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Un tournant dans l'oecuménisme

Traduction et commentaire du dernier article du Père Scalese: oecuménisme et "uniatisme" (23/10/2009)

Certes, il faut du recul pour décider si un évènement est "historique" ou pas. En fait, il faut tout simplement laisser au temps ... le temps de faire l'histoire. Laisser "du temps au temps", comme le dit plus bas le Père Scalese.
Cela peut prendre des siècles.
Je ne sais donc pas quelle sera la portée de l'acte de mansuétude que Benoît XVI a accompli cette semaine en accueillant la Traditional Anglican Communion (une générosité entièrement dans la logique de la levée d'excommunication qui a fait couler tant d'encre), mais je prends le risque (mesuré!) de faire un pari: ce sera un acte historique, une pierre milliaire du Pontificat.

Je l'ai compris un peu par hasard.

D'abord, c'est vraiment par hasard que j'ai choisi de "couvrir", dans la mesure de mes moyens, l'évènement: ma première réaction, en lisant les comptes-rendus d'agence sur Internet (black-out, évidemment, sur les autres medias) a été l'enthousiasme, mais aussi le sentiment que les modalités techniques de la réintégration ne me concernaient pas et surtout, que je n'y comprenais pas grand chose.
Trois faits m'ont aidée à y avoir un peu plus clair, par ordre chronologique:

-> Dès hier, les réactions frileuses des leaders français de l'opposition au Pape (en particulierici: La Croix: modèles d'unité ). Ils ont visiblement avalé de travers, et ils se trouvent pris de court: eux qui réclamaient à cors et à cris une meilleure "communication" du Vatican, ils sont servis... mais il faut croire qu'ils attendaient autre chose, ou que c'était un mauvais procès
-> La réaction formidable de Carlota , qui a tout de suite vu plus clair que moi au sujet des uniates.
-> Et enfin, les analyses du Père Scalese, qui avait parlé du rapprochement, et en termes prophétiques, ô combien! dès le mois de février dernier (cad au tout début de son blog) et dont le titre de l'avant dernier billet résumait assez bien l'état des lieux: "Oecuménisme, et oecuménisme".

En réalité, Benoît XVI a réinventé l'oecuménisme, que les partisans de l'"esprit du Concile" envisageaient comme de stériles "réunions" avec les "frères séparés", où l'on échange sourires et poignées de mains (voire prières communes) mais où surtout, surtout, on n'essaie pas de convaincre, vous n'y pensez pas, puisque toutes les vérités se valent et que les frères séparés détiennent forcément une parcelle de vérité, voire plus.... C'est l'oecuménisme à la Kasper. Désolée, ce mauvais fruit de cet "esprit du Concile" vient de prendre un coup de vieux.
Benoît XVI, lui, a pris au contraire, les choses à bras le corps, et on voit le résultat.
Cela me fait penser à une pub des années 90 pour une marque de soda, ou d'ordinateurs, je ne sais plus bien(c'est dire!), où on voyait en action l'inventeur d'un saut qui porte son nom, le "Fosbury Flop": "Think different".
Ici, on pourrait dire aussi "Think different", et parler de "Benedict Oecumenism"!
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Le Père Scalese récidive aujourd'hui avec son billet intitulé Oecuménisme et «uniatisme» , dont voici ma traduction.
C'est le meilleur antidote contre le poison politiquement et religieusement correct qu'une certaine presse catholique essaie sournoisement de nous injecter.

Le billet prend comme point de départ l'éditorial du 21 octobre dans le quotidien de la Conférence épiscopale italienne, L'Avvenire, où l'on pouvait lire, tiens donc!: "Certes, pour l'Eglise catholique, il aurait été facile de recourir à des solutions plus simples, comme une sorte d' «uniatisme»".
Un lecteur, qui attirait son attention sur l'article, lui posait la question: "Mais qu'est-ce que ça veut dire? Ça ne vous semble pas offensant pour nos frères Catholiques Orientaux? Mais qu'est-ce que c'est que ce mépris pour l'uniatisme?".

Texte ici: http://querculanus.blogspot.com/...
Ma traduction:

Oecuménisme et «uniatisme»

Vendredi 23 Octobre 2009
(....)

