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Le Père Blet

Il est mort le 30 novembre 2009. Il avait consacré sa vie à restituer à Pie XII la vérité de sa mémoire. Marie Christine a rencontré sa soeur. (7/2/2010)

Le 1er décembre, Radio Vatican annonçait la disparition du père jésuite français en ces termes : « Le père Pierre Blet, 91 ans, jésuite, historien renommé, défenseur savant et précis de la mémoire de Pie XII (Pie XII et la Seconde Guerre mondiale, Perrin, et Pie XII et la Seconde Guerre mondiale d’après les archives du Vatican, Perrin), s’est éteint le 29 novembre à l’hôpital du Saint-Esprit, près du Vatican, des suites d’un infarctus. Il allait et venait entre Paris, rue de Grenelle, et Rome où il enseignait l’histoire moderne à l’Université grégorienne. C’est une grande figure de la Compagnie de Jésus qui disparaît. »
(source: http://www.dici.org/?p=13482 )

Au lendemain de Noël, mon amie Marie-Christine, après avoir exprimé sa joie de voir publié simultanément le décret proclamant vénérables Jean Paul II et Pie XII, m'écrivait:

Il se trouve que le Père Blet, SJ, dernier spécialiste romain de Pie XII auquel il a consacré sa vie dans ses monumentales recherches, vient de s'éteindre à Rome, le mois dernier, à plus de quatre vingt dix ans. Benoît XVI suivait de très près ses travaux. Son neveu habite un village près du mien.
...
Depuis, elle a pu avoir une conversation téléphonique avec la soeur du religieux, MC Blet.
Cette dernière lui avait fait une confidence très émouvante: la veille de sa mort, son frère avait reçu la visite du Préfet de la Congrégation pour les causes des saints, ex-proche collaborateur de Joseph Ratzinger à la CDF, venu lui annoncer que le Saint-Père était sur le point de signer le fameux décret reconnaissant les vertus héroïque de Pie XII: ultime attention délicate du Pape à son égard.
Et la semaine dernière, elle a pu rencontrer Mlle Blet, et avoir avec elle un long entretien.
Cette dame lui a confié quelques articles récents de l'OR sur son frère. Marie-Christine me les a envoyés, et par la magie de l'OCR (reconnaissance optique de caractères), je peux les reproduire ici.

Marie-Christine écrit:
Déjà, je peux vous annoncer que les jésuites ont retrouvé dans l'ordinateur du Père Blet, une note synthétique qu'il venait d'écrire sur toute son oeuvre au sujet de Pie XII. Cette note a été confiée à un éditeur parisien et ne devrait pas tarder à paraître. J'ai appris aussi que se tiendra au mois de mai à la Grégorienne, un colloque sur le Père Blet. J'ai encouragé M.C. Blet à s'y rendre puisqu'elle est invitée en lui disant qu'à 83 ans, on était jeune puisqu'on avait l'âge du Pape....

 



