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Le cardinal Kurt Koch vient d'écrire un ouvrage sur la théologie de Joseph Ratzinger. Sa préface a été publiée dans l'OR, parmi les souhaits d'anniversaire au Pape. (18/4/2012)

Le cardinal Koch vient tout juste de publier un ouvrage intitulé Il mistero del granello di senape - Fondamenti del pensiero teologico in Benedetto XVI (http://www.libreriadelsanto.it..).
Dans la présentation de l'éditeur, on lit:

Avec ce livre, les éditions Lindau, en accord avec l'Institut Pape Benoît XVI de Ratisbonne, a inauguré une série de livres consacrés à la théologie Joseph Ratzinger, qui, idéalement, accompagnera la publication de ses Œuvres complètes à la Libreria Editrice Vaticana.
Kurt Koch, ancien évêque de Bâle de 1995 à 2010, est cardinal depuis le 20 Novembre 2010. De 1989 à 1996 il fut professeur de théologie dogmatique et de liturgie à la Faculté des sciences de théologie de Lucerne. Depuis 2010, il préside le Conseil pontifical pour la Promotion de l'Unité chrétienne.

C'est la préface de cet ouvrage que l'OR a publiée, en guise de voeux d'anniversaire du cardinal. Et c'est sa réflexion qui a servi de point de départ à l'article de Joé-Luis Restàn, traduit hier par Carlota (Les 85 ans et la patience de Benoît )

Texte en italien: http://paparatzinger5blograffaella.blogspot.it/...
Ma traduction.

Le mystère de la graine de sénevé
Kurt Koch
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«Les grandes choses commencent toujours par une graine de sénevé, et les mouvements de masse ont toujours une courte durée».
Cette phrase écrite pour décrire les exigences d'une nouvelle évangélisation par le Pape Benoît XVI, quand il était préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, met bien l'accent sur ce qui tient à coeur à Joseph Ratzinger comme théologien, évêque et Pape. Il n'est donc pas étonnant qu'il cite et médite continuellement la parabole de la graine de sénevé (Marc 4, 30-32): la graine de sénevé est la plus petite de toutes les graines, mais devient la plus grande de toutes les plantes afin que les oiseaux du ciel puissent faire leurs nids sous son ombre. Le comparaison avec le grain de sénevé ne montre pas seulement que les grandes réalités commencent dans le petit, selon ce principe élémentaire que Pierre Teilhard de Chardin dans sa réflexion sur l'évolution a appelé la loi des origines invisibles; cette comparaison met aussi en évidence le principe de base en oeuvre dans toute l'histoire de Dieu avec l'humanité qui lui appartient et que le pape Benoît XVI a appelé «prédilection pour ce qui est petit».
Dans l'immensité incommensurable de l'univers et parmi le nombre infini de planètes et de galaxies, Dieu a choisi la terre, cette petite tache de poussière, pour son action salvifique. Sur cette petite terre, parmi tous les peuples puissants, Dieu a choisi Israël, un peuple pratiquement impuissant politiquement, comme épine dorsale de son histoire avec nous les hommes.
En Israël, Dieu a choisi le modeste lieu de Bethléem pour s'approcher comme homme de nous les hommes. A Bethléem, Dieu a choisi une femme inconnue et sans importance, Marie, pour pouvoir entrer dans notre monde. Tout au long de l'histoire de l'Église, Dieu a toujours appelé des hommes simples, qui en s'immergeant personnellement dans l'Evangile pourraient renouveler l'Eglise de l'intérieur. La graine de sénevé n'est pas seulement une comparaison de l'espérance chrétienne, mais elle met également en évidence que le grand naît du petit, pas à travers des bouleversements révolutionnaires et même pas parce que nous autres hommes en assumons la direction, mais parce qu'il survient de façon lente et graduelle, suivant sa propre dynamique.

Face à cela, l'attitude chrétienne ne peut-être que l'amour, et la patience, qui est le souffle long de l'amour. La comparaison avec le grain de sénevé nous conduit aussi au cœur de la pensée théologique du Pape Benoît XVI, qui est l'amour: l'amour de Dieu pour les hommes, inimaginable et pourtant correspondant au logos, et la réponse humaine à cet amour divin qui ne peut se réaliser que dans l'amour envers Dieu et envers les hommes.
A la lumière de l'amour, dans la comparaison de Jésus de la graine de sénevé, l'accent n'est pas mis uniquement sur la plante qui devient grande, mais sur la graine, et donc sur l'espérance dans la croissance sereine dans la patience, justement parce que Dieu lui-même juge et apprécie la patience comme une sœur particulièrement sensible de l'amour, et pour ce motif, fait constamment découler le grand du découlant du petit. La comparaison est donc destinée à éveiller en nous, hommes, la joie pour la beauté qui est intimement liée à l'espoir et nous entraîne dans le mystère de Dieu et de son histoire salvifique, comme Benoît XVI l'a déclaré lors de sa rencontre avec les artistes: «Le chemin de la beauté nous conduit donc, à saisir l'ensemble dans le fragment, l'infini dans le fini, Dieu dans l'histoire humaine».

