Avant la visite à la Synagogue de Rome
L'article apaisant d'Andrea Tornielli (15/1/2010)
Andrea Tornielli publie un article sur son blog, pour expliquer les enjeux de la visite du Saint-Père à la Synagogue, le 17 janvier.
J'apprécie sa volonté d'apaisement: il ne veut pas jeter de l'huile sur le feu de la polémique. Il fait bien, ce n'est pas le moment. D'autres s'en chargent, puisque la presse italienne donne aujourd'hui un large écho au refus du Rabbin Laras, président du rabbinat italien de venir accueillir le Pape aux côtés de son confrère Di Segni de Rome.
Tornielli rappelle (c'est important) que "Papa Ratzinger est l'un des théologiens qui ont le plus étudié les racines juives de la foi chrétienne et le lien unique qui unit les croyants en Jésus au peuple d'Israël".
On relira à ce sujet l'important discours prononcé en 1994 par le Cardinal Ratzinger, lors d'un voyage en Terre Sainte, où il disait "L'histoire des rapports entre Israël et la chrétienté est mêlée de larmes et de sang..."
A lire ici: Juifs/chrétiens: des larmes et du sang
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Je retiens la belle conclusion d'Andrea Tornielli
"Ce qui importe, dimanche, c'est le geste humble et simple de l'évêque de Rome, qui, traversant le Tibre, rend visite à une communauté juive ancienne, plus ancienne que la chrétienne, et tend une main amicale, conscient qu'en une époque où la religion devient parfois un motif pour justifier la haine et la violence, les chrétiens et les juifs - laissant derrière eux un passé douloureux - savent dialoguer et cohabiter dans le plein respect réciproque de leur indépendance, identité et diversité."
Puisse cette main amicale être saisie et serrée avec le même sentiment d'amitié et de loyauté.
Visite du Pape à la synagogue: main tendue dans le respect mutuel
Andrea Tornielli
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Dimanche après-midi, Benoît XVI se rendra à la synagogue de Rome.
Ce n'est pas la première fois qu'en tant que pape, Joseph Ratzinger entre dans une synagogue: il l'a déjà fait à Cologne (2005) et à New York (2008).
Le geste de dimanche, en répétant la visite effectuée par le Pape Jean Paul II en 1986, est particulièrement important car il intervient à un moment délicat dans les relations entre catholiques et juifs, exactement un an après l'affaire Williamson et moins d'un mois après la décision du pape de promulguer le décret sur les vertus héroïques de son prédécesseur Pie XII, un choix critiqué et contestés par le monde juif.
L'affaire Williamson, on le sait maintenant, a été accompagnée d'obstacles et de sous-estimation de la part du système d'information du Saint-Siège, et de la Curie. Et le pape, tout en ignorant les déclarations négationistes de Williamson, a humblement donné un grand exemple à ses propres collaborateurs en écrivant une lettre aux évêques du monde entier qui restera comme l'un des documents les plus élevés et les plus poignants de son pontificat, expliquant les raisons de cette révocation.
Si l'affaire Williamson a été considérée comme une erreur aussi et surtout pour le manque de rapidité dans la réponse du Vatican, une erreur qui s'est produite à l'insu de Ratzinger, le feu vert à la béatification du pape Pacelli, qui a fait beaucoup parler, et a été critiqué par de nombreux représentants du monde juif, ne peut certainement pas être considéré comme un accident de parcours. Benoît XVI s'était donné du temps pour décider, il avait fait à nouveau étudier les documents du processus de béatification, avait ordonné de nouvelles recherches dans les archives du Vatican. Et quand, le 19 Décembre, à la surprise générale, il a communiqué au Préfet de la Congrégation pour les Causes des Saints, Mgr Amato, sa décision positive sur la signature du décret, il l'a fait en pleine conscience. Également conscient de l'impact possible que sa décision aurait, à la veille de la visite à la synagogue.
Papa Ratzinger est l'un des théologiens qui ont le plus étudié les racines juives de la foi chrétienne et le lien unique qui unit les croyants en Jésus au peuple d'Israël. Il a prononcé à plusieurs reprises des mots clairs de dénonciation de l'antisémitisme (qui n'est jamais tout à fait en sommeil), a fait un discours émouvant sur les victimes de l'Holocauste lors de sa visite au printemps dernier au mémorial de Yad Vashem à Jérusalem. Mais s'il a promulgué le décret sur Pie XII, c'est qu'il ne croit pas en la reconstruction d'une certaine historiographie qui fait du Pape Pacelli un bouc émissaire.
Hier, le grand rabbin de Rome Riccardo Di Segni, a déclaré au journalistes vouloir aborder le problème Pie XII dans son discours de bienvenue au Pape Benoît XVI, se demandant si son hôte illustre citerait Pacelli. Il semble peu probable que le Pape se rende à la synagogue pour parler de Pie XII, sachant combien est grande la sensibilité de ses interlocuteurs. Au point que le porte-parole du Vatican lui-même, le Père Federico Lombardi, après la promulgation du décret, avait expliqué que la décision du pape et la progression du processus de béatification n'avaient pas l'intention de clore le débat et la recherche historique sur Pie XII.
Ce qui importe, dimanche, c'est le geste humble et simple de l'évêque de Rome, qui, traversant le Tibre, rend visite à une communauté juive ancienne, plus ancienne que la chrétienne, et tend une main amicale, conscient qu'en une époque où la religion devient parfois un motif pour justifier la haine et la violence, les chrétiens et les juifs - laissant derrière eux un passé douloureux - savent dialoguer et cohabiter dans le plein respect réciproque de leur indépendance, identité et diversité.