L'historien jésuite Pierre Blet nous a quittés, il a été pendant soixante ans au service du Saint Siège.
Intellectuellement au coeur du catholicisme
Andrea Riccardi
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« Lisez le Père Blet »- répondit Jean Paul Il aux journalistes qui l'interrogeaient sur Pie XII et sa politique pendant la Deuxième guerre mondiale.
Le Pape Wojtyla venait de l'Eglise Polonaise, qui non seulement avait souffert pendant l'occupation allemande, mais avait aussi vécu les problèmes de sa communication avec Rome et avait fait l'objet d'une offensive de la propagande nazie qui donnait du Pape Pacelli le portrait d'un Pape éloigné des de la vie des Polonais.
Jean-Paul Il connaissait le caractère dramatique et la complexité des problèmes de l'Eglise pendant la dernière guerre mondiale et pour, cette raison avait dit : « Lisez le Père Blet»
En effet Pierre Blet était tout autre chose qu'un écrivain de cour, c'est-à-dire quelqu'un pour lequel l'histoire coïnciderait avec l'intérêt de l'institution, contrairement à ce qui a été trop longtemps imaginé.
Il fut en vérité un historien attentif à la complexité, un chercheur qui ne négligeait jamais une analyse rigoureuse des archives.
Il s'est éteint à plus de quatre-vingt dix ans sans jamais perdre sa passion pour le débat historique.
Encore récemment, dans une dernière interwiew sur les « silences » de Pie XII, à celui qui lui demandait ce que l'on trouvera dans les archives vaticanes au moment de leur ouverture, il répondait: « on trouvera que nous n'avons rien caché »
Pierre Blet avait été l'un des quatre historiens jésuites appelés par Paul VI à publier les documents tirés des archives vaticanes à la suite des polémiques sur les « silences » de Pie XII au début des années Soixante.
Le Pape Montini avait pris une décision courageuse qui conduisit à la publication de douze volumes épais contenant les documents du Saint Siège entre 1939 et 1945.
Ces volumes constituent une source essentielle pour ceux qui désirent reconstituer non seulement l'histoire de l'Eglise en cette période, mais aussi pour ceux qui souhaitent connaître l'histoire de la guerre dans toutes ses facettes diplomatiques, sociales et religieuses.
L'objection qui a été soulevée à propos de l'oeuvre des quatre jésuites (qui a été achevée avec la publication du dernier volume en 1981) est que l'on ne peut pas remplacer le contact direct avec les sources d'archives.
Il est vrai que la recherche d'archives est une chose et que l'utilisation des sources issues de la presse en est une autre ; mais on peut être certain que les jésuites ont réalisé un travail scrupuleux et honnête, même lorsque certains `documents à publier n'étaient pas entièrement favorables à l'exaltation de l'action du Saint Siège.
Le choix de faire connaître la documentation du Saint Siège fut un acte de courage et de confiance dans l'histoire de la part du Pape Montini, si l'on considère que les premiers volumes ont paru moins de 10 ans après la disparition de Pie XII.
Paul VI qui, pendant la guerre avait étroitement collaboré avec le Pape Pacelli , était convaincu, entre autre par expérience personnelle, que le Saint Siège avait fait dans ces circonstances le choix le plus juste.
Quelquefois, l'utilisation des documents publiés par les jésuites aurait enrichi la recherche historique, souvent méfiante à l'égard de cette source. Il suffit en effet de parcourir les douze volumes sur le saint Siège et la Guerre mondiale pour se rendre compte ne, fut-ce que par l'étendue de l'analyse critique, du sérieux et de la rigueur du travail réalisé par les quatre historiens jésuites dans le coeur de l'Eglise catholique.
Pierre Blet a rendu tant de services à l'Eglise, il a été consulté sur de nombreuses questions, il a enseigné non seulement à l'Université Pontificale Grégorienne et il a également formé de jeunes ecclésiastiques qui se préparaient au service international du Saint-Siège.
C'était un homme érudit et sage qui connaissait bien l'histoire et le présent du gouvernement central (le l'Église.
Il avait un sens élevé du service à l'Eglise, mûri par tant d'années d'engagement humble et actif.
Sa forte appartenance au Saint-Siège ne fait pas de lui un historien partisan ou un apologiste incapable de voir la réalité.
Toutefois il refusait une approche à sensation ou à scandale de l'histoire d'une institution dont il connaissait la complexité, la fragilité et la grandeur.
Sa vie était extrêmement retirée, à la différence de son confrère Robert Graham qui aimait, davantage que lui, les débats et les rencontres.
J'ai rencontré une fois Pierre Blet dans un jury de thèse à l'Université de Nanterre en France où nous étions conviés tous les deux par l'ami et historien Philippe Levillain.
Il me confia : « je suis un homme discret ».
Il l'était. Il avait commencé à parler, en donnant des interview, seulement lorsqu'il est devenu le dernier témoin de cette grande recherche sur les archives de Pie XII.
Il était donc sorti de sa réserve habituelle. Il a continué jusqu'à la fin dans cette voie parce qu'il était convaincu que le débat politique ne rendait pas justice à la vérité de l'histoire du Pape Pacelli et de l'Eglise pendant la seconde guerre mondiale.
Sur ce sujet il avait publié un volume dans lequel il rappelait l'exigence de rester fidèle aux faits et aux documents sans oublier de prendre en considération le contexte international dans lequel le Saint-Siège se trouva à oeuvrer à partir de 1939.
Homme d'un sens élevé de l'Eglise, le Père Blet n'était pas un historien partisan justement parce qu'il venait d'une école qui lui avait appris à se référer aux documents et aux faits.
Il n'était pas historien d'histoire contemporaine mais était issu d'une tradition de recherches sur des périodes plus anciennes plus particulièrement sur l'histoire moderne.
Il avait publié différentes études sur les clergés français au XVIIème et au début du XVlllème siècle, pendant le règne de Louis XIV en prenant appui sur la documentation des assemblées du clergé et d'autres sources précieuses.
De cette expérience, il tirait sa rigueur dans la recherche et dans l'usage des archives.
Il était aussi expert dans la diplomatie pontificale, dont il avait donné un ample panorama de son origine jusqu'au début du XIXème.
Spécialiste de l'âge moderne et des relations internationales, rompu aux recherches complexes en archives, le Père Blet affronta les années Pie XII avec la conviction, mûrie dans ses longues fréquentations des chartes du Saint-Siège, que l'Eglise n'avait rien à craindre de l'histoire.

