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L'Encyclique en or et rouge

L'article de George Weigel traduit en français (16/7/2009)

L’article de George Weigel (un intellectuel américain que je qualifierais de libéral catholique *) est une attaque en règle contre l’encyclique, mais sans s’en prendre directement au Pape, et il a déjà fait couler beaucoup d’encre, surtout outre-Atlantique.
En gros, selon lui cette encyclique comporterait deux parties totalement disjointes et non miscibles entre elles, la partie « bénédictine » de la main du Pape (à surligner en or) et la partie issue d’un office de la Curie, le « gauchisant » Conseil Pontifical Justice et Paix, à marquer de rouge (le rouge est la couleur avec laquelle les professeurs soulignent les fautes !).
C'est l'explication du mystérieux titre.
Je n’ai pas vraiment les éléments pour juger de la pertinence de ses arguments, dont certains sont intéressants, il a sans doute accès à des informations qui m’échappent.
Il peut aussi se tromper – et même mentir, ou au moins dire des vérités partielles. Quoiqu’il en soit, il reste gênant d’imaginer que le Saint-Père a revêtu de l’autorité du magistère un texte primordial – mais un texte dont il ne partagerait pas les contenus ! Simplement pour « maintenir la paix dans la famille curiale ».

Le texte n’a à ma connaissance pas encore été traduit en français.
Pour permettre le débat, j’ai essayé de le faire.
Comme l'anglais de G. Weigel est pour moi assez coriace (et que son propos est par moments confus, ses phrases sont trop longues et manquent de fluidité) je me suis aidée de la traduction en italien de ce site : http://fidesetforma.blogspot.com/...

L’article de Weigel est passé au crible ici (en anglais) : http://evangelicalcatholicism.wordpress.com/...
Et Philippe Maxence lui consacre un article dans l’Homme Nouveau .
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Sur les encycliques sociales, lire ici: Un peu d'histoire: les encycliques sociales

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CARITAS IN VERITATE EN OR ET ROUGE
(Caritas in Veritate in Gold and Red)
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Article en anglais: http://article.nationalreview.com..

La vengeance de Justice et Paix (ou ce qui pourrait leur paraître tel)

Par George Weigel

Dans le monde souvent imprévisible du Vatican, il était aussi certain que possible qu'il y aurait une encyclique papale en 1991 pour commémorer le centenaire de Rerum novarum - la lettre de Léon XIII, écrite en 1891, considérée à juste titre comme la Magna Carta de la doctrine sociale catholique moderne. Le Conseil Pontifical Justice et Paix, qui se voit comme le gardien curial de la flamme de l'enseignement social catholique authentique, prépara une ébauche qui fut dûment envoyée au Pape Jean-Paul II - il avait déjà eu une mauvaise expérience avec la pensée communément gauchiste et guère originale de la Commission Justice et Paix, durant la préparation de l'encyclique sociale de 1987, Sollicitudo Rei socialis. Jean-Paul II discuta du projet avec les collègues en qui il plaçait sa confiance: un intellectuel de pointe, qui avait déjà eu de longs entretiens avec le Pape lui dit que le projet était inacceptable, puisqu'il ne reflétait tout simplement pas le mode de fonctionnement de l'économie globale du monde sorti de la guerre Froide.

Jean-Paul II laissa donc tomber l'ébauche de Justice et Paix, et créa une encyclique qui était une commémoration de Rerum novarum. Non seulement parce que Centesimus annus reprenait habilement la structure intellectuelle de la doctrine sociale catholique de Léon XIII ; mais aussi parce qu'elle proposait une trajectoire solide pour le développement ultérieur de ce corps de pensée unique, soulignant la priorité de la culture dans la société triplement libre (liberté économique, démocratie politique, vibrante culture morale publique). En soulignant la créativité humaine comme source de la richesse des nations, Centesimus annus affichait aussi une lecture des signes économiques des temps, empiriquement beaucoup plus aiguë que ce qui était visible dans les positions erronées de Justice et Paix. En outre, Centesimus annus écartait l'idée d'une « troisième voie catholique », quelque part « au sein » ou « au-delà » ou « au-dessus » du capitalisme et du socialisme - le rêve préféré des catholiques depuis GK Chesterton jusqu'à John A. Ryan et Ivan Illich.

En un mot, ce fut une déroute - le Waterloo de Justice et Paix. Depuis lors, Justice et Paix - qui peut pardonner, mais qui n'a certainement pas oublié - rêve de vengeance.

