Articles Images La voix du Pape Lectures, DVD Visiteurs Index Sites reliés Recherche
Page d'accueil Articles

Articles


Voyages 2011, en deux collages Liens Le Pape en Espagne Nicolas Sarkozy chez le Pape Synode pour le Moyen-Orient La luce del Mondo

Deux cadeaux en un

A la veille de l'arrivée de Benoît XVI en Espagne, le très beau commentaire de José-Luis Restàn, traduit par Carlota (5/11/2010)

Saluant les pélerins espagnols, à l'issue de sa catéchèse sur Marguerite d'Oingt ("Il m'épate"... ), le Saint-Père s'est adressé à eux en ces termes:
--------------
« Je vous invite à m'accompagner par votre prière fervente, à la fin de cette semaine, où je réaliserai une visite pastorale à Saint Jacques de Compostelle, me joignant aux pèlerins qui viennent aux pieds de l'Apôtre, en cette Année Sainte. J'irai aussi à Barcelone où j'aurai la joie de consacrer le merveilleux temple de la Sagrada Familia, œuvre de l'architecte génial Antoni Gaudí. J'y vais comme témoin du Christ ressuscité, avec le désir d'apporter à tous sa Parole, où ils pourront trouver la lumière pour vivre avec dignité et espérance pour construire un monde meilleur ».

cf Zenit et Vatican.

* * *
Voici le commentaire de José-Luis Restàn.
Texte en espagnol ici: http://www.paginasdigital.es/...
Traduction de Carlota.


Deux cadeaux en un

José Luis Restán
04/11/2010

Que le Pape vienne sur notre terre, ce n’est pas une chose anodine. La saine impatience, l’affection sincère ou la réplique incendiaire aux saletés que lâchent quelques politiques ou médias ne suffisent pas. Benoît XVI arrive à un carrefour de notre histoire comme pays, à un moment de fracture sociale et culturelle, de désenchantement et de nihilisme croissants. Il arrive pour confirmer dans la foi une Église qui comme il l’a dit lui-même récemment au Portugal, doit apprendre de nouveau la façon d’être présente dans une société qui a souffert d’une profonde mutation anthropologique et culturelle.

Comme successeur de Pierre, il arrivera à la Compostelle éternelle, pour entrer comme un pèlerin de plus par la porte sainte et se prosterner aux pieds de l’apôtre Saint-Jacques. Le geste lui-même condense une signification immense et centrale : nous n’inventons pas le christianisme, nous le recevons. Il y a une chaîne ininterrompue de témoins qui fait qu’est présent aujourd’hui, à l’aube du XXIème siècle, cette première rencontre des disciples avec Jésus. Le pêcheur de Galilée qui arrive aux confins de la terre, Finisterrae, mu par le désir d’annoncer l’Évangile donne la main au Pape théologien arrivé de Bavière. Qui pourrait avoir inventé une telle histoire ?

Donc le Pape entrera en Espagne par la porte de Saint-Jacques, montrant avec des gestes et des paroles le roc de la foi apostolique, la cohérence qui ne s’enracine pas dans le pouvoir, dans l’influence ou le prestige institutionnel qui à chaque époque ont sollicité l’Église, mais dans la fidélité au Christ qui a marqué la vie de tant de générations de chrétiens. Le Chemin même que Benoît XVI parcourra symboliquement, accomplissant ainsi une vieille aspiration personnelle, est une image de cette histoire très belle mais aussi dramatique : la foi qui donne forme à la vie, qui engendre des communautés, des œuvres, de l’art et de la culture, qui se réalise dans la charité. La foi qu’ont également marquée de leur sang des milliers de martyrs, comme cela continue à se passer aujourd’hui dans diverses parties du monde.

Un Pape qui a tant pensé sur l’Europe et qui a tant parlé d’elle ne pourra manquer de contempler l’étendue du vieux continent depuis ce point qu’est Compostelle. Le rideau de fer qui déchirait sa peau en 1982, ne se dresse plus, comme lorsque Jean-Paul II a lancé une grande clameur en faveur d’une Europe Unie de l’Atlantique à l’Oural, une Europe que le Pape slave rêvait de voir de nouveau irriguée par la sève de la foi chrétienne. Le rideau est tombé mais la marginalisation de Dieu ressemble à un vent glacé qui souffle d’Est en Ouest et vice versa. L’Église, pour sa part, va jusqu’au bout de sa propre purification comme aime à le souligner Benoît XVI. Elle a souffert d’une dure épuration mais elle a aussi approfondi la conscience de sa mission dans ce contexte nouveau, et elle montre déjà les bourgeons d’un printemps qui pointe à peine.

Et Benoît XVI, le Pape théologien qui vient de rappeler Peterson et Guardini, est l’homme dont la Providence a disposé pour conduire la barque dans cette traversée. Ancré dans la meilleure Tradition catholique il assume le défi d’une nouvelle mission, d’un nouveau dialogue non moins provocateur que celui que les Pères des premiers siècles de l’ère chrétienne eurent à dérouler. Il faut « montrer au monde de nouveaux mondes », c’est un moment qui exige des chrétiens audace, courage et créativité, intelligence et passion. Pour cela je ne crois pas que la leçon du Pape ne restera qu’une simple évocation nostalgique des racines chrétiennes de l’Europe, mais que ce sera une contrainte à faire rentrer dans le moule de l’histoire de ce siècle, l’originalité irréductible de la foi. Une invitation au risque du témoignage personnel et communautaire.

C’est pourquoi l’étape de Barcelone a une singulière saveur de défi (et quelques uns, bien que maladroits et fous de rages, l’ont bien senti). Au milieu de la ville sécularisée, se dressent les très belles flèches de la Sainte Famille, abritant un espace pour la vie, l’espace de la liturgie chrétienne dans laquelle se réalise le miracle de l’éruption du Mystère dans la trame quotidienne de l’homme sur terre. Consacrer cet édifice c’est aussi affirmer au grand air que la foi vit et palpite dans le tissu même de la ville, comme un foyer éclairé dont la porte toujours peut être franchie. C’est montrer que cette foi incarnée dans la vie quotidienne de millions d’hommes et de femmes ne reste pas prisonnière des formes culturelles d’une époque et n’est pas freinée par les erreurs de l’histoire. C’est un courant impétueux qui parfois semble circuler sous terre mais cherche toujours à apparaître à la lumière du jour, comme ce torrent de pierre qui s’élève vers le ciel de Barcelone, sculpté par la maîtrise fantastique d’un homme, un chrétien, Antonio Gaudí

Peut-être que cette Basilique assise au milieu du réticule urbain, témoin de la solitude et de l’abandon mais aussi de la recherche infatigable de l’homme de la cité sécularisée, sera un miroir de cette cour des gentils dont a rêvé Benoît XVI lors de son voyage à Prague. Peut-être que la parole belle et précise de cet homme, père et frère, soulagera beaucoup de douleurs, éclairera des cieux obscurs, nous lancera dans l’aventure de la mission. Et peut-être que, non pas quelques uns,mais beaucoup, éloignés du cœur de l’Église mais inquiets dans leur quête humaine, se reconnaîtront comme nos amis, nous qui par la grâce avons trouvé le don de la foi et voulons partager à cœur ouvert notre espérance.
Ce seraient deux cadeaux en un : une Église plus libre et plus audacieuse pour arriver au nouveau Finisterrae, et une société plus réconciliée entre ses divers courants, plus unie dans la recherche de la justice et de la paix.

Désinformation Discours d'ouverture du Synode: l'indomptable