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Eloge d'un Pape

Après la lettre pastorale aux catholiques irlandais, Carlota a traduit deux articles espagnols vraiment merveilleux, un de José Luis Restán, et un du Père Alberto Rojo Mejía. A savourer. (23/3/2010)

Carlota m'écrit:

Lettre irlandaise : des réactions espagnoles.
Je trouve très réconfortant d’entendre de belles et fortes paroles d’affection concernant notre Saint Père.
En voici encore quelques exemples récents. Celle, écrite dans un langage direct mais tellement sincère, du Père Alberto Rojo Mejía (j’avais notamment traduit son texte sur Mgr Romero, cf ci-contre) et celle de José Luis Restán.

Éloge d'un Pape juste par le P. Alberto Rojo Mejià

L’histoire nous dit qu’il y eut des époques où être Pape, c’était aussi avoir une position sociale enviable; qu’il y en eut où le Sain Père était un monarque absolu, qui disposait de l’humain et du divin en toute liberté, à qui personne ne pouvait demander des comptes, et chez qui se rendaient des empereurs et des rois. Il y eut des Papes qui n’eurent pas un pouvoir temporel aussi important mais qui furent d’authentiques princes, qui aimaient la bonne vie, étaient de véritables mécènes des arts et menaient une vie facile. Dans l’histoire, bien sûr, nous avons de tout et il y eut des Souverains Pontifes à la vie humainement enviable. Ce n’est pas pour être fiers d’eux, mais tout simplement parce qu’il y en eut.

Mais une histoire aussi longue, nous parle aussi de Papes martyrs, de papes prisonniers du pouvoir temporel, de papes persécutés et calomniés. Je ne pourrais dire s’il y en a eu plus de ce type que des autres, mais il y en a eu, et pas qu’un peu. N’ont pas manqué non plus des Papes exemplaires de vertus, même aux pires temps de l’Églises, des ascètes, des mystiques, d’authentiques missionnaires depuis leur siège romain. De ces Papes, plein de sainteté, il y en eut beaucoup.

Allez, l’histoire du Pontificat romain nous enseigne de tout, du plus sublime au moins exemplaire. Le Vingtième siècle a été un moment particulièrement difficile pour les souverains pontifes: le siècle des guerres, des totalitarismes athées, de la révolution sexuelle, du laïcisme, etc. ont rendu difficiles le travail de l’Église, et les Papes l’ont ressenti comme l’on peut se l’imaginer. Et cependant le siècle passé a été curieusement une concentration difficile à reproduire de Papes plein de sainteté: Saint Pie X, le Vénérable Pie XII, le Bienheureux Jean XXIII, les Serviteurs du Christ Paul VI et Jean-Paul Ier, le Vénérable Jean-Paul II sur le point d’être béatifié…
Des papes très différents entre eux mais avec un dénominateur commun: Un immense amour pour l’Église et l’humanité.

Et ce Vingt-et-unième siècle a commencé avec un Pape que je n’ose pas encore appeler saint mais qui me paraît un homme admirable, un Pape juste, au sens biblique et philosophique, un homme de Dieu des pieds à la tête. Ce qui a tout d’abord attiré mon attention c’est que, habitué à faire toujours du mieux possible ce que l’Église lui a demandé, il a accepté d’être Pape, alors même qu’il en avait le moins envie. Quand quelqu’un est sur le point de fêter ses quatre-vingts ans, toute ambition humaine possible est déjà bien loin et le pauvre cardinal Ratzinger pensait seulement à une retraite tranquille entourée de livres et d’êtres chéris. Il lui revint d’être Pape et il l’accepta, bien que les ragots du Vatican racontent qu’il a demandé qu’on recommence le vote du conclave pour s’assurer que les cardinaux le voulaient vraiment lui. Se non è vero, e ben trovato, disent les Italiens.

Le pontificat a apporté peu d’honneurs humains à Joseph Ratzinger et beaucoup d’amertumes.
Combien de couleuvres lui a-t-il fallu avaler, comme l’on dit! En commençant par les médias qui le regardaient avec peu de sympathie parce qu’il n’était pas Jean-Paul II, ni ne lui ressemblait, et parce que les médias étaient toujours disposées à le juger en étant hyper-critiques, - quand ce n’était pas en interprétant mal ses paroles, comme cela s’est passé à Ratisbonne et à d’autres occasions.
Il est ridicule pour ne pas dire honteux de lire des articles de journalistes dont on voit bien qu’en matière de théologie et même de culture générale, ils ne savent pas le minimum, et qui pourtant se permettent de juger les mots prononcés par ce Pape, l’un des intellectuels les plus profonds de notre époque.
Par ailleurs, c’est sur ce Pape qu’est retombé toute cette affaire des cas de pédophilie, une affaire à laquelle il s’est trouvé mêlé alors qu’il n’y est pour rien . Et je le dis parce que c’est certain. Mgr Scicluna, le Promoteur de Justice de la Congrégation de la Foi, a dit qu’une mauvais traduction du texte pontifical en anglais (lire ici: L'interview de Mgr Scicluna ) avait amené beaucoup de prélats à cacher ce type de cas, ce qui est lamentable. Mais le résultat est que, Jean-Paul II étant déjà malade, c’est surtout à Benoît XVI qu’est revenu l’inconvénient d’encaisser les craintes, les critiques, l’incompréhension des bien pensants du monde, c’est à lui qu’est revenu de demander pardon, de supporter la honte, etc. Les Etats-Unis, l’Irlande, l’Allemagne, l’Australie, …il semble que la chose ne va jamais finir.