C'est la conviction d'une école d'histoire ecclésiastique qui, de l'ouverture des archives vaticanes avec Léon X11, joint rigueur scientifique et amour pouf I'Eglise.
Cette ttradition perd, avec la disparition du Père Blet, un membre éminent.

L'Osservatore Romano : 30 novembre - 1er décembre 2009

 



Pas d'Église sans Rome
Philippe Levillain
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Le Père Blet avait un prénom : Pierre.
Il était utilisé rarement.
On disait tout simplement le Père Blet. Et pourtant il était tout là dans le sens de son onomastique en tant que membre de la Compagnie de Jésus dans laquelle il était entré en 1937, en se consacrant au service de Pierre.
C'est cette obédience aux règles de l'Ordre choisi par lui qui l'aurait emmené à accepter de participer d'une façon prépondérante à l'édition des « Actes et documents du Saint-Siège relatif à la Seconde guerre mondiale », ouvrage voulu par Paul VI après les insinuations spectaculaires du « Vicaire » de Rolf Hochhut de 1964 qui stigmatisait Pie XII pour sa complicité dans l'extermination du peuple juif, la Shoah.
Né en 1918, le Père Blet fut appelé en 1950 comme professeur d'histoire moderne auprès de la faculté d'histoire ecclésiastique de l'Université Pontificale Grégorienne. Il vécut intensément les années de Pie XII.
Il enseigna l'histoire diplomatique auprès de l'Académie Pontificale Ecclésiastique de 1965 à 1995 et il forma plusieurs grands diplomates du Saint-Siège au sein d'une institution appelée autrefois l'Académie des nobles ecclésiastiques.
La matrice de sa pensée par rapport è l'Église s'annonce dans la thèse soutenue en 1959 « Les clergés de France et la monarchie. Etudes sur les assemblées générales du Clergé de 1615 à 1666 ».Le Père Blet avait bien vu : il n'y a pas d'Église sans Rome. La monarchie avait besoin d'avis consultatifs.
Le façon spontanée, le Père Blet établissait un lien entre la diplomatie, le Saint-Siège et le tempérament français.
Son grand ouvrage, publié en 1962, sur Girolamo Ragazzoni, Evêque de Bergame, témoignait de cette extraordinaire capacité de regard de Rome sur un monde déchiré.
La vision de Jean XXIII y avait contribué, en tant que Pape, et malgré la brièveté du pontificat.
L'oeuvre pourtant riche du Père Blet, dont le dernier livre « Richelieu et l'Eglise » (Bruxelles, André Versaille Editeur, 2007) a connu un grand succès en France, ne suffit pas à rendre compte de sa surprenante personnalité.
Homme pieux, modeste, toujours accueillant, toujours surpris par l'intérêt qu'on lui témoignait, le Père Blet vivait à la Grégorienne la plénitude de la vie, au quatrième étage, au long couloir où il accompagnait les hôtes avec une très grande courtoisie.
Il parlait de choses importantes et, surtout à la fin de sa vie, il se préoccupait que fusse comprise la sainteté de Pie XII, Pape désespéré, Pape sacrifié à la raison d'État : celle de l'état du christianisme qui peut être serait mort.
Il affrontait les événements avec sérénité et avec confiance.
C'est ainsi qu'il a accepté calmement l'ordre historique de ses convictions.