Je me suis moi aussi demandé ce que Mazza (l'éditorialiste, ndt) voulait dire avec sa déclaration, qui ne semble pas claire du tout. Mais il ne me semble pas reconnaître dans ses paroles quelque chose d'offensant envers nos frères d'Orient. Même si - il faut le reconnaître - il est devenu aujourd'hui très à la mode de regarder avec un certain mépris ce type d'œcuménisme "d'une autre époque".

Nous savons que les orthodoxes ont toujours rejeté catégoriquement le phénomène uniate, et qu'ils le considérent comme un des obstacles sur le chemin de l'œcuménisme. Rien d'étonnant: dans leur conception ecclésiologique, il est impensable que sur le même territoire, plusieurs juridictions puissent exister. L'Orient est le «territoire canonique» de l'Église orthodoxe; il ne peut exister dans ces régions, d'autres églises, qu'elles soient de rite latin ou oriental; le chrétien de l'Orient ne peut être qu'orthodoxe. Même si, de manière assez inexplicable, ils ont eux-mêmes en Occident leurs évêques, qui assistent pastoralement les fidèles orthodoxes. Je pose la question: l'Occident ne devrait-il pas être «territoire canonique» de l'Eglise latine?

L'uniatisme, c'est la façon dont l'Église catholique "a fait l'œcuménisme" dans le passé, jusqu'au Concile.
Il est important de le rappeler, parce que parfois, on croit que le souci de l'unité chrétienne est né avec Vatican II. Ce n'est pas le cas: l'Eglise a toujours ressenti vivement la nostalgie de l'unité; seulement, elle l'a poursuivie d'une façon différente d'aujourd'hui. Au lieu d'avoir des conversations œcuméniques avec d'autres confessions (à l'époque tout simplement impensables), l'Eglise catholique rétablissait la pleine communion avec des groupes de chrétiens appartenant à ces confessions: dans certains cas (en Orient), en conservant les éléments caractéristiques de leur tradition; dans d'autres cas (en Occident), en rétablissant une hiérarchie parallèle de Rite romain (dans les pays protestants); dans certains cas (comme en Angleterre), en faisant attention à ne pas donner aux sièges épiscopaux le même nom qu'à ceux anglicans: L'évêque catholique de Londres, par exemple n'est pas appelée de cette façon, mais « archevêque de Westminster» (qui est le nom d'un quartier de Londres).

Quel jugement formuler aujourd'hui sur le phénomène uniate?
Personnellement, je crois que les Eglises sui juris (c'est leur nom technique, selon le Code du Canon des Églises orientales) jouent un rôle très important: elles montrent que l'unité (une unité - notez le bien - qui n'est pas synonyme d'uniformité et d'applatissement) est possible. Il est possible de conserver ses traditions et en même temps, de vivre en pleine communion avec le Pontife romain. Mais je ne pense pas que ce soit juste mon sentiment personnel. Parce que le Concile lui-même, au-delà de ses interprétations simplistes postérieures, a considérablement valorisé les Eglises orientales. Tant et si bien que pour la première fois dans l'histoire de l'Eglise, il y a seulement quelques années, a été publié un code de droit canonique exclusivement pour elles.

Ces Eglises orientales catholiques sont-elles un obstacle pour le chemin œcuménique? Je ne le crois pas. S'il ya des catholiques qui se sentent profondément solidaires avec leurs frères non-catholiques appartenant au même rite, ce sont bien les catholiques dOrient. Qu'ensuite, il puisse y avoir des querelles au niveau local, peut-être au sujet des propriétés, c'est vrai, mais ces choses existent depuis que le monde est monde, même parmi les catholiques ou parmi les orthodoxes entre eux.

Le vrai problème est de comprendre ce qu'on entend par œcuménisme.
Si l'œcuménisme signifie simplement se rencontrer pour discuter et prier ensemble, et puis tout le monde continue à suivre sa propre voie, je me demande à quoi sert un tel oecuménisme.
Laissez-moi vous donner un exemple tiré justement du cas anglican: les anglicans n'auraient-ils pas dû, avant d'introduire quelques nouveautés, comme le sacerdoce et l'épiscopat aux femmes, s'interroger sur les conséquences «œcuméniques» que de telles décisions auraient? Non, ils ont suivi leur propre voie, sans tenir compte non seulement des réactions au sein de leur Eglise, mais aussi de la tradition suivie par les catholiques et les orthodoxes. Juste pour signaler la différence de style, avez-vous réalisé à quel point l'Église catholique dans cette dernière affaire s'est souciée des motivations œcuméniques? Théoriquement, elle aurait pu permettre que les évêques anglicans mariés, de retour dans l'Église catholique, puissent être ordonnés évêques en restant mariés. Non, pour des raisons de caractère œcuménique et historique, elle ne l'a pas permis. C'est cela qu'on appelle l'œcuménisme; pas l'œcuménisme à la «Tarallucci e vino." (ndt: expression italienne, qui évoque une dispute qui se termine amicalement, et que je traduirais, sans certitude, par "tout est bien qui finit bien"...)