Ces Messieurs les évêques, ceux-là même qui depuis le Concile, se gargarisent en défendant l’indépendance des églises locales, en se retrouvant devant ces problèmes, se sont vite réfugiés dans la personne du Pape, pour que toutes les critiques se retournent sur lui, et que les yeux furieux des autres ne se fixent pas sur eux.
Benoît a accepté la patate chaude qui lui est arrivé des diocèses blessés par les scandales et je pense qu’il l’a portée avec une grande dignité, surtout avec beaucoup d’humilité.
Sa lettre peut ne pas plaire à certains, à moi elle semble un chef-d’œuvre d’amour pour les âmes souffrantes de l’horrible plaie des curés indignes.
De haut en bas, ce Pasteur a montré qu’il avait un cœur rempli de miséricorde en ouvrant les bras aux lefebvristes et aux anglicans, et pour cela il a dû supporter les critiques de tous genres, certaines impitoyables, et ce qui est pire, depuis l’intérieur même de l’Église, d’ecclésiastiques illustres qui ont démontré qu’ils avaient peu ou pas du tout de miséricorde, et pardon si ces paroles paraissent dures.
Le Pape a subi l’indicible pour avoir été mal interprété par ceux qui devraient théoriquement donner des témoignages de miséricorde et de compassion, et sa lettre aux évêques de l’Église en ce qui concerne les lefebvristes est de celles qui marquent une époque. En elle il y a de la douleur mais en aucun cas de la rancoeur.

Benoît XVI porte toutes ces difficultés avec le sourire aux lèvres, il ne montre pas le visage plein d’amertume montré durant de nombreuses années par Paul VI, que les souffrances résultantes de la situation de l’Église plongèrent dans une profonde tristesse. Il sourit et il continue à travailler, à écrire, à recevoir des centaines de milliers de pèlerins, à encourager la sainteté des prêtres et la dignité de la liturgie, en avançant à pas de géant dans l’œcuménisme, en réalisant des voyages qui dépassent ses forces d’octogénaire, afin d’être agréable aux églises qui demandent sa présence. C’est un exemple pour tout ministre de l’Église, surtout ceux qui se trouvent en grande difficulté. Moi, qui personnellement ne me trouve pas en de telles difficultés, la figure de ce Pape, m’inspire et m’encourage pour ne jamais cesser de me dépenser à donner ma vie pour l’Église et pour les âmes.

Un Pape juste, à tous points de vue, et je pense qu’il mérite cet éloge, surtout en ce moment alors que tant de gens le critiquent.
Je ne crois pas que cela lui enlève la paix, car il ne lui manque pas l’affection de nombreux millions de catholiques dans le monde entier. Par ailleurs, comme homme de profonde foi, il sait que si on a traité le Maître comme Il a été traité, que peut espérer son Vicaire sur la terre ?
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La douleur, semence de guérison, JL Restàn

C’est un document inédit dans l’histoire de l’Église.
Le Pape s’est adressé à son peuple, à découvert, le cœur sanglant et des larmes aux yeux, sans rhétorique ni faux recours, avec l’unique arme de la foi et de la confiance en ce Dieu qui a promis de ne pas abandonner son Église.

Tout est là, sans aucun trucage, devant Dieu et devant les hommes : l’horrible trahison de certains de ces fils, un obscurcissement dans les cœurs que même des siècles de persécution n’avaient pas réussi à obtenir et la honte pour l’incapacité de quelques pasteurs du troupeau ; mais aussi la lumière qui vient des siècles de tradition chrétienne, la conscience du bien qui est né de cette lumière et qui s’est propagé par le monde à travers des générations de familles, de moines, de missionnaires. Père et frère, maître de la foi apostolique et chrétien scandalisé et blessé par ces terribles crimes : c’est ainsi que s’est présenté Benoît XVI devant chaque catholique d’Irlande. A tous, le Pape propose, le chemin de la douleur de la repentance et de la pénitence. Des mots que les camelots de la postmodernité peuvent mépriser, mais qui sont un chemin modèle dans l’histoire. Le chemin sera long, parce qu’il s’agit de guérir les cœurs et d’éclairer les consciences, et cela ne s’obtient pas seulement avec des décrets et des mesures disciplinaires, bien qu’elles soient nécessaires. Il s’agit surtout de boire de nouveau à la fontaine vivante de la charité dans la vérité, que l’Église bien qu’elle soit blessée dans son corps, ne cesse jamais d’amasser.

