Saint-Jacques de Compostelle: photos (2)
Messe à l'occasion de l'année compostellane. L'homélie a été un plaidoyer dramatique pour une Europe chrétienne (6/11/2010)
Parmi les images, je retiens celles des cadets de la Marine, saluant, la main sur le coeur.
Et aussi, le visage hideux de la haine, qui se discrédite d'elle-même.
Des images laides que je ne mets pas, d'habitude. Mais le contraste est si frappant, entre cette laideur, cette méchanceté, et la beauté de la célébration, la pureté du célébrant, la ferveur de la foule des fidèles, que même des gens hostiles au Saint-Père qui tomberaient par hasard sur mon site pourraient bien ouvrir les yeux.
L'homélie, prononcée de la voie douce et fragile que nous connaissons, a été un plaidoyer passionné et dramatique pour une Europe chrétienne, comme on n'en avait peut-être jamais entendu, même de lui: O croix bénie - a dit le Saint-Père - brille toujours sur les terres d’Europe!
Permettez que je proclame depuis ce lieu la gloire de l’homme, que j’avertisse des menaces envers sa dignité par la privation de ses valeurs et de ses richesse originaires, par la marginalisation ou la mort infligée aux plus faibles et aux plus pauvres !
Extrait de l'homélie
Texte complet en français à lire sur le site du Vatican: http://tinyurl.com/22lmgg6
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De ce lieu, en messager de l’Evangile que Pierre et Jacques signèrent de leur propre sang, je désire porter mon regard vers l’Europe qui vint en pèlerinage à Compostelle. Quelles sont ses grandes nécessités, ses craintes et ses espérances? Quelle est la contribution spécifique et fondamentale de l’Eglise à cette Europe qui, au cours du dernier demi-siècle, a parcouru un chemin vers de nouvelles configurations et vers des projets?
Son apport est centré sur une réalité aussi simple et décisive que celle-ci: Dieu existe et c’est Lui qui nous a donné la vie. Lui seul est l’absolu, l’amour fidèle et immuable, le terme infini qui transparaît derrière tous les biens, derrière la vérité et la beauté merveilleuses de ce monde; merveilleuses mais insuffisantes pour le cœur de l’homme. Sainte Thérèse de Jésus le comprit bien quand elle écrivit: «Dieu seul suffit!»
Il est tragique qu’en Europe, surtout au XIX° siècle, se soit affirmée et ait été défendue la conviction que Dieu est le rival de l’homme et l’ennemi de sa liberté. On voulait ainsi mettre une ombre sur la vraie foi biblique en Dieu qui envoie son Fils Jésus dans le monde pour que personne ne meure mais que tous aient la vie éternelle (cf. Jn 3, 16).
L’auteur sacré affirme de façon péremptoire devant un paganisme pour lequel Dieu est jaloux de l’homme et le méprise: comment Dieu aurait-il créé toutes les choses s’il ne les avait pas aimées, Lui qui, dans son infinie plénitude, n’a besoin de rien? (cf. Sg 11, 24-26). Comment se serait-il révélé aux hommes s’il n’avait pas voulu les protéger? Dieu est à l’origine de notre être et il est le fondement et le sommet de notre liberté, et non son adversaire. Comment l’homme mortel peut-il être son propre fondement et comment l’homme pécheur peut-il se réconcilier avec lui-même? Comment est-il possible que soit devenu public le silence sur la réalité première et essentielle de la vie humaine? Comment se peut-il que ce qui est le plus déterminant en elle soit enfermé dans la sphère privée ou relégué dans la pénombre? Nous les hommes nous ne pouvons vivre dans les ténèbres, sans voir la lumière du soleil. Alors, comment est-il possible que soit nié à Dieu, soleil des intelligences, force des volontés et boussole de notre cœur, le droit de proposer cette lumière qui dissipe toute ténèbre? Pour cela, il est nécessaire que Dieu recommence à résonner joyeusement sous le ciel de l’Europe; que cette parole sainte ne soit jamais prononcée en vain; qu’elle ne soit pas faussée et utilisée à des fins qui ne sont pas les siennes. Il convient qu’elle soit proclamée saintement! Il est nécessaire que nous la percevions aussi dans la vie de chaque jour, dans le silence du travail, dans l’amour fraternel et dans les difficultés que les années apportent avec elles.
L’Europe doit s’ouvrir à Dieu, sortir sans peur à sa rencontre, travailler avec sa grâce pour la dignité de l’homme que les meilleures traditions avaient découverte : la tradition biblique – fondement de cet ordre -, et les traditions classique, médiévale et moderne desquelles naquirent les grandes créations philosophiques et littéraires, culturelles et sociales de l’Europe.
C’est ce Dieu et c’est cet homme qui se sont manifestés concrètement et historiquement dans le Christ. C’est ce Christ, que nous pouvons trouver sur le chemin qui conduit à Compostelle, par le fait que sur ce chemin, il y a une croix qui accueille et oriente aux carrefours. Cette croix, signe suprême de l’amour porté jusqu’à l’extrême, et en cela, don et pardon en même temps, doit être l’étoile qui nous guide dans la nuit du temps. La Croix et l’amour, la Croix et la lumière ont été synonymes dans notre histoire, parce que le Christ s’est laissé clouer sur elle pour nous donner le suprême témoignage de son amour, pour nous inviter au pardon et à la réconciliation, pour nous enseigner à vaincre le mal par le bien. Ne cessez pas d’apprendre les leçons de ce Christ des carrefours des chemins et de la vie, en Lui nous rencontrons Dieu comme ami, père et guide. O croix bénie, brille toujours sur les terres d’Europe!
Permettez que je proclame depuis ce lieu la gloire de l’homme, que j’avertisse des menaces envers sa dignité par la privation de ses valeurs et de ses richesse originaires, par la marginalisation ou la mort infligée aux plus faibles et aux plus pauvres ! On ne peut rendre un culte à Dieu sans protéger l’homme, son fils, et on ne sert pas l’homme sans s’interroger sur qui est son Père et sans répondre à la question sur lui. L’Europe de la science et des technologies, l’Europe de la civilisation et de la culture, doit être en même temps l’Europe ouverte à la transcendance et à la fraternité avec les autres continents, ouverte au Dieu vivant et vrai à partir de l’homme vivant et vrai. Voilà ce que l’Eglise désire apporter à l’Europe: avoir soin de Dieu et avoir soin de l’homme, à partir de la compréhension qui, de l’un et l’autre, nous est offerte en Jésus Christ.
Chers amis, nous élevons un regard d’espérance vers tout ce que Dieu nous a promis et nous offre. Qu’il nous donne sa force, qu’il stimule cet Archidiocèse de Compostelle, qu’il vivifie la foi de ses enfants et les aide à rester fidèles à leur vocation de semer et de donner vigueur à l’Evangile aussi sur d’autres terres.