Cette vengeance ne s'est pas manifestée au cours des dernières années du pontificat de Jean-Paul II, malgré les efforts pour convaincre le Pape de marquer par une grande déclaration le 30ème anniversaire de l'encyclique sociale de 1967 de Paul VI, Populorum progressio - ou, dans le cas où ce stratagème échouerait, de marquer le 35ème anniversaire de Populorum Progressio. Évidemment incapable de supporter une réponse négative, Justice et Paix a déplacé cet objectif en lorgnant vers le 40ème anniversaire de Populorum Progressio, en 2007. Et l'un des pires secrets à Rome est qu'au moins deux projets d'une telle encyclique, et peut-être trois, ont été repoussés par le Pape Benoît XVI (ndt: cela pourrait expliquer les retards et les fausses "fuites").

Que Justice et Paix ait imaginé une encyclique pour l'anniversaire de Populorum progressio, comme véhicule pour sa contre-attaque contre Centesimus annus, est en soi instructif. En effet, dans la longue série d'enseignements sociaux papaux, qui va de Rerum novarum à Centesimus annus, Populorum Progressio est manifestement un canard boîteux, tant dans sa structure intellectuelle ( à peine reconnaissable comme étant dans la continuité du cadre de référence pour la pensée sociale catholique établie par Léon XIII et élargie dans Quadragesimo Anno de Pie XI) que dans sa lecture erronée de la politique économique et des signes des temps (qui a été par la suite brouillée par les conceptions gauchistes et progressistes alors en vogue sur les problèmes de la pauvreté du Tiers-Monde, ses causes et ses remédes). Centesimus annus a implicitement reconnu ces défauts, non seulement en soutenant que la pauvreté dans le Tiers Monde et dans les pays développés d'aujourd'hui est un problème d'exclusion des réseaux globaux d'échange dans une économie dynamique (ce qui a mis l'accent sur les stratégies morales de création de la richesse, le renforcement du rôle des pauvres, et l'inclusion), mais aussi un problème de cupidité du Monde développé, dans une économie statique (ce qui induirait à accentuer la redistribution morale de la richesse). De manière assez intéressante, le même Paul VI avait reconnu que Populorum Progressio avait raté sa cible par certains aspects, ayant été mal comprise par certains comme une approbation papale tacite de la révolution violente au nom de la justice sociale. Le Pape Paul chercha à corriger le tir avec la lettre apostolique de 1971, Octogesima adveniens, un autre document pour l'anniversaire de Rerum novarum.

Aujourd'hui arrive Caritas in veritate, l'encyclique sociale de Benoît XVI longtemps attendue et très retardée. Elle semble être un hybride, le mélange de la profonde réflexion sociale du Pape avec des éléments de Justice et Paix en matière de doctrine sociale catholique, qui imagine que la doctrine repart de Populorum Progressio. En effet, les plus éminents Vaticanologues pourraient facilement parcourir le texte de Caritas in veritate, surlignant les passages qui sont évidemment bénédictins avec un marqueur couleur d'or et ceux qui reflètent les positions actuelles erronées de Justice et Paix en rouge. Avec tout le respect dû, le résultat que cette encyclique ressemble à un ornithoryngue.

Les passages de Caritas in veritate clairement bénédictins suivent et développent la ligne de Jean-Paul II, en particulier à travers le fort accent mis par la nouvelle encyclique sur la vie (avortement, euthanasie, destruction d'embryons, recherche sur les cellules-souches), comme sur les questions de justice sociale - que Benoît étend avec finesse à la discussion sur les questions d'environnement, comme lorsqu'il suggère qu'il est improbable que les personnes qui ne se préoccupent guère des enfants à naître puissent apporter une contribution sérieuse à une écologie humaine qui s'occupe de la nature. Les sections bénédictines dans Caritas in veritate sont aussi - et de façon prévisible – fortes, et sollicitent le lien intrinsèque entre charité et vérité, en soutenant que le soin pour les autres du point de vue moral, sans la vérité sur la personne humaine, se réduit inévitablement à un simple sentimentalisme.

L'encyclique, à juste titre, sinon avec prudence, suggère que les gouvernements du Tiers Monde ont plus à faire avec la pauvreté et la faim qu'avec le manque d'aides internationales pour le développement ; elle reconnaît que les taux de natalité catastrophiquement bas créent de graves problèmes économiques au niveau mondial (même si ce point n'est pas bien développé, comme cela l’avait été dans les précédents essais de Joseph Ratzinger) ; elle critique âprement les programmes d'aide internationale liés à l'obligation de contraception et la fourniture de « services de santé reproductive » (un euphémisme des Nations Unies pour l'avortement à la demande), et fait le lien entre liberté religieuse et développement économique. Tout cela est bienvenu, et tout cela est manifestement de Benoît XVI, en continuité avec Jean-Paul II et son extension de la ligne papale inspirée par Rerum novarum dans Centesimus annus, Evangelium vitae (encyclique de 1995 sur la vie), et Ecclesia in Europa (en 2003, exhortation apostolique sur le futur de l'Europe).