La Lettre signale quelques uns des éléments qui ont donné lieu à la crise actuelle. Une incapacité des responsables de l’Église en Irlande à affronter le changement social accéléré des dernières décennies, la décadence de la vie sacramentelle, l’irruption dans les domaines ecclésiastiques de formes de pensée reprises de la culture environnante sans la nécessaire référence à l’Évangile
, les procédés inadaptés pour sélectionner les candidats au sacerdoce et à la vie religieuse, leur insuffisante formation spirituel et humaine. Elle reconnaît aussi « une préoccupation hors de propos pour le bon renom de l’Église et pour éviter le scandale » dont le résultat fut la non application des mécanismes de sanction, et la non protection de la dignité des personnes. Tout cela a besoin d’être reconnu, jugé à la lumière du Christ et assaini jusqu’à la racine, et pour cela le Pape ordonne avec son autorité pleine et entière une série de mesures qui vont se mettre en œuvre dans toute l’île. Concrètement il a décidé une Visite apostolique dans divers diocèses, séminaires et Congrégations religieuses, ainsi qu’une grande Mission au niveau national pour les évêques, les prêtres et les religieux, qui leur permette de redécouvrir les racines de leur vocation.

Mais peut-être que le son le plus poignant et le plus émouvant de cette lettre se trouve au point 6 dans lequel Benoît XVI s’adresse directement aux victimes des abus : « Vous avez immensément souffert et cela m’afflige tant. Je sais que ne peut effacer ce que vous avez supporté. Votre confiance a été trahie et votre dignité violée...Je sais qu’à certains d’entre vous il est même difficile d’entrer dans une église depuis ce qui est arrivé… ». Je crois qu’aucun Pape n’a parlé ainsi dans toute l’histoire. Il reconnaît qu’il sera difficile aux victimes de pardonner et de se réconcilier avec l’Église, mais il les implore de ne pas perdre l’espérance, de se confier au Christ, qui porte encore les blessures de sa souffrance injuste. Il les assure que cette Église rénovée par la pénitence et la charité continue à être leur maison, le lieu où elles pourront expérimenter la guérison intérieure et la paix et il leur annonce qu’il est disposé à les rencontrer en tête à tête comme il l’a déjà fait aux Etats-Unis et en Australie.


Le ton de la Lettre devient dur jusqu’à l’extrême quand il s’adresse à ceux qui ont abusé des enfants: « Vous avez trahi la confiance déposée en vous par les jeunes innocents et par leurs parents. Vous devrez répondre de cela devant Dieu Tout Puissant et de devant les tribunaux dûment constitués. Vous avez perdu l’estime des gens d’Irlande et jeté la honte et le déshonneur sur vos semblables…À côté de l’immense mal causé aux victimes, un mal énorme a été fait à l’Église et à la perception publique de sacerdoce et de la vie religieuse ». Il leur réclame le repentir, l’expiation, la reconnaissance publique de leur faute, et de se soumettre aux exigences de la justice, mais il les invitent à ne pas désespérer de la miséricorde de Dieu.

Ils résonnent aussi, paternels et sévères en même temps, les mots adressés aux évêques d’Irlande, parmi lesquels certains ont échoué lamentablement au moment d’affronter cette crise. Le Pape reconnaît que c’est difficile de comprendre l’étendue et la complexité du problème et prendre les décisions adéquates, au vu des avis contradictoires des experts, mais même ainsi il soutient que «de graves erreurs de jugement ont été commises et qu'il y a eu des manquements dans la gestion », ce qui a miné gravement l’autorité des évêques. C’est le moment d’un profond examen de conscience, d’une purification et d’un renouveau personnel indispensables. Il demande aussi une pleine collaboration avec les autorités judiciaires et selon les normes établies par l’Église pour la protection de l’enfance. Jamais plus la culture de la dissimulation, et le silence.

Les mesures établies pour prévenir et punir ces délits sont indispensables, mais le Pape avertit les catholiques d’Irlande qu’elles ne suffiront pas pour dépasser la crise. « Il faut une nouvelle vision qui inspire à la génération actuelle et aux futures générations la thésaurisation du don de notre foi commune…Nous devons trouver de nouveaux moyens pour transmettre aux jeunes la beauté et la richesse de l’amitié avec Jésus-Christ dans la communion de son Église » ; C’est cela le programme que Benoît XVI propose à toute l’Église qui chemine en Irlande. La lettre conclut avec une très belle prière dans laquelle le Pape Ratzinger parle comme un catholique irlandais : « Que notre douleur et nos larmes, notre sincère effort pour redresser les erreurs du passé et notre ferme intension d’amendement, donnent une abondante moisson de grâce ».

Leçon de Benoît XVI à trois cent soixante degrés et qui marquera l’histoire. Pour les cyniques et les hypocrites, qui ne peuvent que rester déconcertés ; pour les arrivistes qui cherchent depuis l’intérieur la déconstruction du corps ecclésial; pour les gardiens d’un ordre faux qui conseillent de ne pas reconnaître le dommage et de laver le linge sale en famille. Mais surtout pour l’espérance confiante des victimes et de tous ceux qui désirent humblement guérir le corps blessé mais aimé de l’Église.

Ma lecture de la lettre aux irlandais Cinquième colonne