Pour en revenir à l'affirmation de Mazza, je disais qu'elle ne me semblait pas claire du tout.
Que signifie l'affirmation que l'Eglise aurait pu choisir des solutions plus simples, "comme une certaine forme d'uniatisme"?
Il me semble - je peux me tromper - que la décision papale d'établir des "ordinariats personnels" pour les anglicans qui demandent à entrer en pleine communion avec Rome est précisément "une certaine forme d'uniatisme". Et c'est pourquoi elle a été digérée avec difficulté, à ce qu'il semble, tant par les anglicans (en dépit de la déclaration commune à Londres), que par l'épiscopat catholique Britannique, et surtout par le Conseil pontifical pour la Promotion de l'Unité des Chrétiens (absent lors de la conférence de presse l'autre jour au Vatican).

Je lis maintenant avec un immense plaisir, sur le blog de Sandro Magister Settimo cielo que John Henry Newman avait conçu un plan visant à créer une sorte d'église anglicane "uniate", similaire à celles de rite oriental unies à Rome. Le plan avait le soutien du Cardinal Manning, alors archevêque de Westminster.
Pratiquement, il s'agit de la même solution que j'avais souhaitée dans ce blog (ndt: non traduit...): la formation d'une Église catholique sui juris de rite Anglican; une solution qui est probablement prématurée. Prématurée, car il n'y a pas encore d'églises sui juris en Occident, les seules qui existent sont en Orient. Mais je ne vois pas ce qui pourrait empêcher l'établissement de ces églises en Occident. Personnellement, je pense que c'est la seule solution au problème de l'œcuménisme: donner aux communautés la possibilité de rentrer dans la pleine communion avec Rome, tout en préservant leurs traditions. Quoi qu'il en soit, donnons du temps au temps. Pour l'instant, les «ordinariats personnels» conviennent très bien.

Je crois personnellement que la décision du pape est vraiment importante (certains l'ont appelée «historique») parce qu'elle marque un tournant dans l'œcuménisme. C'est comme si Benoît XVI, après avoir reconnu la faiblesse des résultats obtenus ces dernières années par l'œcuménisme officiel, avait déclaré: "OK, il est temps de changer de cap".
Nous ne parviendrons peut-être pas à rétablir la pleine communion avec la Communion anglicane dans son ensemble (mais comment est-ce possible après les choix qu'elle a faits?), mais au moins nous pouvons rétablir la pleine communion avec des groupes anglicans. Cela me semble être une position raisonnable, parce qu'elle marque le retour à l'une des caractéristiques qui a toujours distingué l'Eglise catholique et qui ces dernières années, semblait un peu brouillée: le réalisme. Le mieux a toujours été l'ennemi du bien: durant ces années, nous nous sommes illusionés qu'il était possible de rétablir l'unité avec les Églises et les communautés non-catholiques simplement en s'asseyant autour d'une table.
Quarante ans après, il est temps de faire le point. Ce qui a été fait jusqu'à présent n'a certainement pas été vain, peut-être que le résultat d'aujourd'hui n'aurait pas été possible sans ces pourparlers, qui ont montré que les différences ne sont pas si importantes. Mais nous ne pouvons pas oublier que, au-delà des questions de dogme, il existe de nombreux autres facteurs (historiques, politiques, émotionnels, etc.) qui entravent le chemin vers l'unité.
Il était nécessaire d'arrêter les atermoiements. Benoît XVI l'a fait. C'est comme s'il avait dit: Renonçons à une unité universelle hypothétique, de plus en plus abstraite et lointaine; et contentons-nous d'une unité réelle, possible avec ces groupes qui veulent et qui sont en mesure de vivre en communion avec l'Eglise catholique.
Un résultat partiel, mais sûr, face à des perspectives sans doute fascinante, mais de plus en plus évanescentes.

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