Mais il y a ensuite les passages qui doivent être surlignés en rouges - morceaux qui reflètent les idées et les approches de Justice et Paix que Benoît a évidemment cru devoir accueillir. Quelques-uns de ceux-ci sont simplement incompréhensibles, comme lorsqu'il est affirmé que pour vaincre la pauvreté du Tiers Monde et le sous-développement, il faut une « nécessaire ouverture, dans un contexte mondial, à des formes d'activités économiques marquées par des quotas de gratuité et de communion. » Cela peut signifier quelque chose d'intéressant ; ou peut signifier aussi quelque chose de naïf ou de stupide. Mais, contextuellement, il est pratiquement impossible de savoir ce que cela signifie.

L'encyclique contient une longue discussion sur le « don » (et donc sur la « gratuité »), qui, encore une fois, pourrait être une intéressante tentative d'appliquer à certains aspects des activités économiques le personnalisme chrétien de Jean-Paul II et l'enseignement chrétien du Concile Vatican II, dans Gaudium et spes (24), sur l'impératif moral de faire don aux autres de nos vies, ce don que la vie elle-même est pour nous. Mais le langage, dans ces passages de Caritas in veritate est si confus et si embrouillé qu'il suggère la possibilité que ce qui peut être entendu comme un nouveau point de départ conceptuel pour la doctrine sociale catholique est, en réalité, un sentiment confus, précisément du type même que l'encyclique déplore comme détaché de la vérité dans la charité.

On trouve aussi dans l'encyclique davantage sur la redistribution de la richesse que sur la création de richesse - signe certain des positions erronées de Justice et Paix quant au travail.
Et un autre dada de Justice et Paix - la création d'une « autorité politique mondiale » afin de garantir le développement humain intégral - est revisité, sans approfondir autrement la façon dont cette autorité devrait opérer que dans la confiance curiale en la supériorité intrinsèque d'une gouvernance transnationale. (Un des éternels mystères de l'Église catholique est cette confiance que la Curie Romaine place dans ce fantasme d'une « autorité politique mondiale », étant donné l'expérience du Saint-Siège auprès des Nations Unies dans la lutte pour la vie, la liberté religieuse, et la dignité élémentaire. Mais tel est le point de vue de Justice et Paix, où l'évidence, l'expérience, et les canons du réalisme chrétien semblent parfois de peu d'importance.)

Si ceux qui se terrent dans les niches intellectuelles et institutionnelles du Conseil Pontifical Justice et Paix laissent imaginer que Caritas in veritate sera une rupture par rapport à ce qu'ils croient avoir souffert avec Centesimus annus, et si en outre ils laissent croire que Caritas in veritate va remettre la doctrine sociale catholique sur un voie complètement nouvelle, déjà définie par Populorum Progressio (comme une consultant de Justice et Paix l'a déjà dit), ils vont être déçus dans leurs attentes. L'incohérence des passages de Justice et Paix dans la nouvelle encyclique est si profonde, et le langage, dans certains cas, tellement impénétrable, que ce que les défenseurs de Populorum Progresio peuvent imaginer comme une nouvelle sonnerie de trompette ressemble bien plus à un couac.

Il se pourrait que Benoît XVI, âme pleine de douceur , ait jugé nécessaire d'inclure dans son encyclique ces multiples "off-notes", afin de maintenir la paix à l'intérieur de son noyau curial familial. Ceux qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre se concentreront, dans la lecture de Caritas in veritate, sur ces parties de l'encyclique qui sont clairement bénédictines, parmi lesquelles la défense de la part du Pape de la nécessaire collaboration entre foi et raison et son développement du thème signé Jean-Paul II - que toutes les questions sociales, y compris les questions politiques et économiques, sont en dernière analyse, les questions de la nature de la personne humaine.

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(*)

Philippe Maxence précise qu’aux Etats-Unis, sa réputation est plus nuancée que celle qui lui est faite en France comme biographe de Jean-Paul II et auteur d’un beau « Choix de la Vérité » sur Benoît XVI :

Weigel, auquel on reconnaît intelligence et compétence, est perçu comme l’un des plus vigoureux porte-parole du courant « catho-neo-conservateur », ce qui se traduit par un conservatisme religieux et une vision politique et sociale libérale. George Weigel combat pour une société reposant sur une sorte de triptyque : économie libre, démocratie et morale public. Ce que George Weigel entend par « économie libre », c’est l’économie de marché, lequel est censé réguler l’activité économique.

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