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Voeux à la Curie: la conscience, selon Newman

L'analyse savante de Massimo Introvigne. (21/12/2010)

-> Voir ici: Voeux à la Curie

La conscience de Newman (La coscienza di Newman )
Massimo Introvigne
20 décembre 2010
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J'aimerais faire un commentaire sur la troisième partie [du discours à la Curie Romaine] où le Pape, rappelant le voyage en Grande-Bretagne en Septembre dernier, renvoie à la notion de conscience dans la pensée du bienheureux Newman. La question est clairement liée à la dénonciation de ce relativisme moral que le Pape considère comme l'une des racines du drame de la pédophilie.

On peut facilement, a affirmé Benoît XVI , confondre la notion de conscience du Bienheureux Newman avec le relativisme moderne.
"Pour pouvoir affirmer l’identité entre le concept que Newman avait de la conscience, et la compréhension moderne subjective de la conscience, on aime faire référence à la parole selon laquelle lui-même – dans le cas où il aurait à porter un toast –, l’aurait d’abord porté à la conscience, puis au Pape. Mais dans cette affirmation, « conscience » ne signifie pas le caractère obligatoire ultime de l’intuition subjective. C’est l’expression de l’accessibilité et de la force contraignante de la vérité : c'est en cela que se fonde son primat. Le second toast peut être dédié au Pape, parce que c’est le devoir de celui-ci d’exiger l’obéissance à l’égard de la vérité".

Le Pape se réfère à un passage de la "Lettre au duc de Norfolk" où le Bienheureux Newman écrit que "si j'étais forcé d'introduire la religion dans un toast après le dîner (ce qui, en vérité, ne me semble pas la chose la meilleure), je porterais un toast, si vous voulez, au Pape; en fait, à la conscience d'abord, puis au Pape" .

Dans un discours prononcé 1991, le cardinal Ratzinger faisait observer que la phrase devait être considérée dans la globalité de la pensée de Newman et dans sa fidélité à la "tradition médiévale [qui] identifiait à juste titre deux niveaux du concept de conscience, qui doivent être distingués avec soin, mais toujours être mis en rapport l'un avec l'autre. Beaucoup de thèses inacceptables sur le problème de la conscience me semblent dûs au fait qu'on a négligé soit la distinction soit la corrélation entre les deux éléments".

Le Moyen-Age parle de syndérèse (ndt: Syndérèse - Terme technique utilisé par les théologiens pour désigner la connaissance innée des principes moraux essentiels. La syndérèse ou conscience habituelle, nous éclaire et nous pousse à faire le bien. Source: site de la CEF) et de conscience; le cardinal Ratzinger précise ces deux termes parlant "d'anamnèse de la création" et "d'anamnèse de la foi" (ndt: L'anamnèse - en grec « souvenir »- est le récit des antécédents. Wikipedia).
La première, l'anamnèse de la création, dérive du fait qu'avec la création "a été instillé en nous quelque chose comme une mémoire d'origine du bien et du vrai". La seconde, l'anamnèse de la foi, naît de la rédemption, œuvre de Jésus-Christ, "dont les rayons, à partir du Logos rédempteur, s'étendent au-delà du don de la corrélation dont la mémoire est gardée par l'Eglise et, dans l'Église, par le Pape."
Chronologiquement, l'anamnèse de la création vient en premier: "elle s'identifie avec le fondement même de notre existence", et elle fonde la possibilité de l'anamnèse de la foi. Puique, historiquement, la Création précède la Rédemption, ainsi, pour qu'il y ait une conscience formée et éclairée par l'Eglise et par le Pape, il faut qu'il y ait d'abord une conscience. En ce sens, "nous sommes maintenant en mesure de comprendre correctement les toast de Newman, d'abord pour la conscience et seulement après pour le pape". Les deux toasts ne succèdent, ils ne s'opposent pas.

Si au contraire on considère que l'appel à la conscience n'est qu'une justification pour suivre sa propre volonté -"Fais ce que tu veux sera toute la loi", selon la formule célèbre de l'ésotériste anglais Aleister Crowley, lequel non seulement donnait à cette proposition une base spécifiquement magique, mais capturait en elle l'essence même de la magie comme primauté de pouvoir - l'étape suivante ne peut être que l'abolition de la conscience. Pour faire ce qu'on veut, point n'est besoin de la loi, ni de la conscience. Le relativisme libéral évolue ainsi naturellement vers le relativisme agressif des idéologies du XXe siècle, jusqu'à aboutir à l'affirmation du dirigeant du parti national-socialiste Hermann Goering, cité par le cardinal Ratzinger: «Je n'ai pas conscience! Ma conscience est Adolf Hitler. "

La notion relativiste de la conscience conduit finalement à l'élimination de la conscience.
Le catholique, soulignait le cardinal Ratzinger, ne veut certes pas adopter la formule de Göring, mettant le pape à la place de Hitler. Ce serait une version caricaturale du catholicisme. Le catholique, au contraire, dira qu'il a une conscience, et qu'il y trouvera une mémoire du bien originel, et l'ouverture à la «possibilité» d'une révélation de Dieu, qui est le fondement de ce bien.
Dès lors qu'il accepte pour foi que Dieu s'est révélé en Jésus-Christ, il est prêt à accepter l'argument selon lequel le Pape est «le garant de la mémoire» de la révélation chrétienne. Le Magistère du Pape entre ainsi dans sa conscience intérieure.

Pour le Bienheureux Newman, le chemin de la conscience est tout sauf un chemin de subjectivité qui s'auto-affirme: c'est au contraire le chemin de l'obéissance à la vérité objective. Porter d'abord un toast à la conscience et ensuite au Pape, ne constitue pas une opposition, mais une chronologie. Foi et raison se rencontrent dans le primat de la vérité.


Une mise au point de la CDF Dans la nuit du monde...