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Un vent frais et pur

Le dernier Restàn, à propos de "Lumière du Monde" (25/11/2010)

Texte original en espagnol sur le site www.paginasdigital.es.
Traduction de Carlota.
A savourer.

 



Oui, nous parlerons du préservatif mais pas que de cela, ni principalement, car Benoît XVI nous a offert beaucoup plus que cette nécessaire clarification. Il nous a montré en acte la foi qui dilate la raison et la raison qui se penche sur la profondeur du Mystère. Il l’a fait sans arme, en toute sincérité (en espagnol, à poitrine découverte) avec le journaliste allemand Peter Seewald, dans un livre qui ne pouvait pas avoir un titre plus exact : La lumière du monde.

Il est évident que des formes analogues de livre-entretien ont déjà existé avec des souverains pontifes antérieurs. L’intellectuel français André Frossard nous a offert des conversations avec Paul VI et Jean-Paul II. Mais c’étaient des livres beaucoup plus rigides, planifiés, rien de comparable au vent frais, à cette fenêtre ouverte que suppose l’échange Seewald-Ratzinger. Ici il n’y a rien de précuit, au désespoir de plus d’un ecclésiastique. Ici on trouve les questions d’un converti en provenance de la gauche radicale européenne, et les réponses d'un chrétien appelé à chausser les sandales du pêcheur de Galilée.

À chaque ligne, l’homme Joseph Ratzinger vibre, mais l’esprit et le cœur du Pape Benoît se révèlent indissociables. Surprise totale, stupeur croissante : l’homme et le Pape, un tout. Parce qu’il n’y a pas de fissure entre le pauvre homme qui a besoin de miséricorde comme tout un chacun, et le Pasteur universel qui doit guider l’Église en ce moment de tourmente. Ses questions, ses faiblesses, ses inquiétudes humaines résonnent si limpides qu’elles provoquent de la tendresse ; son analyse pointue, sa précision de théologien, son intelligence vaste comme la mer nous laissent stupéfaits.

Un Pape Benoît qui n’élude aucune des questions qui lui arrivent comme un marteau pilon depuis l'autre côté de la table: les femmes dans l’Église, la crise économique planétaire, le serpent de la drogue, la difficile relation avec les Juifs, les silences de Pie XII, la douleur brutale des abus sexuels, la sensation de défaite dans l’Église, la construction de mosquées en Occident, son intention de démissionner…Quest-ce qui lui importe le plus? A coup sûr, il court des risques. Mais Paul n’en courait-il pas quand il s’adressait aux Athéniens sur l’Agora ?
J’ai lu des commentaires de tous les genres: des gens fascinés et perplexes, des commentateurs qui reconnaissent la modernité du Pape, d’autres qui tremblent de l’intérieur, d’autres encore sourient avec cynisme et disent qu’il était bien temps. Je l’entends déjà. Qui suis-je? disent les gens. Ou s’il l’on préfère, qu’est ce que l’Église, cette barque qui paraît à tant de monde oxydée mais qui toujours remonte sur la crête des vagues?

Grande tempête, parce que en abordant la question de la lutte contre le Sida, le père de la compagnie chrétienne qui se bat tous les jours dans la tranchée de la pandémie a expliqué qu’il y a des cas où l’usage du préservatif se justifie, que l’utiliser peut même être le premier pas vers une moralisation, parce qu’il indique que tout n’est pas permis. Il a cité le cas de la prostitution comme contexte dans lequel cela peut se comprendre très bien. Il n’y a pas de changement ni grand ni petit dans la doctrine, il y a une transparence très opportune pour fixer une pratique que l’Église a déjà reconnue et expliquée, peut-être moins souvent que nécessaire. Quand quelqu’un se place délibérément hors du sens humain de la sexualité, hors de son contexte d’amour, de don et de fidélité, et quand il met en danger la vie des autres, utiliser le préservatif est un acte responsable et qui convient. Ceci étant dit, concentrer le problème du Sida dans la distribution des préservatifs (depuis un avion, comme le voulaient nos éminents élus – ndt allusion à l’envoi par le gouvernement espagnol de milliers de préservatifs en Afrique, en réaction immédiate à la déclaration du Pape lors de son dernier voyage africain) est suicidaire, ne fait qu’augmenter la banalisation de la sexualité et est voué à l’échec le plus retentissant dans la lutte contre la pandémie. De nouveau le Pape parle « d’humaniser la sexualité » comme unique réponse intégrale, non seulement contre le Sida, mais pour libérer tant d’hommes et de femmes d’une dictature qui rend esclave de la sexualité comprise comme une drogue qui isole et nous rend violents.

Est impressionnante, elle auusi, la réponse à la qustion sur l’encyclique Humanae Vitae (ndt encyclique de Paul VI – 1968 - à relire ici) « dont les perspectives continuent à être toujours valables, mais une autre chose est de trouver des chemins humaines praticables. Je crois qu’il faudra toujours des minorités intimement convaincues de l’exactitude de ces perspectives et que en les vivant, elles resteront pleinement satisfaites de sorte qu’elles pourront être un fascinant modèle à suivre. Nous sommes des pécheurs. Mais nous ne devrions pas assumer ce fait comme une instance contre la vérité, quand cette prescription morale n’est pas vécue. Nous devrions chercher à faire tout le bien possible, et nous appuyer et nous supporter mutuellement… ».

Je veux terminer ce bref coup d’oeil ému et reconnaissant avec l’espérance du Pape sur le futur de l’Église. Malgré les apparences, il soutient que « en ce moment une créativité tout à fait nouvelle est en train de se développer ». Il reconnaît que « La bureaucratie est usée, fatiguée » mais que jaillissent des « initiatives qui naissent de l’intérieur, de la joie des jeunes ». Dans le futur, le christianisme assumera peut-être un autre visage, un aspect culturel différent… sans doute ne déterminera-t-il pas l’opinion publique mondiale, mais il continue à être « la force vitale sans laquelle les autres choses ne pourraient pas continuer à exister ». Pour cela, dit le Pape, « en vertu de ce que je vois et de ce que j’arrive à expérimenter personnellement, je suis très optimiste par rapport au fait que le christianisme se trouve face à une dynamique nouvelle ».

8 décembre, fête de l'Immaculée L'Eglise de Rome en Estonie