Au contraire, nous autres hommes sommes toujours tentés de prendre le particulier pour le tout, d'échanger le fini pour l'infini et, par conséquent, de mettre l'accent, dans la comparaison de Jésus, sur la croissance; nous aimerions, avec une impatience nerveuse, avoir très vite un grand arbre robuste et, si nécessaire, y contribuer de nos mains, dans notre effort pour voir un résultat respectable, et dans la pastorale, nous risquons de confondre le soin des âmes avec le souci pour le nombre.
Cette tentation pourrait dériver principalement du fait que la pensée théologique et la pastorale du Pape Benoît XVI sont constamment exposées à de graves malentendus, dont nous pouvons rappeler brièvement ceux qui sont exprimés le plus fréquemment.

Une critique très répandue considère que le pape ne se soucie pas de la grande église des peuples - les «masses» - mais qu'il pointerait plutôt sur le petit troupeau, et s'en contenterait. Dans cette critique, ce qu'il y a de vrai, c'est que le Pape est effectivement convaincu que le véritable renouveau de l'Eglise ne peut partir des masses, mais seulement de petits mouvements, comme c'est diversement témoigné dans l'histoire de l'Eglise et comme c'est aujourd'hui visible dans les nouveaux mouvements ecclésiaux qui n'ont pas été conçus par les instances officielles de l'Église et, qui pour cela peuvent être considérés comme un don de l'Esprit Saint dans la situation de l'Église post-conciliaire. Aux yeux du pape, cependant, ils ne remplissent leur mission ecclésiale que s'ils agissent comme un ferment dans l'Eglise, rendant visible qu '«il n'y a qu'une seule Eglise pour tous, qu'il n'y a pas d'églises d'élite ou d'églises d'élection»: «L'Eglise n'est pas un marché dans lequel chacun se cherche son groupuscule, mais une famille dans laquelle je ne suis pas à la recherche de mes frères, mais je les reçois comme des dons de Dieu».
Avec la comparaison de la graine de sénevé, le pape souligne que l'action dans l'Eglise doit avoir comme point de référence son mystère, et ne pas exiger d'en tirer tout de suite un grand arbre. L'Église est à la fois la graine de sénevé et l'arbre, et le Pape le souligne en déclarant que: «Peut-être que nous devrions, que l'Eglise devrait, se trouver face à une grande épreuve (1 Thessaloniciens, 1, 6) pour ré-apprendre de quoi elle vit encore aujourd'hui, elle vit pour l'espérance de la graine de sénevé, et non pas par la force de ses projets et de ses structures ».

Une autre critique plus profonde et maintes fois répétées soutient que le pape Benoît XVI a engagé une marche arrière, et veut revenir à avant le Concile Vatican II.
Ceux qui ne font pas confiance aveuglément à quelques medias qui n'offrent pas d'information sérieuse, mais seulement du divertissement, et accordent par eux-mêmes leur attention à ce que fait et dit le pape, peuvent très vite déterminer que le pape ne veut absolument pas revenir «en arrière», comme cela lui est aujourd'hui publiquement reproché de plusieurs côtés, soit en raison de l'ignorance, soit par appartenance au cercle de ces théologiens (ndt: Hans Kung!!), qui, bien qu'ils aient les connaissances nécessaires, tiennent souvent des discours populistes et soutiennent volontairement le contraire en public, confondant l'honnêteté scientifique avec l'agitation dans la politiques ecclésiale. Le pape Benoît ne veut absolument pas revenir en arrière, mais aller en profondeur, comme la graine de sénevé qui ne pousse que dans la profondeur de la terre. Au Pape, donc, ce qui importe, ce ne sont pas des réformes isolées, ce qui lui importe, c'est que le fondement et le cœur de la foi chrétienne recommencent à briller. Il aspire à une simplification de la foi chrétienne, comme il l'a annoncé précédemment de façon exemplaire dans ses trois encycliques.

C'est une tâche urgente aujourd'hui de développer ces critiques et d'autres, et les préjugés, présentant la physionomie réelle de la pensée théologique et de l'enseignement du Pape Benoît XVI. Au cours des cinq dernières années, j'ai essayé d'y remédier du mieux que je pouvais et autant que mon travail quotidien et minutieux d'évêque m'en laissait le temps, convaincu que cela fait aussi partie de la responsabilité d'un évêque local, d'aider les fidèles à naviguer dans la confusion des points de vue actuels et dans le vacarme de l'information médiatique, dans la désinformation ciblée et les distorsions manipulés.

Avec la publication de ce volume (Il mistero del granello di senape - Fondamenti del pensiero teologico in Benedetto XVI) , j'espère offrir à un cercle plus large une aide à l'orientation et au discernement des esprits. J'ai entrepris cette tâche, dans la croyance qu'il existe des situations dans la vie de l'Eglise où la tâche que Jésus a confiée à Pierre durant la dernière Cène et qui vaut aussi pour son successeur: «Confirme tes frères» (Luc , 22.32), doit également être appliquée dans le sens inverse, à savoir qu'un évêque local ressent comme son devoir de soutenir le successeur de Pierre dans son important ministère.

A lui me lie à lui avant tout l'espoir irréductible qu'il n'y a pas de Pâques sans Vendredi Saint, mais qu'à chaque Vendredi Saint succède Pâques, et que c'est le fondement le plus profond de la joie chrétienne. Dans cette joyeuse espérance, nous sommes bien conseillés si, dans l'actuel Vendredi Saint de l'Eglise, nous tournons notre attention non seulement vers les coups sonores de la destruction, mais surtout vers la venue silencieuse d'une vie nouvelle dans la nuit de la Pâque, qui porte en elle le développement organique caché dans le secret de la graine de sénevé.

(©L'Osservatore Romano 15 aprile 2012)