Message aux "opérateurs sanitaires"
" L'amour de la justice, la protection de la vie depuis la conception jusqu'à la mort naturelle, le respect de la dignité de chaque être humain doivent être soutenus et témoignés, même à contre-courant: les valeurs éthiques fondamentales sont le patrimoine commun de la morale universelle et la base de la convivialité démocratique". Texte complet. (19/11/2010)
Ma traduction:
Message du Pape à Mgr Zygmunt Zimowski, président du Conseil pontifical pour la pastorale de la santé, à l'occasion de la 25e Conférence internationale organisée par le dicastère, ces 18 et 19 novembre, sur le thème «Caritas in Veritate - Pour des soins de santé équitables et humains ».
Le Conseil pontifical fête cette année le 25e anniversaire de sa création.
Le message a été lu par le cardinal Bertone.
A mon vénéré Frère
Zygmunt Zimowski
Président du Conseil Pontifical pour la Pastorale de la Santé
Avec joie, je tiens à adresser mes cordiales salutations aux participants à la XXVe Conférence Internationale, qui s'insère bien dans l'année qui célébre les 25 ans de la création du dicastère, et offre une autre raison de remercier Dieu pour ce précieux outil pour l'apostolat de la miséricorde . Une pensée reconnaissante à tous ceux qui travaillent dans les divers domaines de la pastorale de la santé, pour vivre ce service de la charité, qui est au cœur de la mission de l'Eglise. En ce sens, je suis heureux de rappeler les cardinaux Fiorenzo Angelini, et Javier Lozano Barragan, qui ont dirigé au cours des 25 dernières années, le Conseil Pontifical pour la Pastorale de la Santé, et j'adresse un salut particulier à l'actuel président du Dicastère, Mgr Zygmunt Zimowski, et aussi au Secrétaire, au Sous-Secrétaire, aux fonctionnaires, collaborateurs, intervenants de la conférence et à toutes les personnes présentes.
Le thème que vous avez choisi cette année, "Caritas in veritate. Pour des soins de santé équitables et humains" est d'un intérêt particulier pour la communauté chrétienne, où le soin pour l'être humain, sa dignité transcendante et ses droits inaliénables sont des thèmes centraux.
La santé est un bien précieux pour la personne et la communauté, à promouvoir, préserver et protéger, en consacrant les moyens, les ressources et les énergies nécessaires, afin que plus de personnes puissent en profiter. Malheureusement, aujourd'hui encore, persiste le problème de beaucoup de gens à travers le monde qui n'ont pas accès aux ressources nécessaires pour répondre aux besoins de base, notamment en ce qui concerne la santé. Il est nécessaire de travailler avec un plus grand engagement à tous les niveaux afin que le droit à la santé soit rendu effectif, en favorisant l'accès aux soins de santé de base.
A notre époque, on assiste d'une part à une attention à la santé qui risque de se transformer en consumérisme pharmacologique, médical et chirurgicaal, devenant presque un culte pour le corps, et d'autre part, à la difficulté de millions de personnes à accéder à des conditions minimale de subsistance et aux médicaments indispensables pour se soigner.
