ou vote au Parlement en faveur d'une telle loi. Il s'agit d'un acte publiquement et gravement immoral.
Mais il y a aussi la responsabilité de ceux qui mettent en œuvre, sous des formes diverses, une telle loi. S'il en était besoin, quod Deus avertat ("Dieu nous en préserve"), le moment venu, nous donnerons les informations nécessaires.
Il est impossible de se considérer comme catholiques si, d'une manière ou d'une autre on reconnaît le droit au mariage entre personnes du même sexe.
Je voudrais conclure en m'adressant surtout aux jeunes. Ayez de l'estime pour l'amour conjugal; que son pur éclat apparaisse à votre conscience. Soyez libres dans vos pensées et ne vous laissez pas imposer le joug de la pseudo-vérité créée par la confusion des mass media. La vérité et la préciosité de votre masculinité et de votre féminité n'est pas définie ni mesurée par des procédures basées sur le consensus et par des luttes politiques.
Bologne, 14 Février 2010
Fête des Saints Cyril and Methodius
Patrons de l'Europe
+ Cardinal Carlo Caffarra
Archevêque de Bologne