L' Osservatore Romano : 30 novembre, 1er décembre 2009

 


Et le Roi Soleil se coucha devant le Pape Pacelli
Rafaelle Messandrini
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Le Père Blet à l'hôpital?
Je l'ai trouvé très lucide, plein de vie malgré ses sérieuses difficultés de santé.
Il était vraiment amusé par le cancan médiatique suscité par ses déclarations sur Pie XII et sur la « Humani generis unitas », dont, jour après jour, il était tenu au courant par le confrère Peter Gumpel, le «postulateur » du procès en canonisation de Pie XII.
C'est ainsi que Filippo Rizzi, le collègue de « Avvenire » auquel l'historien jésuite avait donné il y a quelques jours sa dernière interview, raconte à notre journal ses impressions et ses souvenirs à chaud, sur la nouvelle à peine parvenue de la disparition du dernier des quatre savants de la Compagnie de Jésus qui, afin de satisfaire la demande de Paul VI, avait publié les « Douze volumes des actes et documents du Saint Siège relatifs à la Seconde guerre mondiale » (Città del Vaticano, Libreria Editrice Vaticana, 1965-1982) .

Après la mort des Pères Burkhart Schneider (1976) et Angelo Martini (1981) survivaient Robert Graham qui, à la fin de 1981, avait écrit avec fierté à un vieil ami journaliste : « Mission accomplie : deux disparus » et lui-même Pierre Blet.
Le Père Graham mourra en 1997, après 15 ans d'études et d'approfondissements intenses.
Sur la brèche, il ne restera plus que Pierre Blet, lui qui était le moins spécialisé en histoire contemporaine des quatre historiens
Au début, comme il le racontait, il accepta la mission par obéissance.
Ses intérêts spécifiques concernaient surtout la France du XVllème siècle, du Roi Soleil et de Richelieu, comme sa bibliographie le démontre clairement.
Et pourtant le jésuite se serait grandement passionné pour le personnage de Pie XII. Un pape dont 1'attitude accorte, réservée et active dans le silence, rappelait Pierre Blet en ces derniers jours, aurait eu une reconnaissance signifcative de la part de Martin Gilbert, le biographe de Winston Churchill.
En effet, pour Gilbert ce fut l'attitude de Pie XII qui permit de sauver un grand nombre de juifs de l'extermination.
Le Père Blet, comme le rappelle encore Rizzi, après s'être consacré aux années de la guerre, espérait pouvoir écrire une synthèse du pontificat du Pape Pacelli.
En étudiant ses encycliques, il était certain de voir en lui l'authentique précurseur du concile Vatican II.

L'Osservatore Romano : 30 novembre, 1er décembre 2009
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Exposition "Le Pape à Paris" A propos du dernier billet du Père Scalese