Dans le domaine de la santé aussi, partie intégrante de l'existence de chacun et du bien commun, il est important d'établir une vraie justice distributive, qui assure à tous, sur la base des besoins objectifs, des soins appropriés. En conséquence, le monde de la santé ne peut se soustraire aux règles morales qui doivent le gouverner, afin qu'il ne devienne pas inhumain. Comme je l'ai souligné dans Caritas in Veritate, la doctrine sociale de l'Eglise a toujours insisté sur l'importance de la justice distributive et de la justice sociale dans les différents domaines des relations humaines (35). On promeut la justice quand on accueille la vie de l'autre, et qu'on assume une responsabilité envers lui, répondant à ses attentes, parce qu'en lui, on cueille le visage même du Fils de Dieu qui s'est fait homme pour nous. L'image divine imprimée en notre frère fonde la très haute dignité de chaque personne et sucite en chacun la nécessité du respect, des soins et du service. Le lien entre la justice et la charité, dans la perspective chrétienne, est très étroit: "La charité va au-delà de la justice, car aimer, c'est donner, offrir du "mien" à l'autre; mais ce n'est jamais sans la justice, qui nous conduit à donner à tous ce qui est "sien", c'est-à-dire ce qui lui revient en raison de son être et de son agir [...] Celui qui aime les autres avec charité est avant tout juste envers eux. Non seulement la justice n'est pas étrangère à la charité, non seulement elle n'est pas une alternative ou une voie parallèle à la charité: la justice est "inséparable de la charité", qui lui est intrinsèque. La justice est la première voie de la charité »(ibid., 6). En ce sens, avec une expression concise et incisive, Saint Augustin a enseigné que "la justice consiste à aider les pauvres» (De Trinitate, XIV, 9: PL 42, 1045).
Se pencher comme le Bon Samaritain sur l'homme blessé abandonné au bord de la route, c'est remplir cette "justice plus grande" que Jésus a demandé à ses disciples, et témoigné dans sa vie, car l'accomplissement de la loi est l'amour. La communauté chrétienne, en suivant les traces de son Seigneur, a rempli le mandat d'aller dans le monde pour "enseigner et soigner les malades" et au cours des siècles, a toujours fortement ressenti le service aux malades et aux souffrants comme partie intégrante de sa mission" (Jean-Paul II, Motu Proprio Dolentium hominum, 1), pour témoigner de la plénitude du salut, qui est la santé du corps et de l'âme.
Le peuple de Dieu en pèlerinage sur les chemins tortueux de l'histoire joint ses efforts à ceux de nombreux autres hommes et femmes de bonne volonté pour donner un visage véritablement humain aux systèmes sanitaires. La justice sanitaire doit être parmi les priorités des gouvernements et des institutions internationales.
Malheureusement, à côté de résultats positifs et encourageants, il y a des opinions et des modes de pensée qui la blessent: je pense à des questions telles que celles liées à ce qu'on nomme "santé reproductive", avec l'utilisation de techniques artificielles de procréation impliquant la destruction d'embryons, ou l'euthanasie légalisée. L'amour de la justice, la protection de la vie depuis la conception jusqu'à la mort naturelle, le respect de la dignité de chaque être humain doivent être soutenus et témoignés, même à contre-courant: les valeurs éthiques fondamentales sont le patrimoine commun de la morale universelle et la base de la convivialité démocratique.
Il faut l'effort conjugué de tous, mais il faut aussi et surtout une profonde conversion du regard intérieur. Ce n'est que si on regarde le monde à travers les yeux du Créateur, qui est un regard d'amour, que l'humanité apprendra à vivre sur la terre dans la paix et la justice, destinant avec équité la terre et ses ressources pour le bien de chaque homme et chaque femme. Ainsi, "je souhaite [...] l'adoption d'un modèle de développement basé sur la centralité des ressources humaines, sur la promotion et le partage du bien commun, sur la responsabilité, sur la prise de conscience de la nécessité de changer les modes de vie et sur la prudence, la vertu qui indique les actes à accomplir aujourd'hui, en prévision de ce qui peut arriver demain. " (Benoît XVI, Message pour la Journée mondiale de la Paix 2010, 9)
Aux frères et sœurs souffrants, j'exprime ma proximité et l'appel à vivre aussi la maladie comme une occasion de grâce pour grandir spirituellement et participer aux souffrances du Christ pour le bien du monde, et à vous tous qui êtes engagés dans le vaste domaine de la santé, mes encouragements pour votre service inestimable. En demandant la protection maternelle de la Vierge Marie, Salus infirmorum, je vous donne cordialement ma Bénédiction apostolique que j'étends également à vos familles.
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